Elles sont cinq étudiantes-athlètes qui ont en commun le désir de bâtir un avenir dans lequel les femmes pourront briller de tous leurs feux. Aujourd’hui, quatrième d’une série de cinq portraits, celui de Caroline Beauchamp.

Caroline Beauchamp a dû faire le deuil de son plus grand rêve. Ça lui a toutefois permis d’acquérir plus de liberté. En contrepartie, si sa vie a pris une nouvelle tangente, c’est pour pouvoir sauver celle d’autrui.

Beauchamp n’est pas une étudiante en médecine ordinaire. Ses parents ne sont pas issus du milieu médical. Elle n’a pas grandi en s’imaginant opérer des patients. En réalité, elle a atterri dans le milieu un peu par hasard.

« J’ai posé ma candidature à l’Université de Montréal dans trois trucs : médecine, pharmacie et architecture, mais je ne savais pas qu’il fallait que je mette un ordre. Alors, j’ai abouti en médecine, vu que c’était en haut de la liste. Je suis contente d’être en médecine, finalement, parce que j’aime ça », raconte-t-elle à la sortie d’un cours de neurologie, à l’accueil de la faculté de médecine au pavillon Roger-Gaudry.

Depuis toujours, sa vie est axée autour du ski. Condition sine qua non pour pouvoir faire du ski de compétition ? Bien faire également sur les bancs d’école. « Pour ma mère, si ça n’allait pas bien à l’école, j’arrêtais le ski. »

Beauchamp est arrivée à un point névralgique de sa vie. Celui où elle excelle dans deux domaines distincts. Où elle est admirée pour ses réussites scolaires et sportives. Elle refuse néanmoins de se prendre la tête.

PHOTO FOURNIE PAR CAROLINE BEAUCHAMP

Caroline Beauchamp

J’aime mieux que les gens me félicitent pour mon ski que mes études en médecine. Je ne suis pas plus hot que tout le monde parce que j’étudie en médecine.

Caroline Beauchamp

Petit à petit

Montréalaise d’origine, Beauchamp a grandi sur les pistes du club de ski d’Owl’s Head. Elle a ensuite fait partie de l’équipe régionale de l’Estrie. Elle y a excellé et a obtenu une place dans l’équipe du Québec, la meilleure de la province. L’une des meilleures filiales de l’équipe nationale canadienne.

Ses meilleurs moments en carrière, elle les a vécus au sein de l’équipe provinciale. La quitter pour prioriser ses études a été un grand deuil. C’était la fin d’une aventure, mais le début du reste de sa carrière. Et de sa vraie vie. La transition n’a toutefois pas été de tout repos.

« C’était un gros down, parce que c’était un peu une remise en question. Une crise d’identité un peu. »

Il était difficile pour elle d’assumer l’idée qu’elle serait étudiante d’abord et athlète ensuite, car le sport l’avait toujours définie.

Lorsqu’elle s’est faite à l’idée, elle a vu clair à nouveau.

PHOTO FOURNIE PAR CAROLINE BEAUCHAMP

Caroline Beauchamp

J’ai retrouvé l’amour du ski, parce que je n’avais plus de pression sur mes épaules. Avec l’équipe du Québec, j’avais l’impression qu’il fallait juste que je performe. Rendue à l’université, j’avais aussi autre chose dans ma vie et faire du ski était devenu un moyen de faire le vide dans ma tête.

Caroline Beauchamp

Son arrivée dans le réseau universitaire québécois a été fracassante. Elle en est seulement à sa deuxième année d’admissibilité et déjà elle est la capitaine des Carabins. En 11 compétitions cette saison, elle est montée cinq fois sur le podium, trois fois sur la plus haute marche.

Sa tenue lui a valu d’être nommée porte-drapeau de la délégation canadienne lors de l’Universiade d’hiver de Lake Placid, en janvier.

« Au début, je pensais que j’étais porte-drapeau juste pour l’équipe de ski, se souvient-elle. Mais quand j’ai su que c’était pour le Canada, j’étais vraiment fière et ça récompensait un peu tous les sacrifices que j’avais faits. »

Cette compétition réunit les meilleurs athlètes universitaires de 43 nations et Beauchamp y a brillé dans son uniforme bleu de pied en cap. « J’en parlais avec mes parents et je suis quasiment plus reconnue depuis que je suis une athlète universitaire. Ça fait du bien », fait-elle remarquer.

Revoir ses buts

Évidemment, en quittant l’équipe du Québec au profit du réseau universitaire, elle faisait une croix sur son rêve de skier un jour sous la bannière de l’équipe nationale. « C’était un rêve de petite fille de faire une Coupe du monde, mais disons que pour la quantité d’entraînement qu’on a, je sais que ce n’est pas réalisable. »

Pour y arriver, elle devrait mettre de côté ses études en médecine pendant plusieurs années, mais faire ce sacrifice ne l’intéresse pas.

Ç’a été un deuil, parce que dans la vie, quand tu commences quelque chose, tu le finis et là, c’est comme si je n’avais pas fini mon projet.

Caroline Beauchamp

Néanmoins, du haut de ses 22 ans, Beauchamp est déjà extrêmement lucide face à son parcours, ses expériences, ses joies, ses peines et ses écueils. Cette maturité est peut-être sa plus grande qualité, reconnaît-elle.

Sa plus grande fierté, quant à elle, est d’avoir trouvé un équilibre. « C’est la chose la plus difficile à faire, mais c’est important de se fixer des buts et de respecter son plan », précise-t-elle.

Son but, dorénavant, est d’avoir du plaisir sur les pentes. Et ça lui suffit. « Performer aussi, parce que je suis très compétitive, ajoute-t-elle, mais sinon, je suis rendue à l’étape de juste avoir du fun. »

Après tout, « il n’y a pas juste le ski dans la vie. Il y aura d’autres choses après ».

Et sa vie d’après, Beauchamp l’envisage avec excitation et fébrilité, parce qu’elle sait qu’elle va la réussir.