(Mont-Tremblant) Lorsque Paula Moltzan arrive sur un site de compétition, elle arrive rarement seule.

La skieuse de 29 ans avait déjà traversé la douane canadienne lorsqu’elle a répondu à l’appel de La Presse, jeudi matin. Elle était même à 45 minutes du mont Tremblant.

L’Américaine a utilisé sa voiture personnelle de sa résidence au Massachusetts pour se rendre au quatrième arrêt de la saison. Son mari, qui est aussi son technicien, était à bord.

Toutefois, M. et Mme Moltzan ne seront pas les seuls à prendre d’assaut la montagne des Laurentides au cours du week-end.

Toute la famille y sera, comme c’est le cas la plupart du temps. La semaine dernière, à Killington, les membres du clan étaient nombreux, visibles et bruyants. En première rangée sur le bord de la piste, ils arboraient des gilets de hockey avec le nom de Moltzan brodé derrière, portaient des chapeaux de cowboy, faisaient entendre leurs cloches à vache et brandissaient des pancartes avec le visage de leur préférée. C’est devenu monnaie courante et Moltzan s’en réjouit.

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Les membres du clan de Paula Moltzan étaient nombreux la semaine dernière à la Coupe du monde de Killington.

« Le père de mon mari a confectionné tous ces chandails et je pense qu’on en verra plusieurs ce week-end », a-t-elle assuré.

C’est fantastique d’avoir l’occasion de skier devant eux, mais ça ajoute évidemment une couche de pression. Tu ne veux pas faire d’erreurs, tu veux évidemment bien faire. Donc oui, c’est un peu plus de stress, mais ça reste ta famille avant d’être des partisans.

Paula Moltzan

En progression

Les encouragements de sa famille ont porté leurs fruits la semaine dernière au Vermont, où elle a terminé huitième au slalom géant du samedi et huitième au slalom du dimanche. Et ce, avec des dossards peu avantageux. Pourtant, la native du Minnesota a été en mesure de tirer son épingle du jeu, portée par l’énergie d’une foule conquise.

« Je pense que j’ai pris une meilleure direction à Killington. J’avais bien skié à Solden, mais à Levi, c’est toujours un peu plus difficile. Donc j’arrive toujours un peu plus stressée lors des courses locales. Surtout quand tu ne skies pas au meilleur de ta forme. Mais je crois que d’avoir deux bonnes courses à la maison m’a permis d’établir de bonnes bases. »

Lors de la première course de la saison, en Autriche, elle avait terminé 11e et en Finlande, elle a enregistré une 15e place et une chute en première manche.

En même temps, c’est un peu la routine pour Moltzan. Elle se sait capable d’intégrer le top 5 ou même de monter sur le podium, mais elle est souvent freinée autour de la 10e place.

L’an dernier, elle a terminé au 12e rang du classement général ; 15e en slalom et 8e en slalom géant.

Et ce n’est pas par manque de volonté. Moltzan se croit toujours en pleine progression, à la veille de la trentaine, puis ses résultats le prouvent.

Toutefois, le niveau sur le circuit de la Coupe du monde est extrêmement relevé. D’autant plus que certaines skieuses sont abonnées au podium et que certaines jeunes athlètes prometteuses parviennent sporadiquement à réaliser des percées.

« C’est un sport très difficile dans lequel tout le monde est très talentueux, précise-t-elle. Parfois, quand tu crois avoir ce qu’il faut pour faire un top 5 et tu ne te classes pas dans le top 30, ça peut être très frustrant, parce qu’il n’y a personne à tenir responsable sauf toi. Et après il faut l’assimiler, y réfléchir, l’étudier. Il faut se relever et ce n’est pas facile. »

PHOTO LEONHARD FOEGER, ARCHIVES REUTERS

Paula Moltzan lors du slalom géant de Solden, en Autriche, à la fin d’octobre

Le bout du tunnel

Heureusement pour l’olympienne, elle a obtenu la confirmation, l’an dernier, qu’elle avait les outils nécessaires pour finalement aspirer aux grands honneurs.

Au slalom de Semmering, en décembre, Moltzan a grimpé sur la deuxième marche du podium dans le délire le plus complet. Elle était première et attendait de voir la dernière descente de sa coéquipière et amie Mikaela Shiffrin. La skieuse la plus prolifique de l’histoire l’a emporté, mais voyant son amie enfin grimper sur le podium, elle a lancé ses bâtons et sauté en pleurs dans les bras de Moltzan, projetant toute la lumière sur elle.

À ce moment, il s’agissait seulement de son troisième top 5 en carrière. Elle en a réussi trois autres depuis.

Et Moltzan revient sur cette journée du 29 décembre 2022 avec énormément d’humilité. « Je pense que c’est seulement une journée où j’ai pu aligner deux bonnes descentes alors que je savais que j’avais un bon ski. Je pense que c’était une combinaison d’un bon entraînement et d’une bonne approche. »

Au moins, elle a su ceci cette journée-là : « Si je peux faire deux descentes constantes, solides et à mon niveau, je peux sans aucun doute finir sur le podium. »

Toutefois, le ski alpin est un sport d’erreurs. Et surtout un sport de détails. « Il y aura toujours des erreurs et c’est un sport qui se joue sur des centièmes de seconde. Donc lorsqu’il y a des erreurs, mais que tu skies bien, je pense que tu peux quand même être en mesure de montrer de belles choses, même si le résultat n’est pas représentatif. »

Dans ces situations, le meilleur moyen d’évaluer sa progression est de se remettre sans cesse en question. « Rester dans une bonne mentalité est un bon indicateur pour mesurer comment se déroule ma saison. Donc pour retrouver mes repères, je me demande si j’aime encore ce sport et si la réponse est oui, ça signifie que je suis sur la bonne voie. »

Et si jamais elle en doute, sa famille sera là pour le lui rappeler.