Le Canadien n’échappe pas à la controverse entourant les soirées de la Fierté dans la LNH.

À la veille de cet évènement soulignant la solidarité de l’organisation avec la communauté LGBTQ+, l’entraîneur-chef Martin St-Louis a laissé planer le mystère sur les intentions de ses joueurs. Il attendra à jeudi matin, à quelques heures de la célébration, pour répondre aux « questions difficiles » à ce sujet.

L’épine dans le pied de plusieurs équipes, depuis le début de la présente saison, a été le port d’un chandail multicolore pendant la période d’échauffement d’avant-match. Ces maillots spécialement conçus pour l’évènement peuvent ensuite être vendus à l’encan afin de remettre des fonds à des œuvres caritatives.

Le Canadien a prévenu depuis longtemps qu’un chandail arc-en-ciel serait porté par ses joueurs. On ne saura vraisemblablement que jeudi matin, après l’entraînement précédant l’affrontement entre le Tricolore et les Capitals de Washington, si des membres du groupe sortiront du rang.

Sur le plan personnel, St-Louis a été clair. « Tout le monde est bienvenu » dans son vestiaire, sans égard à son origine ethnique, à sa religion ou même à son identité sexuelle ou de genre.

Le Canadien de Montréal prend cette journée très au sérieux.

Martin St-Louis

Des « discussions » ont eu lieu à l’interne. Est-il possible qu’un ou des joueurs refusent de porter un chandail multicolore ? « Je ne sais pas, a rétorqué l’entraîneur-chef. Je vais répondre demain [jeudi] quand on aura toute l’information. Je serai préparé à répondre aux questions difficiles. On en reparlera demain. »

Cette dernière affirmation ouvre la voie à différentes interprétations. Si une tempête se prépare, on préfère visiblement l’affronter le jour même de l’évènement.

Après qu’Ivan Provorov eut refusé de porter le chandail prévu par les Flyers de Philadelphie, en janvier dernier, les incidents se sont multipliés. Ilya Lyubushkin (Buffalo), Andrei Kuzmenko (Vancouver), Ilya Samsonov (Toronto), James Reimer (San Jose) ainsi que les frères Eric et Marc Staal (Floride) ont tous imité Provorov. Certains ont invoqué des motifs religieux. D’autres, plus spécifiquement les joueurs d’origine russe, ont dit craindre pour leur sécurité.

Une loi promulguée en Russie prévoit en effet l’interdiction de toute « propagande » sur les « relations sexuelles non traditionnelles ». Des joueurs originaires de ce pays disent se sentir menacés. Cela étant, il n’est pas clair à quelles conséquences réelles s’exposent les personnes qui se prêteraient à cette « propagande », ni de quelle manière celle-ci est définie.

Les Rangers de New York, le Wild du Minnesota, les Blackhawks de Chicago et les Blues de St. Louis, pour leur part, ont carrément décidé que personne ne porterait de chandail multicolore, et ce, alors que cet élément était prévu dans leurs célébrations.

Dans le vestiaire du Canadien, mercredi, Jonathan Drouin, Samuel Montembeault, Cayden Primeau et Chris Wideman ont indiqué qu’ils porteraient le chandail arc-en-ciel. David Savard l’avait aussi fait la semaine dernière, mais une blessure l’empêchera de jouer jeudi.

Drouin a notamment évoqué les « circonstances différentes » avec lesquelles « certains Russes » doivent composer. « Tu ne peux pas juger quelqu’un qui n’est pas de la même culture, mais c’est décevant de voir ça. On est en 2023 », a-t-il rappelé.

PHOTO DOMINICK GRAVEL, ARCHIVES LA PRESSE

Jonathan Drouin

Néanmoins, il faut que tu soutiennes tes coéquipiers, croit-il. « Je ne parle pas de notre équipe, mais de toutes les équipes », a-t-il pris soin de nuancer.

L’unique patineur russe du Tricolore, Denis Gurianov, n’a pas été rendu disponible pour des entrevues avec les membres des médias, et ce, malgré une demande spécifique des journalistes. Cela ne signifie toutefois pas qu’il ne portera pas le maillot soulignant la soirée de la Fierté.

Solidarité

Les joueurs qui se sont exprimés à ce sujet, eux, n’ont pas laissé d’ambiguïté quant à leur solidarité avec leur équipe et le message qu’elle désire porter.

« Pour la communauté LGBTQ+ ou une autre, ça montre que le hockey est pour tout le monde, a rappelé Samuel Montembeault. Tout le monde est bienvenu au Centre Bell. On est tous là pour apprécier un match de hockey. »

« C’est juste un chandail, mais ça signifie beaucoup pour certaines personnes, a renchéri Cayden Primeau. Des gens ont souffert, dans le passé, avant de sortir du placard. »

Il y a des choses qu’on peut faire pour leur montrer notre [soutien], leur montrer qu’ils ont leur place.

Cayden Primeau

Pour Chris Wideman, « c’est une question de reconnaissance et de respect ». Tout le monde devrait être à l’aise et ouvert à l’idée de venir voir un match de hockey, a abondé Jonathan Drouin. Aux yeux du Québécois, le sport doit justement être un prétexte pour « parler » d’enjeux comme la diversité. Ses coéquipiers sont « pas mal unis », croit-il.

Sans s’inscrire en faux contre cette affirmation, Wideman a néanmoins souligné que « certains joueurs dans la LNH qui ont porté ce chandail sont des mauvais gars » et qu’à l’inverse, certains joueurs qui ont refusé de le faire « sont de bonnes personnes ».

« Ce n’est pas le reflet de la personnalité d’un joueur, insiste-t-il. C’est la beauté de vivre dans un monde libre. Pour ma part, je porterai le chandail et j’encouragerai la cause. »