Le 30 septembre dernier, après une semaine de camp d’entraînement, le Canadien annonçait sa première vague de compressions. Des 23 joueurs retranchés, plusieurs ont fait la pluie et le beau temps avec les Lions de Trois-Rivières, dans l’ECHL, cette saison. Aucun n’a été vu dans la LNH.

Un des 23 s’y rendra, finalement : Joël Teasdale, rappelé mardi.

Pour Stéphane Dubé, préparateur physique qui connaît Teasdale depuis une dizaine d’années, c’était une preuve additionnelle de la détermination de son client.

« Il faut que tu te mettes dans le contexte. Au jour 1 du camp, il s’est fait tasser. Les gars le savent, ils voient les groupes au début et il n’était pas dans le groupe principal. C’est sûr que tu ne joueras pas un match hors-concours », rappelle Dubé, au bout du fil.

Teasdale n’a effectivement pas disputé un seul match préparatoire avant d’être retranché. Et il n’avait pas fini d’en baver, car c’est de la passerelle qu’il a assisté aux quatre premiers matchs du Rocket de Laval.

« Il a montré tellement de caractère, poursuit Dubé. Tu arrives au camp, tu n’as pas une sniff, tu te dis que l’organisation n’a pas confiance en toi. Tu arrives dans les mineures, tu ne joues pas.

« On s’était rencontrés et je lui avais dit : “Ça peut tourner vite.” Et comme de fait, quand ils l’ont rentré, il a saisi sa chance et il a travaillé super fort. De la façon que ça a commencé, c’était un encore plus gros défi que ses deux blessures au genou. Tu arrives et tu ne fais pas partie des plans, des jeunes passent devant toi. »

Le principal intéressé le confirme : l’automne n’a pas été rose. « Ça a vraiment été dur, ça ne m’était jamais arrivé d’être laissé de côté quand j’étais en santé. Donc, j’ai dû travailler sur moi. Mais c’est mon caractère. Je ressors toujours plus fort et j’ai profité de ma chance quand je l’ai eue. »

Deux fois le même genou

Ce caractère a été testé deux fois plutôt qu’une. Teasdale a été victime d’une première déchirure au ligament antérieur croisé du genou droit en août 2019. Sa saison 2019-2020 était donc à l’eau, et la suivante n’a commencé qu’en février 2021 en raison de la pandémie.

Cette même pandémie l’avait d’ailleurs incité à se monter un centre d’entraînement de fortune, dans sa cour arrière, situation que La Presse avait documentée.

Il avait donc été deux ans sans jouer, et son retour n’avait duré que deux mois. Le 23 avril 2021, nouvelle déchirure. Nouvelle opération.

C’est pourquoi tout le monde se réjouit de voir le jeune homme de 24 ans obtenir une première chance dans la LNH. À commencer par Daniel Jacob, qui a dirigé Teasdale en tant qu’adjoint à Joël Bouchard autant avec l’Armada qu’avec le Rocket.

« C’est surtout son histoire, estime Jacob. Il est rentré [dans le junior] à 16 ans et il avait un problème de poids. Il a été un mois sans jouer jusqu’à ce qu’il se mette en shape. Il ne l’a pas eu facile avec ses genoux. Plusieurs auraient mis la clé dans la porte. Ensuite, il s’est entraîné dans sa cour. Il a donné des coups de pied dans plusieurs portes avant d’en ouvrir une. »

« Avec ses blessures, on ne se le cachera pas, il ne l’a pas eu facile », ajoute Alexandre Alain, ancien coéquipier de Teasdale à Boisbriand et à Laval. « C’est un gamer qui veut performer. Je ne suis pas surpris, mais vraiment content, parce qu’il a tellement travaillé fort. »

Une étiquette à chasser

Teasdale est également un travaillant dans son identité de joueur. « Ce n’est pas le plus gros, pas le plus grand, mais tu arrives sur le bord de la bande et tu sais qu’il ne te laissera pas gagner facilement », résume Alain.

Le problème, c’est que son identité semblait déjà définie pour plusieurs. Avant même ses blessures, Teasdale devait travailler sur son coup de patin, et ce genre d’étiquette est parfois dur à arracher.

« Ce n’est pas un patineur naturel, super parfait, décrit Jacob. Mais ce n’est pas parce qu’il n’essaie pas de s’améliorer. On le voit. Et il fait autre chose pour compenser, donc il amène quand même de l’eau au moulin. C’est un très bon complément pour d’autres joueurs, par son travail en espace restreint. Il n’est pas spectaculaire, mais tous les coachs l’aiment, parce qu’il peut jouer dans toutes les situations, il comprend vite et il exécute bien. »

« Il n’est pas tata. Il entendait tous les gens dire : “Deuxième opération, il n’est pas super vite, est-ce qu’il va revenir à 100 % ?” Mais mentalement, il est fort, il a été capable de bloquer ça », ajoute Stéphane Dubé.

Teasdale n’essaie pas d’embellir son histoire ; il s’est bel et bien questionné sur son avenir. « C’est sûr qu’à ma deuxième blessure en moins de trois ans, j’y ai peut-être pensé un peu. Mais mon caractère est une de mes forces. Je sors plus fort de ces épreuves-là.

« J’ai perdu deux ans de développement. Mais j’ai enlevé ces deux années-là et dans ma tête, c’est comme si j’avais 21 ans. Je suis ici pour me battre, je veux jouer pour le Canadien et je vais essayer de tasser du monde. »

Lisez « Un “bonbon” pour Joël Teasdale »