VIA Rail Canada veut « ouvrir un nouveau chapitre » de son histoire. D’ici 2030, le président et chef de la direction de la société d’État, Mario Péloquin, se donne pour objectif d’augmenter la capacité à bord des trains de près de 20 %, tout en dégageant des économies équivalentes à 15 % de son déficit d’exploitation.

« Je crois fondamentalement au potentiel du rail passager, et surtout, j’ai l’ambition de ne pas attendre pour faire bouger les choses. […] Ce plan, c’est le signal d’une nouvelle ère qui s’ouvre. Aujourd’hui, nous avons la chance d’ouvrir un nouveau chapitre », plaidera ce jeudi M. Péloquin dans un discours très attendu devant la Chambre de commerce du Montréal métropolitain (CCMM), que La Presse a obtenu.

Pour faire « un bond de géant », il s’y engage notamment, d’ici seulement six ans, « à réduire [les] émissions de gaz à effet de serre [de VIA Rail] de 50 % par rapport à 2005 et à augmenter [sa] capacité de 18 % ».

Annuellement, VIA Rail calcule sa capacité en termes de sièges-milles disponibles (SMD), soit le nombre de sièges par passager et par mille – l’équivalent de 1,6 kilomètre parcouru. En 2023, ce chiffre était de 1,493 million ; en 2030, l’organisme espère atteindre 1,761 million.

L’homme d’affaires promet également de dégager des économies équivalentes à 15 % du déficit d’exploitation, afin d’en arriver à pouvoir « autofinancer » le plan de transformation. Comme le déficit de 2023 est évalué à environ 381,8 millions, cela représente donc environ 57,3 millions.

Nouveaux trains à la tonne

Tout se fera par étapes. D’abord, le train à grande fréquence (TGF) « est un superbe projet pour les années futures » et risque fortement de changer la donne, selon le PDG. Il rappellera notamment qu’en février dernier, le responsable du mégaprojet, Martin Imbleau, avait affirmé qu’un trajet entre Montréal et Toronto pourrait se faire en trois heures, voire moins.

L’appel d’offres de ce projet multimilliardaire a été lancé en septembre. En plus du scénario de référence, dans lequel les trains circuleraient à des vitesses de pointe d’environ 200 km/h sur des voies ferroviaires réservées aux passagers, les trois consortiums retenus doivent proposer une version plus ambitieuse avec une réduction des temps de trajet. Cette option semble prendre de plus en plus d’importance.

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Mario Péloquin, président et chef de la direction de Via Rail

N’empêche, « il faut améliorer maintenant l’expérience de nos passagers et notre service », note M. Péloquin. Selon lui, le changement sera déjà perceptible d’ici la fin de 2024, au moment où environ les deux tiers des 32 nouveaux trains devant s’ajouter dans les prochains mois au parc ferroviaire de VIA Rail, dans le corridor Québec-Windsor, seront livrés. L’ensemble des trains seront en service à l’été 2025.

« Ces trains offrent une expérience inégalée, confortable, ergonomique et entièrement accessible », affirme le président, qui promet de lancer « une vaste campagne en juin à Montréal pour présenter ces nouveaux trains », en vantant leur confort, le service à bord et la productivité pendant le voyage.

VIA Rail salue le « vote de confiance » du gouvernement Trudeau, qui s’est engagé en avril dernier dans son budget à remplacer les trains de longue distance, dont la fin de vie utile est fixée à 2035. En février, la société avait dit craindre de devoir procéder à des coupes majeures dans le service si rien n’était fait.

On ignore combien coûtera cette vaste opération de remplacement, mais on sait qu’elle coûtera au moins quelques milliards de dollars. Dans le corridor Québec-Windsor, les nouveaux trains ont coûté environ 1,5 milliard, sur une échelle de 1500 kilomètres, alors que le réseau à couvrir, ici, est de 10 000 kilomètres.

La plupart des trains de longue distance ont été construits entre 1946 et 1955. Ils relient notamment Halifax à Québec, et Toronto à Vancouver. « Nous lançons cette année le processus d’appel d’offres pour la nouvelle flotte. Je peux vous garantir que ces nouveaux trains feront bien des envieux à travers le monde. Nous allons concevoir des voitures de trains uniques au monde », promet Mario Péloquin.

Un appel à la « mobilité intégrée »

Dans son discours, le grand patron de VIA Rail lancera aussi un « appel à la collaboration » des acteurs de l’industrie du transport pour « que la mobilité intégrée devienne la règle plutôt que l’exception ». Il veut aussi inciter les employeurs à encourager l’utilisation du train dans leurs politiques sur les déplacements.

« Nous regardons ce qui se fait en Europe en termes de hubs stratégiques comme à Berlin ou aux Pays-Bas où différents modes de transport collaborent pour offrir la meilleure expérience de déplacement », explique M. Péloquin. Il veut notamment davantage « identifier des occasions de développement » autour des gares, et travailler sur les accès à ces dernières.

« Regardez ce que nous faisons à Ottawa. Notre nouvelle gare VIA Rail est au cœur du parcours de mobilité, reliant le train léger ainsi que les services d’autobus locaux et régionaux. C’est un parfait exemple de ce que nous voulons faire partout au pays. […] Avec les enjeux de logement et d’habitation, nous devons explorer toutes les avenues pour densifier les secteurs autour de nos gares », conclut-il.

Avec la collaboration de Julien Arsenault, La Presse