À 18 ans, le skieur acrobatique Édouard Therriault fait preuve d’une sagesse qui impressionnerait même ­­le père Fouras. Alors qu’il vient d’amorcer une saison importante de sa jeune carrière, le Lorrain ne se pose pas de questions et aborde avec humilité chaque expérience qui se présente à lui.

Édouard Therriault s’est fait un nom dans le milieu du ski international la saison dernière en montant sur le podium dans le cadre de Championnats du monde pour la première fois de sa prometteuse carrière. À sa propre surprise, il s’est emparé de la deuxième place au grand saut (big air) à Aspen, au Colorado, en mars.

Joint au téléphone par La Presse, mardi, le jeune homme rentrait tout juste d’une fin de semaine en Autriche, où il a pris part à sa première épreuve de la saison en Coupe du monde. Il a opté pour une manœuvre risquée, mais a raté son atterrissage et a terminé au 50rang en descente acrobatique (slopestyle).

Quand on lui demande comment s’est déroulée sa fin de semaine, il répond néanmoins sans hésitation : « Ça s’est super bien passé ! On a eu un très beau voyage, de la belle météo. » Calme et posé, Therriault rappelle que cette épreuve n’en est qu’« une parmi tant d’autres ».

« Je n’étais aucunement fâché ou déçu », dit-il.

« Ce n’est pas le classement qui m’importe. C’est vraiment comment j’ai agi face à cette compétition-là, comment je me suis senti. C’était super bien. Mon énergie était là, mes trucs étaient là, le moral aussi. J’étais super content. Il y avait beaucoup de positif. »

Avec ses résultats de la saison passée ainsi que l’arrivée des Jeux olympiques et de ses premiers X Games, Édouard Therriault aurait de bonnes raisons de ressentir une certaine pression. Mais ce n’est pas le cas. Pas du tout, même.

PHOTO TIRÉE DU SITE WEB D’ÉDOUARD THERRIAULT

Édouard Therriault

Je ne me pose pas tant de questions. Je veux juste avoir du fun et le reste va venir. Mes attentes, c’est de bien skier.

Édouard Therriault

« Il y a beaucoup d’athlètes qui, une fois qu’ils font un podium, se mettent cette pression de devoir performer. Quand ils ne font pas bien, ils croient que c’est pas bon. Moi, je pense qu’il faut perdre. Il faut avoir des mauvais résultats de temps en temps. Tu ne peux pas toujours être le premier. »

Une sagesse olympienne, disait-on.

Se ressourcer pour mieux performer

L’été dernier, Édouard Therriault s’est accordé du repos et du temps pour laisser aller sa créativité autrement qu’en faisant des acrobaties sur ses skis. Il en a profité pour faire de la planche à roulettes, de la peinture, du camping et pour voyager. Il avait besoin de ça pour retrouver le goût et l’énergie de retourner sur les pistes cette saison.

« Des fois, toujours rester dans la même routine de ski, ça peut devenir plate, explique-t-il. Veux, veux pas, c’est comme mettre tous ses œufs dans le même panier. »

Moi, j’aime bien diversifier mes choses, donc je suis allé me ressourcer dans d’autres sphères de ma vie. Ça fait en sorte que je suis vraiment plus prêt pour cette saison-ci et pour attaquer mon travail.

Édouard Therriault

Celui qui est surnommé Edjoy en raison de sa joie de vivre a cependant passé beaucoup de temps en gymnase, question de garder sa forme physique. Naturellement, il n’a pas skié autant que certains de ses adversaires, qui profitent de la neige à longueur d’année leur coin de pays. Mais il pense pouvoir rattraper le temps perdu.

« Ça ne me dérange pas. C’est une année qui est longue, donc même si je dois les rattraper, je sais que je vais bien le faire et j’ai encore décembre pour m’entraîner. Sérieusement, ça va être une très belle saison. »

Le jeune skieur a aussi profité de la période estivale pour prendre un pas de recul, s’assurer qu’il est toujours à l’aise et heureux dans ce qu’il fait.

« C’est bien de faire un pas en arrière parfois juste pour regarder la situation, analyser tout ce qui se passe. Ça m’a juste montré que c’est génial, tout ce qui se passe, de pouvoir voyager autant, de faire du ski dans toutes les belles places du monde, ce que peu de gens peuvent s’offrir. »

Grosse saison

Édouard Therriault compte participer au plus d’épreuves possible en Coupe du monde. Avec sa deuxième place à Aspen et sa neuvième place à l’épreuve de Kreischberg obtenues l’année dernière, il est théoriquement en bonne position pour espérer participer aux Jeux olympiques de Pékin, en février. Dans l’idéal, il lui faudrait un autre résultat dans les 5 ou 10 premiers d’ici la fin de janvier.

« Je pense que c’est totalement faisable, dit-il. On est encore tôt dans la saison, je n’ai pas beaucoup skié à date, donc je ne m’attends pas à plus de mes résultats. […] Peu à peu, je vais faire plus de millage et ça va faire en sorte que je sois mieux en ski. »

Et puis, il ne faut pas oublier que Therriault n’a que 18 ans. Lui-même préfère ne pas se comparer à ses coéquipiers et vivre ses propres expériences. Quand il pense aux Jeux olympiques, c’est surtout l’idée de documenter son expérience qui l’emballe. Grand artiste dans l’âme, il aimerait profiter de son passage à Pékin pour produire un deuxième film – son premier, diffusé dans le cadre du festival iF3 cette année, est intitulé Edjoy the Movie.

« Oui, je vais là-bas pour performer, mais c’est toute l’expérience autour. Je me mets aussi des contraintes de plaisir dans ça pour que ce soit une expérience le fun et qui va m’ouvrir d’autres portes pour d’autres choses qui vont être encore plus le fun. »