Tous les vendredis, une personne du milieu des affaires se dévoile dans notre section. Cette semaine, Emna Braham, directrice générale de l’Institut du Québec, répond à nos questions.

Un mot ou une expression que vous ne pouvez plus supporter ?

C’était mieux avant, ou ça va de pis en pis. C’est un peu faire fi des faits. Le Québec est plus éduqué, plus égalitaire et plus riche aujourd’hui qu’il l’était il y a même 20 ans. C’est sûr qu’il y a des défis importants et des enjeux, mais le sens de l’histoire est plutôt vers le progrès : sur la place des femmes, sur l’éducation, sur la qualité de vie. On l’oublie, mais il y a plus d’avancées que de reculs.

Au bureau ou à la maison ?

Je travaille surtout au bureau. Aujourd’hui, je suis à la maison, mais c’est assez rare. On a de beaux nouveaux bureaux à HEC Montréal, dans un nouveau bâtiment, c’est magnifique. J’y suis en général quatre jours/semaine. Je préfère ça parce que c’est un travail qui demande beaucoup de collaboration, d’échanger des idées. Souvent, s’agglutiner en équipe devant un fichier Excel et regarder à quoi ressemblent les chiffres, c’est très porteur.

Prenez-vous une pause du travail le midi ?

Pas pour manger. Je vais manger une bouchée devant mon ordinateur. Je vais m’entraîner quelques fois par semaine à l’heure du dîner. Je ne pratique pas un sport de manière très assidue, mais j’ai vraiment besoin de me défouler, donc je fais du spinning ou un cours de cardio à midi ou le soir en rentrant à la maison. J’ai besoin de ça.

Y a-t-il un livre qui vous a marquée et que vous recommandez à d’autres ?

Il y a un livre que j’ai conseillé plusieurs fois à différents types de personnes. C’est Limonov d’Emmanuel Carrère. J’adore les documentaires, les récits de vie. C’est le récit d’un homme qui a vécu entre Moscou, Paris et New York, qui a vécu la fin de l’URSS. C’est fascinant comment la vie et l’histoire ont façonné la vie d’un homme et comment lui a eu un impact sur le cours de l’histoire. Il y a un aspect économique là-dedans. C’est la fin d’un modèle économique. J’aime beaucoup cette histoire.

Que faites-vous quand vous avez besoin de trouver une idée ?

J’écoute beaucoup. J’ai la chance d’être entourée de collègues très talentueux, de partenaires qui connaissent très bien plein de domaines très pointus. Mon premier réflexe est de faire une tournée d’appels pour écouter ce qu’ils ont à dire. J’appelle beaucoup, j’accumule tout ça et quand mon idée est plus mûre, je la teste avec les gens qui s’y connaissent.

Avez-vous ou avez-vous eu un mentor ?

Je ne sais pas si j’aurais dit que c’étaient des mentors sur le coup, mais les trois patrons que j’ai eus dans ma carrière ont été des mentors parce que j’ai pu les observer pour voir comment ils prennent des décisions, comment ils réfléchissent à certains enjeux, comment ils écoutent les gens qui les entourent.

Et tout ça fait que j’ai appris beaucoup en les observant. Aussi, ils m’ont mise dans des situations pour lesquelles je pensais que je n’étais pas du tout prête et ça m’a donné beaucoup confiance en moi de me rendre compte que j’étais capable de le faire.

Quel autre travail auriez-vous aimé faire ?

Quand j’étais à l’université, j’ai fait un peu de journalisme étudiant. De la presse écrite et de la radio. Et j’ai beaucoup aimé ça. J’accorde une énorme valeur au travail journalistique et je pense que c’est important et que c’est une institution extrêmement importante.

Quelles sont votre meilleure et votre pire habitude ?

La mauvaise habitude, c’est que je consomme beaucoup d’énergie à essayer de comprendre ce que les gens pensent, alors que c’est impossible de le savoir. Je travaille là-dessus…

La bonne habitude, c’est que je fais mes devoirs. J’essaie d’être toujours préparée, que ce soit pour une rencontre, une entrevue ou une présentation. Je veux être très préparée en ce qui concerne ce que je veux livrer comme message ou ce que je veux recevoir comme information. Si quelqu’un m’offre de son temps ou de son attention, je veux être à la hauteur.

Vous faites quoi pour vous déconnecter ?

J’ai une petite fille de 4 ans. Avec elle, c’est une déconnexion naturelle. Sinon, je pense qu’il faut occuper son esprit à autre chose. Moi, c’est beaucoup en lisant que je déconnecte complètement. De la littérature, quelque chose qui m’amène ailleurs. Je lis un roman qui se passe au Guatemala avec différents coups d’État, il y a 16 noms de colonels guatémaltèques dont il faut se souvenir. C’est parfait. Le titre est Temps sauvages, de Mario Vargas Llosa. Je le lis en français. Je lis beaucoup en anglais pour le travail, mais je ne trouve jamais le plaisir de la syntaxe et de la sonorité de la langue ailleurs qu’en français.

Votre meilleur investissement ?

Ce n’est pas moi qui l’ai fait, mais mes parents : mes études. C’est toujours le meilleur investissement qu’on peut faire. C’est ça qui fait qu’on peut choisir ce qu’on fait par la suite. J’y ai mis tout mon temps et toute ma passion, mais je suis consciente du privilège que j’ai eu d’avoir du soutien là-dedans.

Qui est Emma Braham ?

Emna Braham est directrice générale de l’Institut du Québec, un organisme indépendant fondé en 2014 dont la mission est de contribuer par ses études et ses analyses au développement économique et social du Québec.