Justin Barron avait 12 ans au printemps 2014. Ça a beau faire bientôt 10 ans, il s’en souvient très bien. De quoi ?

« Le fait saillant que je retiens, c’est son but contre Boston en quittant le banc des pénalités. C’était assez spectaculaire », décrit le jeune défenseur du Canadien.

Barron parle bien sûr du fabuleux but contre les Bruins lors des séries éliminatoires de 2014. Si le plafond du Centre Bell est déjà passé près d’exploser, c’est ce soir-là.

Regardez le but de P.K. Subban

Ce but de P.K. Subban constitue assurément le point d’orgue des six tumultueuses années du défenseur à Montréal. Six années qui seront célébrées ce jeudi, à l’occasion de la visite des Predators de Nashville.

« Il a incité des gens à s’intéresser au hockey. Il jouait avec passion. Côté énergie, je le classe dans la même catégorie qu’Ovechkin. Quand ces gars-là marquent, ils sont tellement enthousiastes, passionnés », estime une autre recrue du Canadien en défense, Johnathan Kovacevic.

« C’était sa flamboyance, sa confiance. Il pouvait essayer n’importe quoi et ça fonctionnait. Il était aussi capable de donner de grosses mises en échec. C’était un talent spécial », ajoute Arber Xhekaj.

Une espèce en voie de disparition

Le but contre Boston a certes marqué les esprits, mais il n’est peut-être pas le plus représentatif de ce qu’était Subban comme joueur. Il avait beau posséder un coup de patin explosif, c’est avec son puissant tir qu’il infligeait le gros de ses dommages.

En saison, il a enfilé 63 buts avec le Canadien ; 45 ont été réussis sur un tir frappé, selon les données de la LNH. Pendant ses six saisons à temps plein à Montréal, il était quatrième dans la LNH pour les buts marqués avec des tirs frappés, deuxième chez les défenseurs, derrière Shea Weber, qui d’autre ?

Meneurs pour les buts sur tirs frappés, de 2010-2011 à 2015-2016

  • Alexander Ovechkin (68)
  • Shea Weber (63)
  • Steven Stamkos (48)
  • P.K. Subban (45)
  • Dustin Byfuglien (40)

Sauf que les chiffres indiquent que Subban faisait partie d’une espèce en voie de disparition. Le tir frappé – généralement sur réception – est encore efficace chez les attaquants, mais moins chez les arrières.

Prenons les cinq meneurs de chaque saison pour les buts inscrits sur des tirs frappés, une statistique que la LNH recueille depuis 2009-2010. De cette date jusqu’au terme de la campagne 2017-2018, les défenseurs représentaient 64 % des meilleurs marqueurs de chaque saison.

Depuis ? Ce taux a chuté à 20 % dans les cinq dernières années. Les défenseurs qui se sont classés dans le top 5 de la LNH depuis 2018 : Weber (deux fois), Erik Gustafsson, Erik Karlsson, Victor Hedman et Roman Josi.

Pour Samuel Montembeault, l’agilité grandissante des défenseurs y est pour quelque chose. « Les défenseurs sont tellement mobiles, quand ils voient un adversaire qui arrive pour bloquer, ils vont faire une petite feinte pour trouver la ligne de tir, ils vont placer la rondelle où le gardien ne la voit pas venir. »

Mais ce qui vaut pour les joueurs offensifs vaut aussi pour ceux qui se défendent ! Eux aussi sont plus rapides sur leurs patins. C’est du moins ce que souligne Barron, rappelant que « les joueurs sont devenus si rapides qu’ils bloquent les lignes de tir plus rapidement. Les défenseurs essaient donc davantage de tirs des poignets pour placer la rondelle au filet. »

Cela ne signifie pas que le tir frappé soit en voie de disparition. « Martin [St-Louis] insiste pour que nous soyons toujours prêts à tirer sur réception, parce que le gardien est en mouvement. Un gardien en mouvement laisse des ouvertures, qu’il referme quand il a le temps de se replacer », rappelle Kovacevic.

Sauf que ces tirs proviennent de plus en plus d’attaquants qui, comme Ovechkin, attendent le tir sur réception depuis les flancs.

Chez le Canadien ?

C’est à Hamilton, chez les Bulldogs, que Subban a amorcé son aventure avec le Canadien, y passant la quasi-totalité de la saison 2009-2010. Xhekaj avait alors 8 ans et habitait dans la Mecque canadienne de la sidérurgie.

Quand j’étais petit, j’ai participé à un camp et il avait patiné avec nous. Je l’ai toujours suivi depuis. J’aimais son style, et comme j’étais fan du Canadien, je le regardais beaucoup.

Arber Xhekaj

Xhekaj n’a évidemment pas l’explosion de Subban sur patins, mais il aurait la puissance pour développer un tir frappé tout aussi dévastateur. Sauf que le numéro 72 a inscrit quatre de ses cinq buts sur un tir des poignets.

« Dans le junior, j’ai marqué plusieurs buts sur des tirs frappés, sur réception. Mais dans la LNH, c’est très difficile de le faire. Donc je travaille à envoyer des rondelles vers le filet avec des tirs flottants, en trouvant les trous. J’essaie de regarder les yeux du gardien. Dès qu’il se penche pour contourner l’écran devant lui, je tire. De façon générale, je veux surtout m’assurer que la rondelle ne soit pas bloquée par le premier gars devant moi. »

Kovacevic, lui aussi natif de Hamilton, estime qu’à la fin d’un entraînement, « c’est l’habileté la plus plaisante sur laquelle travailler, peut-être trop ! Tu peux mettre tellement de puissance sur ce tir ».

Subban pouvait tenir les amateurs sur le bout de leur siège pour plusieurs raisons. Ses tirs en étaient une parmi tant d’autres.