Alex Galchenyuk a probablement disputé son dernier match dans la Ligue nationale de hockey, à 29 ans seulement. Il poursuivra sa carrière en Russie, avec le SKA St. Petersburg.

Sa dernière frasque, en juillet, consistant à menacer violemment des policiers, sous l’influence de l’alcool, après avoir fui les lieux d’un accident, l’a chassé de la LNH.

Galchenyuk a signé un contrat de deux ans avec cette équipe de la KHL il y a quelques jours, après avoir promis d’adhérer au programme d’aide de la Ligue nationale de hockey.

Cet incident regrettable, au cours duquel il a menacé d’appeler en Russie pour faire tuer le policier et arracher le foie de sa femme et de sa fille, nous permet d’expliquer davantage pourquoi il a changé d’équipe sept fois en quatre ans et amassé 41 points à ses 164 dernières rencontres, après en avoir obtenu 313 à ses 490 premières.

En 2016, Galchenyuk, alors âgé de seulement 21 ans, avait reçu un coup en plein visage chez lui à l’aube par sa copine effeuilleuse possessive de l’époque, après avoir passé la nuit à fêter dans un bar. Il n’aurait pas été le premier jeune joueur à passer une nuit blanche, mais nous avions là un indice qu’il ne menait pas une vie de moine non plus.

Troisième choix au total en 2012, Alex Galchenyuk était pressenti pour devenir ce gros centre tant espéré chez le Canadien. « On ne bâtit pas d’équipe solide sans de bons joueurs de centre, avait déclaré le directeur général Marc Bergevin le jour du repêchage. Pour nous, c’était le choix logique. C’est un gros centre avec du talent, une vision du jeu et du caractère. Ce genre de joueur est quasiment impossible à aller chercher. Je l’ai vu dans son regard : le hockey est la chose la plus importante pour Alexander et rien ne va l’empêcher de devenir un joueur. »

Il s’agissait d’une cuvée faible au sommet, même si les spécialistes ne tarissaient pas d’éloges à l’endroit de l’éventuel premier choix au total, Nail Yakupov.

Après avoir vu le défenseur Ryan Murray passer aux Blue Jackets de Columbus, détenteurs du deuxième choix, Trevor Timmins et son équipe de recruteur ont pris le risque de choisir Galchenyuk même s’il avait disputé seulement huit matchs à son année de repêchage, victime d’une grave blessure au genou.

Le jeune homme avait amassé 83 points en seulement 68 matchs la saison précédente à seulement 17 ans avec le Sting de Sarnia, après tout.

L’arrivée de Galchenyuk dans le giron de l’équipe, en janvier 2013, après une moitié de saison gâchée par le lockout, a constitué une bouffée d’air frais dans l’entourage du Canadien. Il devenait le premier joueur depuis Petr Svoboda en 1984 à mériter un poste avec le Canadien à seulement 18 ans. Il n’a pas déçu malgré son jeune âge en amassant 27 points en 48 matchs, soit 46 points au prorata d’une saison complète.

Marc Bergevin et Michel Therrien, à la première année de leur règne, avaient fait une place à un autre jeune, Brendan Gallagher, 28 points, dont 15 buts, en 44 matchs.

Il y avait un esprit de fraîcheur à Montréal, mais aussi des performances efficaces et étonnantes : le Canadien avait terminé au premier rang de sa section et au quatrième rang du classement général en 2012-2013.

Après des performances en dents de scie lors des deux saisons suivantes, généralement à l’aile, puisqu’il n’avait ni la compréhension du jeu, ni la hardiesse en zone défensive pour mériter la confiance de Michel Therrien au centre, Galchenyuk a explosé offensivement à sa quatrième année avec 30 buts, dont 56 points.

Il a produit en moyenne 55 points par saison au prorata d’une année complète lors des deux saisons suivantes, entre 2016 et 2018, mais on avait déjà cessé de rêver : il n’allait pas devenir le centre espéré.

Galchenyuk constituait d’ailleurs la grande déception du règne de Marc Bergevin aux yeux de l’ancien directeur général Serge Savard.

