Un vieil adage du sport veut que, parfois, les meilleurs échanges soient ceux qu’on ne fait pas. Ce n’est toutefois pas la phrase motivationnelle qui amorcera le livre sur la saison 2022-2023 des Panthers.

Les Floridiens ont poursuivi leur printemps magique, mercredi soir, en disposant des Hurricanes de la Caroline par la marque de 4-3. Ils concluent ainsi un balayage aussi impressionnant qu’invraisemblable contre une équipe perçue jusqu’à la semaine dernière comme une sérieuse prétendante à la Coupe Stanley.

Sans aucune espèce de surprise à ce point-ci, c’est Matthew Tkachuk qui a envoyé son équipe en finale. Le fils de Keith a rendu papa heureux en marquant sous ses yeux le but qui a éliminé les Hurricanes avec cinq secondes à écouler au cadran. C’était, rien que ça, son troisième but gagnant de la série. Et il a obtenu une mention d’aide sur celui de Sam Reinhart lors du troisième match. S’il existait une traduction française à l’épithète « clutch », c’est à ce point-ci du texte qu’on la retrouverait.

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La résurrection de Sergei Bobrovsky, au cours des dernières semaines, a placé son nom au cœur de la discussion pour la remise du trophée Conn-Smythe, remis au joueur par excellence des séries éliminatoires. Le gardien, comprenons-nous bien, mérite tous les compliments qu’il reçoit ces jours-ci. Il conclut la série avec un taux d’efficacité délirant de ,966. Le cerveau d’un chroniqueur vedette de La Presse pourrait bien exploser.

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Sergei Bobrovsky

Or, Matthew Tkachuk semble dans une classe à part. Il est simplement en état de grâce. Sa saison phénoménale a tiré les Panthers jusqu’en séries éliminatoires, et il est déjà nommé pour le trophée Hart. Voilà que sa performance en séries pourrait valoir à son équipe une Coupe Stanley.

Coup de circuit

On évoquait, en ouverture de cette pièce d’anthologie journalistique, les meilleurs échanges que l’on fait, ou pas. Brad Treliving, ex-directeur général des Flames de Calgary, doit regarder les matchs avec une boule dans la gorge ces jours-ci. Acculé au pied du mur par un joueur vedette qui avait déjà annoncé qu’il ne souhaitait pas s’engager à long terme avec les Flames et qui lui a fourni une liste de destinations très limitée, Treliving a, on s’en souvient, échangé Tkachuk aux Panthers en retour de Jonathan Huberdeau, de MacKenzie Weegar et d’un choix de premier tour.

La saison des Flames a été, on le sait, catastrophique. Ils ont toutefois les atouts pour redevenir une puissance de l’association de l’Ouest dès l’an prochain.

Les Panthers, toutefois, ont frappé le coup de circuit de tous les coups de circuit, qui a par ailleurs conclu une récolte faste du DG Bill Zito. Au cours des deux dernières années, il a en outre acquis Sam Bennett, Sam Reinhart et Brandon Montour, tous par le truchement de transactions. On pourrait aussi ajouter à la liste Carter Verhaeghe, embauché quelques mois auparavant. Tkachuk et eux représentent cinq des six meilleurs marqueurs des Panthers au cours des présentes séries, le sixième étant Aleksander Barkov.

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Carter Verhaeghe (23)

La feuille de route de Zito n’est évidemment pas parfaite – Ben Chiarot, quelqu’un ? –, mais force est de constater qu’il a eu la main heureuse.

Taillé sur mesure pour le jeu des séries, Bennett, un autre ancien des Flames, tiens, a été superbe mercredi. Reinhart a passé presque cinq minutes sur la glace en désavantage numérique et a contribué à tenir les Hurricanes au silence. Verhaeghe était au centre de l’action lorsque son partenaire de trio Anthony Duclair a ouvert la marque dès la première minute du match. Montour a continué d’avaler les minutes dans les trois phases du jeu.

Peu importe qui des Golden Knights de Vegas ou des Stars de Dallas rejoindra les Panthers en finale, on sait qu’il ne se trouvera plus personne, mais alors là personne, pour douter des hommes de Paul Maurice. Ce sera même très difficile de croire que l’équipe sans Matthew Tkachuk pourra gagner.

Chute

Ce triomphe des Panthers, c’est évidemment la chute des Hurricanes. Et elle est brutale.

Après une récolte de 113 points en saison, et vu la qualité des joueurs dans la formation, n’importe quelle conclusion autre qu’une Coupe Stanley aurait représenté une déception. Mais un balayage, même en finale d’association, est certainement un cauchemar. À plus forte raison lorsqu’il s’agit du deuxième en cinq ans au troisième tour.

Rod Brind’Amour rejoint ainsi ses collègues Jim Montgomery et Sheldon Keefe dans la confrérie réduite des entraîneurs-chefs qui passeront un long été tourmenté après avoir goûté à la médecine des Panthers. Dans le cas des Hurricanes, la faille n’est pas difficile à déterminer. Six petits buts marqués en quatre rencontres. Bien sûr, les exploits de Bobrovsky. Mais une telle anémie offensive demeure inacceptable.

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Rod Brind’Amour

Imaginez : les gardiens Antti Raanta et Frederik Andersen ont conservé un taux d’efficacité de ,921 et une moyenne de buts accordés inférieure à deux buts par tranche de 60 minutes. Ces chiffres, dans la très vaste majorité des scénarios, devraient se traduire par une fiche gagnante. On connaît la fin de l’histoire.

Inutile de dresser la liste des coupables : tous les joueurs se sont éteints. Tous. Ç’avait été un problème au premier tour contre les Islanders de New York, mais on avait assisté à une explosion face aux Devils du New Jersey au tour suivant. La panne, cette fois, a été totale. Et fatale.

D’inévitables questions devront être éclaircies au cours de l’été qui s’approche. Au hasard : est-ce que Jesperi Kotkaniemi peut occuper un poste de deuxième centre dans une équipe de tête ? Un collègue a souligné, pendant la rencontre de mercredi, que le Finlandais venait d’être éclipsé par un autre Tkachuk. Ce n’est pas bien gentil, et nous condamnons fermement cette remarque gratuite et mesquine.

Mais c’est quand même vrai.

En hausse : Sam Bennett

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Sam Bennett

Brutale, quoique légale, sa mise en échec contre Jaccob Slavin, en début de première période, a donné le ton au match. Il a conclu la soirée avec 6 tirs et 4 mises en échec. Dominant.

En baisse : Jesperi Kotkaniemi

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Jesperi Kotkaniemi (82)

Il a disputé un grand total de 54 secondes à cinq contre cinq en troisième période, et zéro seconde tout court dans les dernières 9 min 56 s. Pour le deuxième match de suite, il a été l’attaquant (en santé) le moins utilisé de son club. Le message est clair.

Le chiffre du match : 0

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Sebastian Aho

C’est le total des buts de Sebastian Aho et de Brent Burns dans cette série. Ils en avaient marqué 36 et 18, respectivement, pendant la saison.