Une « épreuve secondaire », le parallèle par équipe mixte, comme le prétendait une dépêche de l’AFP ?

Certainement pas aux yeux de Valérie Grenier, qui y a remporté sa toute première médaille à des Championnats du monde séniors, tremplin idéal vers son véritable objectif à Méribel, le slalom géant de jeudi.

« C’est fou ! », ne cessait de s’exclamer la skieuse canadienne après avoir largement contribué au bronze de son équipe avec son amie Britt Richardson et les frères Jeffrey et Erik Read, mardi, sous le soleil printanier des 3 Vallées.

Une surprise ? « J’imagine que c’était un peu inattendu, a opiné Grenier. Je n’avais encore jamais fait le parallèle en slalom géant. C’était une décision de dernière minute puisque Britt et moi étions les seules filles ici en ce moment. On le faisait surtout pour l’équipe, on avait très hâte, mais vraiment aucune attente. »

En petite finale face à l’Autriche, la skieuse du club de Mont-Tremblant a joué un rôle déterminant dans la victoire de son quatuor en disposant par plus d’une demi-seconde de Julia Scheib.

Accusant un retard de 1-2 avant de s’élancer, le vétéran Erik Read a propulsé le Canada sur le podium en devançant Stefan Brennsteiner par 15 centièmes dans l’ultime affrontement.

L’égalité de 2-2 a été rompue par le combiné des temps des deux vainqueurs de leur manche respective, Grenier et Read.

De voir qu’on a été capables de skier aussi bien et d’avoir une médaille, c’est fou. On est vraiment fiers l’un de l’autre. C’est le fun de vivre ça en équipe. Ça ne m’arrive pas souvent.

Valérie Grenier

Sur un tracé plus serré qu’un géant individuel, le Canada a successivement vaincu la Slovénie (4-0) et la Suisse de Wendy Holdener (2-2, temps cumulatif), médaillée d’or olympique en 2018, pour atteindre la ronde demi-finale.

Grenier et les siens se sont alors inclinés 1-3 devant les États-Unis, futurs médaillés d’or contre la Norvège, tenante du titre. La Franco-Ontarienne s’en voulait d’avoir échappé d’entrée de jeu son duel avec Paula Moltzan, sa seule « défaite » de la journée, par cinq petits centièmes.

« Ç’a été dur de perdre par si peu. Ça m’a frustrée. J’ai fait plusieurs erreurs et je n’étais pas fière de moi. Mais on a skié vraiment vite. Ç’a été le fun d’y aller l’une contre l’autre parce qu’on se connaît très bien. On se donnait et c’était du très bon ski. »

Justement, Grenier n’avait pas le sentiment de gagner une médaille au rabais même si l’Autriche, championne olympique en titre et puissance historique du ski alpin, n’avait pas délégué ses meilleurs éléments, à l’image de presque tous les prétendants potentiels.

« Je n’y ai pas trop pensé. Les dernières équipes étaient pas mal les meilleures. Je serais prête à dire que Paula et Thea [Louise Stjernesund, de la Norvège] font partie des meilleures en parallèle. Même si certains athlètes d’autres pays ne l’ont pas fait, c’était une bonne bataille et du très haut niveau. C’était une question de priorités. »

À titre d’exemple, l’Américaine Mikaela Shiffrin, médaillée d’argent au super-G la semaine dernière, s’est réservée pour le géant (jeudi) et le slalom (samedi). Marta Bassino, surprenante gagnante du super-G, participera pour sa part au parallèle individuel mercredi. L’Italienne a d’ailleurs enregistré le quatrième temps des qualifications dominées par la fringante Stjernesund, mardi après-midi.

« Bizarre, mais très cool ! »

En finale, Moltzan, Tommy Ford, Nina O’Brien et River Radamus ont eu le meilleur 3-1 sur Kristin Lysdahl, Alexander Steen Olsen, Stjernesund et Timon Haugan. Les États-Unis remportent une première médaille dans cette discipline aux Mondiaux.

Le Canada récolte pour sa part un deuxième podium à cette épreuve disputée aux Championnats du monde depuis 2013. À Beaver Creek, en 2015, Erik Read, fils de Ken, légendaire Crazy Canuck, avait aussi gagné l’argent à titre de substitut, tout comme la Québécoise Marie-Pier Préfontaine.

Triple médaillée aux Mondiaux juniors, dont l’or en descente en 2016, et auteure d’un premier podium et d’une première victoire en Coupe du monde lors du slalom géant de Kranjska Gora, le 7 janvier, Grenier ne savait trop où ranger ce moment unique dans sa carrière.

Dans ma tête, ce n’est pas comparable à une médaille [individuelle] en géant, disons. C’est différent, mais ça me rend vraiment fière. Le fait que je vais avoir une médaille, on dirait que c’est fou. C’est un rêve qui se réalise, c’est sûr.

Valérie Grenier

Heureuse de partager son bonheur avec Richardson, l’athlète de 26 ans a apprécié sa découverte de cette épreuve collective.

« J’aime le concept même si je ne suis pas habituée à skier avec quelqu’un à côté de moi. C’est bizarre, vraiment différent, mais très cool ! »

Un sommet depuis 1968

Privé de son directeur haute performance Phil McNichol, dont le départ inattendu a eu lieu vendredi, Canada Alpin revendique déjà trois médailles à Méribel/Courchevel. Ce total représente un sommet depuis 1968 et les Jeux olympiques de Grenoble, qui faisaient alors office de Mondiaux, et la grande époque de Nancy Greene. Quatre compétitions figuraient au programme, contre 13 aujourd’hui.

Jack Crawford, couronné en super-G, et Cameron Alexander, médaillé de bronze en descente, ont causé la surprise la semaine dernière en Savoie.

C’est tellement encourageant. Les gars m’ont inspirée récemment. Ça nous procure tous un genre d’élan et d’espoir. On sait qu’on skie tous vite et bien. On veut continuer comme ça.

Valérie Grenier

Après un congé de ski et une remise de médaille mercredi soir, Grenier s’attaquera donc le lendemain au géant, dont elle occupe le neuvième rang au classement de la Coupe du monde.

« J’ai réussi de meilleurs virages que d’autres aujourd’hui, mais j’étais contente de mon approche et ça me donne de la confiance pour le slalom géant. »