« Avec tout le talent qu’il possède, je me demande ce qu’il faut faire pour le relancer, confiait-il dans une grande entrevue à La Presse en avril 2017. Un gars de même, s’il dominait comme il doit dominer, ça ferait une grande différence. Comme Guy Lafleur avec nous autres, à l’époque. Guy était le meilleur joueur de la ligue et il se présentait chaque soir. Il était là dans les septièmes matchs contre Boston. C’était vrai pour Maurice Richard, c’était vrai pour Jean Béliveau. C’est fâchant de voir un gars talentueux comme lui ne pas jouer à la hauteur de son talent. Il nous a montré ce qu’il est capable de faire. Est-ce qu’il va se contenter de ça dans sa carrière ? »

En juin 2017 d’ailleurs, devant l’incapacité de Galchenyuk à s’établir à cette position, Bergevin a sacrifié son meilleur espoir en défense, Mikhail Sergachev, repêché neuvième au total un an plus tôt, contre Jonathan Drouin, dans l’espoir de faire de celui-ci le prochain centre numéro un.

Puis un an plus tard, Galchenyuk était échangé aux Coyotes de l’Arizona en retour de Max Domi, dans une deuxième tentative de dénicher le centre rêvé. Bergevin l’aura échangé à temps.

Les Coyotes, qui croyaient pouvoir faire de Galchenyuk un centre, ont vite déchanté. Il a été échangé aux Penguins à peine un an plus tard pour Phil Kessel. Le Canadien, lui, aura récupéré par la suite un ailier de puissance, Josh Anderson, pour Domi.

Malgré tout, Galchenyuk demeurait le meilleur compteur de sa cuvée après Filip Forsberg six ans après ce repêchage de 2012.

Onze ans plus tard, les résultats sont incontestables. Galchenyuk s’exile en Russie avec un sentiment d’inachevé. La cuvée 2012 a fourni des gardiens extraordinaires, Andrei Vasilevskiy, Connor Hellebuyck ; des défenseurs de premier plan, Morgan Rielly, Jacob Trouba, Hampus Lindholm, Jaccob Slavin et des attaquants, Forsberg, Tomas Hertl, Teuvo Teravainen.

Il y a deux constats à tirer de cet échec. Dans un premier temps, le Canadien et son groupe de dépisteurs ont erré en croyant que ce joueur, doté d’habiletés individuelles exceptionnelles, il faut le souligner, avait la vision du jeu, le sens de l’anticipation et l’abnégation nécessaires pour jouer au centre.

Par ailleurs, il y a des cas où il faut éviter de jeter tout le blâme sur une organisation pour la faillite d’un espoir de premier plan. Le joueur a aussi sa part de responsabilité. Galchenyuk avait ses démons. Dans le meilleur des cas, il aurait pu devenir un ailier de premier plan.

Et si Morgan Rielly avait été choisi par le CH ?

PHOTO JEAN-YVES AHERN, ARCHIVES USA TODAY SPORTS

Morgan Rielly

Dans une longue interview accordée à La Presse, en février 2020, Marc Bergevin n’avait pas caché sa préférence pour le défenseur Morgan Rielly, à l’aube du repêchage de 2012.

« Oui, je l’aimais beaucoup. Mais je venais d’être embauché le 2 mai, et mon nouveau staff aimait beaucoup Alex Galchenyuk. J’étais avec Chicago cette saison-là, et on repêchait plus tard. On ne perdait pas notre temps avec Galchenyuk, qui allait probablement être choisi parmi les premiers ; en plus, il n’avait presque pas joué cet hiver-là. Je regardais notre situation au centre, on avait [David] Desharnais, [Tomas] Plekanec, et Chucky était considéré comme un centre. Tu entres en poste, tu n’as pas vu jouer Galchenyuk et tu vas les forcer à prendre un autre joueur ? Ça commence bien une relation. J’ai laissé choisir. En plus, j’étais d’accord, je savais qu’on avait besoin de joueurs de centre. Mais j’aimais beaucoup Morgan Rielly. »

Rielly a été choisi au cinquième rang par les Maple Leafs. Il n’est pas irréprochable dans sa zone, mais il demeure le défenseur numéro un de l’équipe, capable d’amasser une cinquantaine de points par saison, et entre 68 et 72 dans de bonnes années.

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