La tendance est claire : depuis le début du millénaire, les entreprises québécoises délaissent progressivement les États-Unis pour se tourner vers d'autres marchés internationaux. Cette semaine, nous faisons le point sur les industries du vêtement et du textile.

Les industries québécoises du vêtement et du textile sortent transformées d'une décennie marquée par l'arrivée massive de produits asiatiques dans les commerces de la province. Et cette transformation rime aujourd'hui avec spécialisation.

Il y eut d'abord les vêtements made in China puis, au cours des années 2000, une déferlante encore plus importante à laquelle se sont ajoutés ses voisins, le Bangladesh, l'Inde, le Cambodge et le Viêtnam. En l'espace de 10 ans, le commerce du vêtement et du textile s'est complètement transformé partout en Occident. Le Québec n'a pas été épargné.

Cette vague s'explique par des assouplissements de l'Organisation mondiale du commerce qui, en 2005, a abaissé les barrières tarifaires qu'imposaient jusqu'alors des pays comme le Canada pour empêcher l'entrée massive de vêtements fabriqués à l'étranger.

La décision a eu une incidence majeure sur l'emploi au Québec, accélérant un déclin déjà entamé dans l'industrie du vêtement. Ainsi, alors qu'il employait près de 70 000 travailleurs au détour de l'an 2000, le secteur n'en comptait plus que 28 500 en 2011.

Fermetures ou redéploiements

Du coup, plusieurs usines de vêtements et de textile ont fermé leurs portes ici pour les ouvrir ailleurs. D'autres ont maintenu leurs activités au Québec, mais elles se sont adaptées au marché.

Comment y sont-elles parvenues? «Par la création de marchés de niche», répond Ève Grenier, présidente de C.J. Grenier, une entreprise montréalaise de lingerie fondée en 1860.

Selon la femme d'affaires, aussi représentante de Vêtement Québec, la spécialisation des fabricants québécois dans des productions à faible volume, comme les vêtements haut de gamme, a aussi contribué à sauver une partie des PME du secteur.

Bien sûr, cette transformation n'aura pas été suffisante pour compenser la fermeture de plusieurs grandes usines au Québec et remplacer la part de leurs exportations dans l'économie de la province. À ce chapitre, le Québec a absorbé un dur coup dans les années 2000. Ainsi, les exportations américaines, principal marché à l'étranger, ont reculé de 80% en l'espace de 10 ans.

Du côté européen, toutefois, la situation s'est améliorée au point que ce marché représente aujourd'hui près de 20% des exportations québécoises de vêtements. Un chiffre qui ne dépassait pas 4% en 2003.

«La situation pourrait encore s'améliorer, croit Mme Grenier, faisant référence à l'accord de libre-échange entre le Canada et l'Union européenne. On espère que ça va faciliter les choses.»

Reste à connaître, selon elle, quelques détails, notamment les règles qui vont permettre ou non la mention Made in sur les vêtements.

Des achats tournés surtout vers l'Asie

La chute des barrières tarifaires en 2005 a ouvert les vannes à l'arrivée de vêtements et autres produits du textile en provenance de pays en voie de développement, surtout d'Asie. Globalement, en 2012, le Québec a importé quelque 3,6 milliards de marchandises dans ces deux catégories.

Valeur en miliions de dollars

Vêtements  /  Textile


Chine 1525 / 442 (1)

Bangaldesh 329 /28 (2)

Inde 91 / 48 (3)

Cambodge 88 / 1 (4)

Viêtnam 79 / 6 (5)

États-Unis 69 / 154 (6)

Indonésie 52 /12 (7)

Italie 47 / 44 (8)

Pakistan 43 / 33 (9)

Turquie 43 / 14 (10)

Source: Industrie Canada

Innovations dans le textile

Comme pour le vêtement, le secteur du textile s'est aussi bien adapté à l'arrivée massive de produits fabriqués en Asie au cours des années 2000. Pansements antimicrobiens pour le secteur de la santé, membranes filtrantes pour les industriels, géotextiles pour le génie civil, etc.: la liste des produits issus de cette industrie est longue. «C'est d'ailleurs cette multitude de spécialités qui a fait la force de cette industrie au cours des dernières années», explique Linda Cyrenne, directrice générale du Comité sectoriel de main-d'oeuvre de l'industrie textile du Québec.

Malgré ce positivisme, les exportations québécoises dans le secteur du textile ont suivi celles du vêtement et ont encaissé un recul de plus de 60% au cours des 10 dernières années. Elles se chiffraient tout de même à 425 millions en 2012.

Aujourd'hui, l'industrie compte sur 525 entreprises au Québec et emploie un peu plus de 12 500 travailleurs, soit environ 55% de tous ceux qui oeuvrent dans ce secteur au pays.

Une baisse dramatique des exportations

Le recul subi par les industries québécoises du textile et du vêtement au cours des années 2000 se vérifie au chapitre de l'emploi, mais aussi des exportations. Depuis 2003, elles ont encaissé une baisse globale de 67%, glissant à 900 millions, par rapport à 2,9 milliards 10 ans plus tôt. La situation s'est quelque peu stabilisée de 2009 à 2012 : les exportations n'ont reculé que de 8%.

Par leur proximité, les États-Unis constituent le principal marché d'exportations pour nos fabricants de vêtement et de textile.

Encore en 2012, les Américains accaparaient les trois quarts des ventes étrangères de vêtements québécois, et ce, malgré une chute de 80% de la valeur des exportations québécoises aux États-Unis de 2003 à 2012. Au cours de la même période, les ventes de vêtements destinés à l'Europe ont pris le chemin inverse, grimpant de 38% pour atteindre les 82 millions en 2012.

Du côté du textile, le recul des exportations se vérifie partout, à l'exception de la Chine et des pays de l'Amérique du Sud où elles sont restées stables.

Destination des exportations québécoises

Pays : Vêtements | Textile

États-Unis : 298 | 343

Union européenne : 82 | 16

Émirats arabes unis : 5 | n.d.

Australie : 4 | n.d.

Mexique : 3 | 19

Chine : 2 | 7

Amérique du Sud : n.d. | 16

En 2012, en millions de dollars.

Source : Industrie Canada