La tendance est claire: depuis le début du millénaire, les entreprises québécoises délaissent progressivement les États-Unis pour se tourner vers d'autres marchés internationaux. Cette semaine, nous faisons le point sur le secteur du bois d'oeuvre.

Si le Québec prend ses distances des États-Unis pour l'exportation de certains de ses produits, la situation est moins vraie dans le cas du bois.

Un exemple? Que vous soyez dans un hôtel de New York ou de Las Vegas, il y a de bonnes chances que le sommier sur lequel vous passez la nuit soit composé de bois québécois.

C'est que certains transformateurs de la province se sont taillé une place importante dans le créneau de la transformation des produits de nos forêts. Une production parmi tant d'autres qui place le Québec en tête de la transformation du bois en Amérique du Nord, selon André Tremblay, président du Conseil de l'industrie forestière du Québec (CIFQ).

«On est l'endroit en Amérique du Nord où il se fait le plus de deuxième et de troisième transformation, affirme le représentant de l'industrie. Le «bois d'économie», par exemple, qu'on utilise pour faire de la clôture et de la poutrelle, est même importé d'Ontario, parce qu'on ne fournit pas nos usines de transformation.»

Comme pour bien d'autres secteurs, les États-Unis représentent de loin le principal marché d'exportation du Québec pour le bois et ses produits dérivés. Bon an, mal an, le pays de l'Oncle Sam absorbe la moitié de la production québécoise.

Pas surprenant donc que la récente crise économique ait durement frappé l'industrie. Sa production est d'ailleurs passée d'un sommet de 7 milliards de pieds-mesure-de-planche (pmp), la mesure utilisée dans l'industrie, à 4 milliards de pmp aujourd'hui.

On voit toutefois la lumière au bout du tunnel, croit André Tremblay. Avec la reprise, la mise en chantier de nouvelles maisons devrait reprendre là où elle a laissé selon lui. «C'est inévitable, dit-il. Les maisons qui n'ont pas été construites devront être construites.»

On le constate déjà sur le terrain, d'ailleurs. Au cours de la dernière année, le nombre de mises en chantier a grimpé de 21,5% aux États-Unis, pour atteindre une production annuelle de 750 000 nouvelles maisons. C'est toutefois moins que les 1,2 million de mises en chantier par année d'avant la crise.

Principales destinations du bois québécois

Depuis un sommet de 4,7 milliards de dollars atteint en 2004, les exportations québécoises de bois ont périclité pour atteindre un plancher à 1,6 milliard en 2011. Signe peut-être d'un changement de tendance, leurs valeurs ont progressé à 1,7 milliard l'an dernier. Par leur proximité, les États-Unis accaparaient 89 % des exportations étrangères de bois du Québec, en 2012.

1) États-Unis : 1 527

(2) Union européenne : 45

(3) Russie : 31

(4) Chine : 25

(5) Arabie Saoudite : 12

(6) Japon : 11

En millions de mètres cubes, en 2012

Source: Industrie Canada

Vers plus de transformation

Si la demande américaine pour le bois d'oeuvre reprend progressivement du mieux, les conditions de son commerce risquent toutefois de changer, souligne Luc Bouthillier, professeur au département des sciences du bois et de la forêt à l'Université Laval.

À son avis, les Américains vont chercher autre chose que des planches et des madriers fraîchement coupés par nos scieries; ils préféreront plutôt les produits usinés, forçant nos entreprises à changer leurs façons de faire. «On ne doit plus être que des fabricants de commodités, dit-il. Il faut avoir l'approche client et offrir des produits qui ont en tête le consommateur final.»

Ainsi, pour tirer parti de la reprise de constructions domiciliaires aux États-Unis, les entreprises québécoises devront se tourner vers la fabrication de composantes de maisons, voire la production de maisons modulaires et usinées.

Le Québec a d'ailleurs fait un pas en avant pour encourager le développement d'une telle industrie. En vertu de la Charte du bois, la Régie du bâtiment autorise dorénavant, sans permis spécial, la construction d'immeubles de six étages ou moins faits en bois.

C'est, entre autres, grâce aux recherches effectuées dans les laboratoires de FPInnovations, l'organisme à but non lucratif financé à la fois par l'industrie et les gouvernements, si on peut aujourd'hui miser sur le bois pour assembler des structures qui requéraient encore hier de l'acier et du béton.

Ce bois d'ingénierie est rempli de promesses et est appelé à prendre sa place dans l'univers de la construction, selon Pierre Lapointe, directeur général de FPInnovations.

Le commerce mondial du bois

Grâce à la taille de leur production, la Russie, les États-Unis et le Canada font tous trois partie des cinq plus importants exportateurs de bois et de produits du bois dans le monde. Du côté des importations, l'appétit de la Chine est indéniable, avec près de 40 millions de mètres cubes de bois importés en 2012.

Cinq pays exportateurs

[Pays : Volume]

Russie : 18

Nouvelle-Zélande : 14

États-Unis : 12

Canada : 6

République tchèque : 5

En millions de mètres cubes, en 2012

Source: FAO

[Cinq pays importateurs : Volume]

Chine : 39

Inde : 9

Autriche : 7

Corée du Sud : 7

Suède : 7

En millions de mètres cubes, en 2012

Source: FAO