L'Estrie fait face plus tôt que les autres régions au vieillissement de sa population. Dans ce contexte, elle doit faire preuve d'imagination pour retenir les cerveaux formés dans ses institutions d'enseignement et attirer les travailleurs. Elle peut notamment miser sur la qualité de vie, estiment Manon Laporte et Luc Chapdelaine, deux personnalités d'affaires de la région.

En chiffres

Estrie

Population active : 164 900

Taux de chômage : 6,4 %

Revenu disponible par habitant (2014) : 24 443 $

Québec

Population active : 4 450 800

Taux de chômage : 7,7 %

Revenu disponible par habitant (2014) : 26 046 $

La région peut compter sur la présence d’institutions d’enseignement postsecondaire pour former sa main-d’œuvre. Photo d’archives.

BDV pour chacune : Des étudiants sur le campus de l’Université de Sherbrooke. Crédit : La Tribune.

Innovation

Manon Laporte

55 ans

Présidente-directrice générale d'Enviro-accès

Dans la région depuis toujours

La matière grise est la plus grande richesse de l'Estrie, estime Mme Laporte. La présence des institutions d'enseignement est notamment un terreau fertile pour l'innovation. « L'économie est très diversifiée, constate-t-elle. Avec les années, des industries plus traditionnelles ont évolué vers des niches. Plusieurs entreprises de haute technologie sont aussi venues s'ajouter. »

Elle croit toutefois que la région doit faire plus d'effort pour retenir les jeunes. « Il faut trouver des façons de garder cette richesse que l'on développe, croit-elle. Une des clés, je pense, c'est d'encadrer ceux qui ont un potentiel entrepreneurial. » Mme Laporte signale que la diversité culturelle de la région est aussi une force.

Par ailleurs, elle déplore l'absence d'un aéroport avec des lignes commerciales régulières vers les grands centres. « Les gens qui rayonnent doivent déployer plus d'efforts pour voyager, ils doivent se rendre à Montréal, note-t-elle. Ils le font, mais c'est un handicap. »

Bas de vignette : Manon Laporte, Présidente-directrice générale d'Enviro-accès, croit que la proximité avec les États-Unis est un atout encore sous-exploité par les entreprises. Photo fournie par Enviro-accès.

Manon Laporte, Présidente-directrice générale Enviro-accès inc., pour le Portfolio sur l’Estrie à être publié le 14 avril 2016. Photo fournie par Enviro-accès.

Transition

Luc Chapelaine

54 ans

Directeur général de la Corporation ski et golf Mont Orford

Dans la région depuis sept ans

L'Estrie est en transition vers une économie axée sur le savoir, constate M. Chapdelaine. « Souvent, les gens dans l'industrie du savoir manquent de main-d'oeuvre alors qu'il manque d'emploi pour les travailleurs de l'industrie traditionnelle. »

Il juge cependant que sa région a plusieurs atouts pour attirer à la fois les entreprises et les travailleurs. « Sherbrooke est une grande ville universitaire, c'est une force en terme de savoir et de développement des connaissances, estime-t-il. Les gens viennent de loin pour étudier ici. »

L'homme d'affaires vante également la qualité de vie dans la région avec sa nature très présente et ses paysages magnifiques. « Il y a une mixité entre le plein air, l'art de vivre et la culture avec des théâtres et un orchestre symphonique », décrit-il.

Un atout certain pour l'industrie touristique, surtout avec la baisse de la valeur du dollar. « Cette année, on a senti un retour des touristes américains, note-t-il. Il y a aussi les Québécois que l'on retient davantage chez nous. »

Bas de vignette : Luc Chapelaine, directeur général de la Corporation ski et golf Mont Orford, est également coprésident de la Chambre de commerce et d'industrie Magog-Orford. Photo fournie par la Corporation ski et golf Mont Orford.

Luc Chapdelaine, directeur général de la Corporation ski et golf Mont Orford pour le Portfolio sur l’Estrie à être publié le 14 avril 2016. Photo fournie par la Corporation ski et golf Mont Orford.

Forces

La proximité avec les États-Unis est une force indéniable. « Les exportations fonctionnent énormément actuellement, constate David Létourneau, directeur régional du ministère de l'Économie, de la Science et de l'Innovation. Nous avons notamment des entreprises dans le domaine de la fabrication métallique, du bois et du matériel de transport. Plusieurs profitent de la relance aux États-Unis et de la valeur du dollar canadien. » Pour l'année 2015-2016, son ministère soutient une quarantaine d'entreprises dans le développement de leurs marchés. Sans compter les nombreuses qui exportent déjà !

Pour développer les entreprises et la main-d'oeuvre, la région compte notamment deux incubateurs, à Magog et Sherbrooke, deux universités et quatre institutions collégiales. « C'est un défi de garder ces cerveaux-là, mais on y parvient en partie grâce à la qualité de vie, note M. Létourneau. On observe d'ailleurs que des gens amorcent leur carrière à Montréal puis reviennent s'installer ici pour cette raison. »

Bas de vignette : La région peut compter sur la présence d'institutions d'enseignement postsecondaire pour former sa main-d'oeuvre. Photo d'archives.

Défis

L'Estrie fait face au vieillissement de la population plus tôt que le reste de la province. « La population des 15 à 64 ans diminue énormément tandis que le nombre de personnes de plus de 65 ans va doubler d'ici 2036 », précise David Létourneau, directeur régional du ministère de l'Économie, de la Science et de l'Innovation.

La région doit donc faire preuve d'ingéniosité afin de recruter de la main-d'oeuvre. « Il y a notamment un projet, dans la région de Mégantic, d'amener des gens des communautés culturelles de Montréal et Sherbrooke y travailler en semaine, raconte M. Létourneau. Le logement et le transport sont fournis et ils retournent chez eux la fin de semaine. » Cela leur permet « d'essayer » ce secteur avant de l'adopter.

Affectée par la tragédie de Lac-Mégantic et la fermeture de la mine Jeffrey, à Asbestos, l'Estrie peut aussi compter sur deux fonds de développement économique de 10 millions et 50 millions.

Bas de vignette : La région de Mégantic veut séduire environ 50 travailleurs de Montréal et Sherbrooke pour les inciter à s'y installer. Photo d'archives.

En bref

Cinq grands employeurs : 

Desjardins (2687 employés)

BRP (2400 employés)

Waterville TG (1150 employés)

Domtar (850 employés)

Nordia (429 employés)

36 parcs industriels, dont deux scientifiques

Grands secteurs d'activité : 

Soins de santé et assistance sociale (26 800 emplois)

Fabrication (25 800 emplois)

Commerce de gros et de détail (20 800 emplois)

Sièges sociaux

BRP (Valcourt)

Laiterie de Coaticook (Coaticook)

Eggsquis (Sherbrooke)

Trois grandes villes

Sherbrooke (162 638 habitants)

Magog (26 342 habitants)

Coaticook (9186 habitants)

(Source : ministère de l'Économie, de l'Innovation et des Exportations et Statistiques Canada)