« Il n’y a aucune gêne à terminer derrière Tiger Woods lors d’un bon tournoi », a lancé Laurent Dubreuil après avoir décroché son titre de vice-champion du monde à l’épreuve du 500 mètres.

Dubreuil était le favori sur cette distance, vendredi, aux Championnats du monde de patinage de vitesse sur longue piste aux Pays-Bas. Or, le Québécois s’est fait voler la vedette par un jeune Américain dont la carrière vient de changer de manière assez radicale.

Le patineur de Lévis est presque intouchable sur 500 m, sa distance de prédilection. En 11 compétitions cette saison, il était monté sur le podium à six reprises, trois fois sur la plus haute marche.

« Avant aujourd’hui, on aurait pu penser que j’étais le meilleur au monde sur 500 m », relatait-il après la course.

Le champion du monde en titre a fait ce qu’il devait faire et il a patiné comme un champion du monde. Un seul patineur a été en mesure de faire mieux. Et il l’a fait en marquant l’histoire.

Dubreuil a explosé au départ avec un premier temps de référence de 9,52 s. Le reste de la course a été à la hauteur du meilleur patineur de la planète. Il a franchi la ligne d’arrivée en 34,46 s et s’est réjoui que la médaille d’or soit à sa portée.

C’était avant que le jeune prodige de 18 ans, Jordan Stolz, ne fasse la démonstration de tout son talent. L’Américain a été parfait. Un départ formidable, une aisance déconcertante et des sorties de virage à couper le souffle.

Stolz a devancé Dubreuil par 0,36 s, et pour la première fois en près de 40 ans, un patineur a remporté un titre mondial chez les juniors et chez les seniors lors de la même année.

Dubreuil a d’abord souligné la performance « presque extraterrestre » de son rival avant de le qualifier d’« inatteignable ». Tout au long de sa visioconférence, Dureuil n’a pas ménagé les qualificatifs dithyrambiques pour la vedette montante. Malgré tout, il est demeuré « très fier » de sa course.

Cinquième au classement de la Coupe du monde sur 500 m, le natif du Wisconsin avait gagné l’or sur 500 m, 1000 m et 1500 m aux Mondiaux juniors, en plus du titre cumulatif, il y a quelques semaines.

Sur la patinoire, Dubreuil ne pouvait que féliciter son jeune rival. Les deux se sont donné une accolade sentie, qui ressemblait aussi à une passation des pouvoirs.

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Jordan Stolz et Laurent Dubreuil

Je l’ai félicité pour sa course, et après, je lui ai dit que lorsque je vais avoir 60 ans, je vais dire à mes petits-enfants que j’ai patiné contre lui.

Laurent Dubreuil

Dubreuil reprendra le collier dès samedi pour l’épreuve du 1000 m. Un moment qu’il appréhende déjà.

« J’ai un rhume depuis cinq ou six jours, donc lors du dernier tour au 1000 m, ça risque de ne pas pardonner », a-t-il expliqué. Il a tenu à préciser que même en pleine forme, le résultat de la course de vendredi aurait été le même.

Les Canadiennes se couvrent d’or

Les Canadiennes étaient bien déçues de leur deuxième position à l’issue de la poursuite féminine. Jusqu’à ce que les Néerlandaises soient disqualifiées.

Isabelle Weidemann, Ivanie Blondin et Valérie Maltais avaient retiré leur combinaison jusqu’au niveau des hanches et leurs visages étaient longs au centre de la patinoire de Heerenveen alors qu’elles délaçaient leurs patins.

Le trio avait patiné de manière inspirée. Elles avaient réalisé une course sans faille. Les favorites au classement de la Coupe du monde n’avaient rien à se reprocher. Leur chrono de 2 min 54,58 s leur assurait une place sur le podium.

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Valérie Maltais, Isabelle Weidemann et Ivanie Blondin

Ne restaient que les deux autres meilleures nations de la discipline, les Pays-Bas et le Japon.

L’équipe formée de Joy Beune, Irene Schouten et Marijke Groenewoud a sans doute été portée par les 13 000 personnes réunies dans l’amphithéâtre. À la vitesse d’un train tout du long, les Néerlandaises ont franchi la ligne d’arrivée avec près de deux secondes d’avance sur les Canadiennes.

« Lorsqu’on a vu la performance des Hollandaises, on était vraiment sous le choc », a affirmé Maltais sur un vélo stationnaire après la course.

On était surprises et déçues, mais en même temps, qu’est-ce qu’on pouvait faire de mieux ?

Valérie Maltais

Cependant, quelques minutes plus tard, les officiels ont affiché le résultat final et les Canadiennes figuraient au sommet du tableau, tandis que les Néerlandaises étaient tout en bas, disqualifiées. L’une des patineuses ne portait pas ses bas anti-coupures, ce qui vaut une expulsion automatique et sans appel.

Malgré le titre mondial, la Québécoise est lucide : « On sait qu’on a été battues aujourd’hui. »

Pour le Canada, il s’agit d’une troisième médaille d’or en deux jours, après les victoires aux sprints masculins et féminins, jeudi. « C’est beaucoup d’émotions », a ajouté Maltais.

Les hommes en argent

Le Canada a failli causer une grosse surprise, quelques minutes plus tard.

Quatrièmes au classement de la Coupe du monde en poursuite, Connor Howe, Antoine Gélinas-Beaulieu et Hayden Mayeur ont impressionné en réalisant un chrono de 3 min 38,43 s. Ils ont été en avance du début à la fin. Ça aurait pu tourner au vinaigre dans le dernier virage, cependant, lorsque Gélinas-Beaulieu a failli perdre l’équilibre. Il a posé une main au sol, mais s’est relevé aussitôt, et le Canada a franchi la ligne d’arrivée avec la première position provisoire. Le Québécois avait le sourire accroché jusqu’aux oreilles et il applaudissait, de bonheur et de soulagement, en donnant ses derniers coups de patin.

L’avance du Canada a tenu jusqu’au tout dernier tour du duel entre les Pays-Bas et les États-Unis.

Les Néerlandais avaient accumulé un certain retard sur l’unifolié, mais ils ont rattrapé près d’une seconde dans le dernier ovale. Patrick Roest, Beau Snellink et Marcel Bosker, deuxièmes favoris, ont devancé les Canadiens par tout juste 0,16 s.

Les Canadiens y ont cru jusqu’à la fin, debout au centre de la patinoire en fixant le chronomètre, mais il y a fort à parier qu’ils seront satisfaits de ce titre de vice-champions du monde.