L’outil de travail d’un leader est sa propre personne, soit un amalgame de ses valeurs, ses talents et ses relations avec autrui. Plusieurs décennies après que Jim Collins nous a parlé du triomphe de la volonté professionnelle et de l’humilité personnelle du leader, force est de constater que la notion d’humilité n’a pas fait couler beaucoup d’encre…

C’est bien dommage, car l’humilité du leader est, à mon avis, l’un des moteurs les plus puissants pour transformer le talent en performance.

L’humilité est le fondement des vertus, parce qu’être humble, c’est se reconnaître tel qu’on est. La façon la plus percutante de s’en convaincre est de revoir les nombreux pièges liés au manque d’humilité quand on aborde les notions de réputation, de capacité d’apprentissage et de développement de talent.

PHOTO MATHIEU BÉLANGER, ARCHIVES LA PRESSE

Yvon Charest, ex-PDG d’Industrielle Alliance

Un manque d’humilité, observé de façon répétitive, a le pouvoir de bâtir une réputation de « personne peu généreuse, trop compétitive ou carrément mesquine ». Cela peut être un comportement déplaisant comme se vanter constamment ou se voir en compétition avec ses collègues, un comportement non respectueux comme de s’attribuer un mérite qui ne nous revient pas ou ne pas reconnaître la contribution d’autrui. Cela peut aussi être de la pure mauvaise foi, comme s’entêter dans son opinion en sachant qu’on a tort ou refuser de s’excuser.

Un manque d’humilité limite directement la capacité d’apprentissage d’une personne parce qu’elle s’emprisonne dans le piège de vouloir être perçue comme parfaite.

Ce faisant, la personne développe les réflexes de se construire une façade et de faire son autopromotion, alors que ce sont les réflexes opposés qui sont bénéfiques à l’apprentissage : aller en quête de feedback, considérer les critiques et demander de l’aide.

C’est toutefois sur le plan du développement du talent que le manque d’humilité a l’impact le plus négatif. La simple énumération des comportements requis pour développer le talent fait ressortir l’ampleur du défi pour un gestionnaire en manque d’humilité : développer le talent demande d’être tourné vers autrui et de trouver la satisfaction dans le succès des autres.

Il faut développer une relation de confiance par un désir sincère d’aider, bref, il faut que le cœur y soit. Il faut apprendre à questionner et bien écouter. Il faut comprendre et apprivoiser ses émotions et celles d’autrui. Il faut aider les gens que l’on développe à avoir une saine estime de soi. Il faut donner l’exemple et ne jamais s’en lasser. Tout cela pour dire qu’un bon développeur de talents est un expert en relations humaines constructives où les signes d’humilité dépassent largement les manifestations d’arrogance.

Jim Collins était d’avis que les leaders célèbres plus grands que nature avaient rarement mené une bonne compagnie à un niveau d’excellence. Ces gens avaient certes une grande volonté professionnelle, mais aussi une carence sur le plan de l’humilité personnelle. Il s’agit d’un bon rappel de l’importance de ne pas sous-estimer le moteur de l’humilité.

Soumettez votre lettre