L’équipe canadienne de patinage de vitesse courte piste aimerait sans doute pouvoir revivre la première journée de Coupe du monde de la saison. Devant les leurs, à Montréal, les athlètes canadiens ont été incapables de patiner à la hauteur de leur talent.

Une seule médaille. C’est tout ce que le Canada a été capable d’offrir à ses partisans réunis à l’aréna Maurice-Richard, samedi après-midi.

Et cette médaille, elle a été remportée durement par Steven Dubois en se classant deuxième à l’épreuve du 1000 mètres. En raison d’un accident de parcours vendredi, le triple médaillé olympique a dû passer par les courses de repêchage pour la première fois de sa carrière pour assurer sa place dans les rondes de médailles.

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Steven Dubois, Park Ji-won et Pietro Sighel sur le podium de l’épreuve du 1000 mètres

Au bout de sa cinquième course individuelle de la journée, Dubois était soulagé de ne pas avoir travaillé en vain : « C’est une journée qui était vraiment dure mentalement, et physiquement aussi. Et c’est la première journée de compétition, donc on ne sait jamais comment nos jambes vont répondre. »

Il était d’ailleurs heureux d’avoir tenu physiquement. « Mes jambes étaient toujours excellentes et je n’ai pas senti une baisse de forme physique », a-t-il précisé au terme de cette première journée de compétition.

Le Lavallois de 26 ans était même certain d’avoir plus d’essence dans le réservoir que Park Ji-won, vainqueur de l’épreuve. Mais le Sud-Coréen est extrêmement difficile à battre. Il a remporté le classement cumulatif la saison dernière.

Selon Dubois, son succès s’explique par sa capacité à ne laisser aucune marge de manœuvre à ses rivaux. « Ça me surprend chaque fois à quel point il est bon. C’est un peu comme des courses d’auto. S’il me laisse de la distance, je peux prendre de la vitesse pour le dépasser, mais il est excellent pour couvrir cette distance et ne pas en laisser à ses adversaires », explique-t-il en mimant les lois de l’aérodynamisme avec ses mains.

Journée à oublier pour les Canadiennes

Avec l’absence de Kim Boutin pour ce début de saison, les espoirs du Canada chez les femmes reposaient en grande partie sur les épaules de Courtney Sarault. Deuxième au classement général de la Coupe du monde la saison dernière, la patineuse de 23 ans a tous les outils pour connaître une grande saison. Et elle aurait sans doute aimé pouvoir le prouver à la maison.

Or, les choses ne se sont pas passées ainsi. En demi-finale du 1000 mètres, dans une course très hermétique, la Canadienne n’a pu faire mieux qu’une troisième place dans sa vague. La reléguant à la finale B, qu’elle a remportée 90 minutes plus tard.

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Courtney Sarault

Sans médaille au cou, Sarault a laissé entendre que ce résultat était bien en deçà de ses propres attentes : « Je dois retrouver mes sensations et apprendre de mes erreurs. Je ne dirais pas que c’est ma meilleure journée à vie […]. C’était frustrant, la manière dont j’ai patiné aujourd’hui. Surtout que je sentais que j’avais plus à offrir, je pense que je peux faire beaucoup mieux. »

Cette sixième place est d’autant plus décevante, en l’absence de trois des meilleures patineuses au monde. Sans la Néerlandaise Suzanne Schulting, la Sud-Coréenne Choi Min-jeong et la Québécoise Kim Boutin, le champ était presque libre. Ou, à tout le moins, le tableau était grand ouvert, pour employer un jargon tennistique.

Néanmoins, Sarault a été incapable d’en profiter. « Je sens que le niveau de tout le monde s’est amélioré, note-t-elle, pour justifier son classement. Je n’ai pas vraiment pris en considération qu’il y avait des absentes. Le calibre est très fort. »

À son retour à la compétition, Florence Brunelle a terminé juste derrière Sarault en finale B du 1000 mètres. Une septième position pour le moins réjouissante dans les circonstances. « Déjà, être dans un bon état d’esprit à l’international, c’est une bonne étape de franchie. J’étais contente de pouvoir rentrer dans une compétition et d’être prête à apprendre. Et ça s’est vraiment bien passé à ce niveau. »

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Florence Brunelle

Brunelle a semblé calme, en contrôle et à l’aise sur la glace. Sans déborder de témérité, elle a tenté des dépassements et elle a paru en pleine possession de ses moyens. À tout le moins, pour une athlète renouant avec la compétition après avoir passé 10 mois dans l’ombre.

« Je pense que je sais ce que je vaux et je sais que, physiquement, je suis là. Mais le patinage courte piste, c’est un sport très tactique, donc il s’agissait de réussir à être dans un bon état d’esprit pour être capable de combiner le côté plus mental, plus tactique. Et je pense que j’ai bien réussi à le faire, mais je suis surtout contente de l’approche que j’ai eue pour mes courses », a lancé la Trifluvienne.

Entre frustration et progrès

Le meilleur résultat féminin revient à Danaé Blais chez les Canadiennes.

Toutefois, malgré une sixième place au 1500 mètres, la patineuse de 24 ans était prise entre différentes émotions au terme de sa journée.

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Danaé Blais

« C’est certain qu’en allant dans la finale A, je visais un podium, a précisé calmement l’athlète de Châteauguay. [J’ai] souvent terminé quatrième et cinquième l’an dernier, et c’est frustrant, surtout que j’ai travaillé tellement fort l’été dernier. »

En finale, ses lames ont accroché celles d’une patineuse chinoise à un « moment critique ». Sans cet évènement, son destin aurait pu être différent et c’est sans doute pourquoi elle n’était pas complètement satisfaite de sa journée.

« La perfectionniste en moi est frustrée un peu. La rationnelle en moi est capable de prendre le dessus et de réaliser que ça reste un bon résultat et que ça fait partie du processus d’apprendre à gagner. »

La Canadienne d’adoption

Le nom de Hanne Desmet est sûrement très peu familier à bien des gens. Or, même si elle patine sous les couleurs belges, la gagnante de l’épreuve du 1500 mètres entretient un lien particulier avec Montréal et le Canada.

Au cours des cinq dernières années, la médaillée de bronze aux derniers Jeux olympiques s’entraînait avec l’équipe néerlandaise.

Mais depuis le mois d’août, elle s’est jointe au groupe d’entraînement de l’équipe canadienne.

« La fédération [néerlandaise] ne semblait plus vouloir qu’on s’entraîne avec elle, même si les athlètes le voulaient. Nous sommes allés aux États-Unis pour les premiers mois de l’été, mais nous sommes rapidement venus au Canada », a-t-elle laissé savoir.

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Hanne Desmet

En Belgique, son sport est loin d’être une priorité : « Nous n’avons pas d’aréna sécuritaire en Belgique, a-t-elle raconté, et on doit s’entraîner à 7 h du matin, quand on peut s’entraîner tout court. Vous ne pouvez pas être un patineur professionnel en Belgique. »

Mais curieusement, Desmet excelle dans son sport. Elle passe un peu sous le radar en raison du succès de Schulting et Boutin, notamment, mais la Belge est dotée d’un talent rare. Et avec deux bonnes saisons derrière la cravate, et compte tenu de l’absence de ses rivales, la saison 2023-2024 pourrait être déterminante.

« C’est une façon parfaite de lancer la saison. C’était une bonne course et je suis heureuse d’avoir gagné. […] Il y avait un peu de pression : c’est le temps de gagner quand ces grands noms n’y sont pas. Mais peu importe si elles avaient été ici, j’aurais quand même voulu gagner. »