Les investisseurs californiens derrière les succès de Facebook, Groupon et Angry Birds investissent à Montréal.

Accel Partners, fonds de capital-risque bien en vue dans la Silicon Valley, mise 30 millions de dollars sur l'entreprise montréalaise LightSpeed Retail, un secret bien gardé qui n'avait pas beaucoup attiré l'attention jusqu'à maintenant dans la métropole.

La jeune société conçoit des outils pour iPhone et iPad destinés aux vendeurs qui veulent impressionner les clients qui entrent dans leur boutique.

«On ne cherchait même pas de financement, ce sont les gens d'Accel qui nous ont approchés», raconte Dax Dasilva, fondateur et président de LightSpeed.

«Nous avions déjà reçu de l'intérêt de plusieurs personnes et j'avais toujours refusé. Cette fois, j'ai accepté en raison du profil des investisseurs. Accel est derrière certains des meilleures entreprises technologiques de la planète.»

Avec des ventes qui ont explosé de 1900% au cours des cinq dernières années, LightSpeed figure en première position des entreprises technos québécoises à la plus forte croissance, selon le magazine Profit. La boîte compte aujourd'hui 53 employés dans son siège social de Montréal et son bureau d'Ottawa. Dax Dasilva espère que l'investissement d'Accel lui permettra d'accélérer encore le rythme.

«On veut devenir beaucoup, beaucoup plus gros», dit M. Dasilva, concepteur de logiciels de Vancouver qui est tombé amoureux de Montréal il y a 11 ans et qui n'est jamais reparti.

Combattre le commerce électronique

Fondée en 2005, LightSpeed commercialise une plateforme censée «révolutionner le magasinage en boutique». Grâce aux applications conçues par l'entreprise, les vendeurs peuvent se balader en magasin, iPad ou iPhone à la main, et vérifier les stocks, montrer des modèles additionnels aux clients et même prendre leurs paiements.

«Les gens achètent de plus en plus en ligne et c'est un problème pour les détaillants. Pour inciter les consommateurs à quitter leur sofa pour venir en boutique, ils doivent augmenter leur niveau d'expérience», dit M. Dasilva.

Le jeune homme avoue s'être inspiré des boutiques Apple, où les vendeurs ont toujours le bon gadget en main pour interagir avec les clients.

«L'idée est de recréer un peu la magie qu'on sent dans les boutiques Apple, mais en allant encore plus loin», dit l'entrepreneur.

Les solutions de LightSpeed sont aujourd'hui utilisées par 10 000 détaillants de 30 pays, et 85% des ventes sont réalisées aux États-Unis.

Le fonds Accel, qui signe ici son tout premier investissement à Montréal, explique que c'est la nouvelle utilisation des produits Apple créée par LightSpeed qui l'a incité à approcher l'entreprise.

«L'une de nos thèses d'investissement est qu'on va commencer à voir les produits Apple de plus en plus dans les entreprises et dans le commerce de détail. C'est en documentant cette thèse que LightSpeed est apparue sur notre radar. Ils sont véritablement à l'avant de la vague qu'on anticipe», a expliqué à La Presse Affaires John Locke, associé chez Accel.

Le fondateur, Dax Dasilva, ne s'est pas montré facile à convaincre, raconte M. Locke.

«Je crois qu'on a dû faire sept ou huit voyages à Montréal avant de le convaincre d'accepter notre investissement, raconte-t-il en riant. Mais on aime ça comme ça. Les entrepreneurs qui ne cherchent pas d'argent sont souvent ceux qui ont réussi à construire des entreprises solides.»

Avec Angry Birds à Helsinki, Spotify à Stockholm, Atlassian en Australie et Groupon à Chicago, Accel Partners poursuit ainsi sa stratégie d'investir hors de la Silicon Valley.

«Nous croyons que des bonnes entreprises voient le jour partout dans le monde», dit John Locke.

Un associé d'Accel, Ryan Sweeney, siègera au conseil de LightSpeed. La stratégie du fonds est simple: utiliser son expertise et son réseau de contacts pour signer des partenariats avec de grandes chaînes de détaillants et accélérer la percée internationale de LightSpeed.

Ambitions élevées

Les ambitions, en tout cas, sont élevées.

«Nous ne voyons pas pourquoi LightSpeed ne génèrerait pas des revenus de plus de 100 millions d'ici quelques années», dit M. Locke.

Dax Dasilva, de son côté, prévoit doubler le nombre de ses employés d'ici un an, ouvrir un bureau à New York et offrir ses produits dans d'autres langues que l'anglais.

«Cette transaction, c'est beaucoup, beaucoup plus que seulement de l'argent», dit le jeune entrepreneur.