La nouvelle génération de durs à cuire n'est pas celle du Slapshot d'antan.

Dans Goon, à l'affiche vendredi prochain, l'acteur Seann William Scott incarne certes un gros bras aux poings d'acier qui frappe pour faire saigner. Il est pourtant un cran plus évolué que l'homo sapiens d'hier, car il fait aussi saigner les homophobes qui s'en prennent à ses amis. Ce héros nouveau genre, un dur au grand coeur de bonne famille, chemine dans un monde où la pornographie sur internet, l'ecstasy et une certaine promiscuité entre mâles semblent maintenant faire partie du paysage normal.

Si les années 2000 du mâle alpha ont été «bromantiques», la prochaine décennie s'annonce... «bronographique». Les limites de la chaste et franche camaraderie ont, dirait-on, été une fois de plus repoussées.

On connaissait déjà la «bromance», contraction portemanteau de «brother» et «romance», pour conceptualiser une relation d'affection amicale entre deux mecs hétéros à l'aise dans leurs vieux Converse. Le phénomène a fait du millage au grand écran (Bon Cop, Bad Cop, I Love you, Man, The Wedding Crashers, Wayne's World), démontrant que les gars sont capables d'amitiés viriles complexes et tendres qui, mais non, mais non, n'ont rien de sexuel.

«Bronography», une expression que la journaliste Johanna Schneller a inventée dans le Globe and Mail de samedi dernier, est le terme qui conceptualise ce qui surgit ces jours-ci dans la culture populaire.

Le film Goon, contrairement à son célèbre prédecesseur Slapshot donc, n'est pas qu'une satire anti-sexiste et anti-homophobe campée dans monde rarement associé à des valeurs progressistes. C'est aussi un festival abondant de références phalliques, avec un buffet à volonté de références à la protubérance mâle, passant du pogo à la dureté de la «porno illégale grecque» et autres finesses métaphoriques.

Le film de Michael Dowse s'inscrit dans une tendance lourde qui s'est fait sentir au plus récent gala des Golden Globes, où une allusion vaguement ou franchement phallique teintait presque chaque remise de statuette.

En guise d'apéritif, l'animateur Ricky Gervais a laissé entendre qu'il en avait «une» petite. En présentant un prix, l'acteur Seth Rogen a fait pouffer de rire Kate Beckinsale en déclarant que de la côtoyer provoquait chez lui une «érection massive». Mais, selon Johanna Schneller, cette tendance «bronographique» est devenue alarmante au moment où Georges Clooney a comparé le membre de Michael Fassbender à un bâton de golf...

L'homme se révèle

«Je pense que nous assistons en ce moment à une représentation plus réaliste de la façon dont les gars blaguent entre eux», évalue James Bassil, éditeur de la publication en ligne AskMen, qui s'adresse à un jeune lectorat masculin.

Selon lui, la nudité mâle était jusqu'à récemment le «dernier des tabous dans la culture populaire». Mais depuis que Justin Timberlake et Andy Sandberg ont chanté Dick In A Box, les gars n'ont plus de raison de se garder une petite gêne, dit-il.

En plus de pimenter les Golden Globes, le membre viril et ses amis, les attributs masculins, ont connu une grosse année. Justin Timberlake - encore lui - a montré ses fesses dans Friends with Benefits, les abdos de Ryan Gosling ont provoqué les cris admiratifs d'Emma Stone dans Crazy, Stupid, Love, Michael Fassbender a dévoilé son bâton de golf (s'cusez-là) dans Shame...

Et les filles, ces chanceuses, se sentent-elles gâtées par tant de chair exposée et commentée pour le plaisir de leurs yeux et de leurs oreilles?

«Depuis que les filles sont enfin autorisées à faire des jokes de pet (merci, Bridesmaids!), les studios se sont mis à croire qu'il était grand temps de laisser les hommes jouer les objets sexuels», déplorait la journaliste Julieanne Smolinsk, dans un son article XXX Men paru en novembre 2011 dans le magazine GQ.

On trouvait attendrissante la relation bromantique entre Georges Clooney et Brad Pitt. Mais quand George verse dans la «bromographie» avec Michael Fassbinder, on se sent comme de trop...