Longtemps ignorés par le monde international des affaires, les cabinets d'avocats canadiens sont aujourd'hui courtisés, grâce à leur expertise acquise en droit minier, en ressources naturelles et en financement d'entreprise.

«C'est un mariage à plusieurs facettes!», s'exclame Jean Bertrand, associé-directeur au bureau de Montréal du cabinet Norton Rose Canada. En début d'année, la fusion avec Macleod Dixon a permis au cabinet canadien d'entrer en Amérique latine. Le Venezuela abrite les plus grandes réserves de pétrole, et la Colombie bénéficie d'un climat économique en pleine croissance. Désormais, Norton Rose y compte 75 avocats pour servir des clients canadiens, cherchant une croissance dans le domaine minier ou de l'énergie.

Cet échange, à double sens, permet également aux «junior minings» (jeunes sociétés minières) sud-américaines, de venir se financer sur le marché des capitaux canadiens, au TSX de Toronto notamment. La Bourse de Toronto elle-même organise des voyages à l'étranger pour promouvoir ses services, et «nous avons tout intérêt à emboîter le pas», précise Charles Chevrette, associé-directeur au bureau de Montréal du cabinet MacMillan.

Depuis 18 mois, la mondialisation déferle sur les cabinets canadiens. «Il y a urgence sur le marché des services juridiques canadiens. Soit on est très grand, soit on est petit et spécialisé», explique Jean Bertrand. Si Norton Rose a conclu plusieurs fusions importantes en deux ans, le modèle «boutique», comme il le qualifie, reste néanmoins bien vivant.

Miller-Thomson, spécialisé notamment dans le secteur des ressources naturelles, s'est donné une stature nationale l'année dernière en fusionnant avec Balfour Moss, et étend ainsi son expertise en droit minier du Québec à la côte Ouest. «Nos concurrents se développent à l'international, car ils doivent suivre leurs clients», explique Pierre Paquet, membre du comité exécutif national de Miller-Thomson. «Notre stratégie à l'international consiste à développer des ententes avec d'autres bureaux pour amener des investisseurs étrangers intéressés par le marché canadien des ressources naturelles», ajoute-t-il. Le cabinet travaille avec les gouvernements, associations et organisations chargés de mousser l'intérêt des investisseurs vers le Canada. MacMillan, acteur important du secteur, a fusionné l'année dernière avec Lang Michener: «On pratique le droit canadien, contrairement à nos concurrents qui ouvrent des bureaux à l'étranger pour pratiquer le droit local», précise Charles Chevrette. Son cabinet a développé des liens en Asie, grâce à ses bureaux de Vancouver et de Hong Kong. Le marché canadien des capitaux et le «mining» sont les secteurs les plus catalyseurs pour développer une clientèle étrangère, et ont généré l'essentiel de la croissance des dernières années.

«Notre expertise nous permet d'aller sur les marchés étrangers, mais aussi d'être meilleur ici au Canada», explique Éric Bédard, associé-directeur pour la région de Québec chez Fasken-Martineau. La fusion avec un cabinet parisien en 2009 leur a ouvert les portes de l'Afrique francophone. Le déploiement international est profitable à l'économie canadienne. «Il y a des expertises que l'on développe au Québec, et que le volume d'affaires ne permet pas de soutenir; nos réseaux internationaux nous permettent de maintenir ces expertises à Montréal et les diffuser dans le monde», renchérit-il. Le cabinet reste à l'affut d'opportunités de développement, notamment en Asie.