Alain Chainey a eu un pincement au cœur cette semaine en apprenant la nouvelle : Ryan Getzlaf prendra une retraite bien méritée à la fin de la saison. En date de jeudi, il était rendu à 1150 matchs, 1013 points, une Coupe Stanley en 17 années de loyaux services à Anaheim.

« Ça me rappelle aussi que j’ai pris de l’âge ! » blaguait l’ancien directeur du recrutement à Anaheim, jeudi matin au téléphone.

Le capitaine de Ducks prouve qu’une seule bonne cuvée au repêchage peut transformer le destin d’une organisation pour les quinze années à venir.

« Avec Corey Perry en 2003, ce sont deux joueurs qui ont marqué l’histoire des Ducks, souligne Chainey, retraité de son poste au profit de Martin Madden fils depuis 2012. Ils étaient toujours ensemble. Ils jouaient sur le même trio et ils ont même été renvoyés dans la Ligue américaine ensemble en début de carrière. On les appelait les jumeaux. »

À leurs dix premières années d’existence, les Ducks avaient raté les séries sept fois, mais en ce printemps 2003 venaient d’atteindre la finale de la Coupe Stanley, une surprise totale après avoir terminé la saison au septième rang du classement général et au septième rang dans l’Ouest.

Ces succès demeuraient d’ailleurs fragiles puisqu’ils allaient rater les séries la saison suivante avec une saison de 29-35-18 et le 22e rang du classement général.

La formule de classement en prévision du repêchage différait à l’époque. On ne tenait pas compte des résultats en séries éliminatoires. Les Ducks détenaient donc le 19e choix de cette riche cuvée 2003.

Les Mighty Ducks d’Anaheim, comme on les appelait à l’époque, étaient vieillissants au centre avec Adam Oates et Steve Rucchin.

Getzlaf ne faisait pas l’unanimité parmi les recruteurs. Ce centre de 6 pieds 4 pouces et 220 livres n’avait pas un point par match à Calgary dans la Ligue junior de l’Ouest et plusieurs lui reprochaient de se traîner trop souvent les pieds.

Mais Alain Chainey, un ancien entraîneur en chef à Beauport et Victoriaville dans la LHJMQ, avait néanmoins classé Getzlaf très haut sur sa liste. « Getzlaf venait au cinquième ou sixième rang sur nos listes et Perry était dans les dix premiers. Pour une foule de raison, ils ont été ignorés par plusieurs équipes. Je sais que beaucoup de recruteurs avaient des doutes sur Getzlaf, mais quand on allait le voir jouer, il était toujours bon. Quand il décidait qu’il était le meilleur sur la glace, il était vraiment le meilleur sur la glace. Ses habitudes de travail ne nous faisaient pas peur parce qu’il démontrait du caractère sur la patinoire. »

Plus Anaheim approchait de son tour de sélection, plus notre homme était nerveux. Au 15e rang, Bryan Murray (le DG de l’époque, aujourd’hui décédé) a commencé à être nerveux lui aussi, mais pour d’autres raisons. Il s’est mis à demander à Chainey et à son groupe si Getzlaf avait des problèmes à l’extérieur de la glace parce qu’il était cinquième sur leur liste et personne ne l’avait repêché parmi les 16 premiers. Mais Chainey n’en démordait pas, si Getzlaf était libre au 19e rang, Anaheim ferait une erreur magistrale de le laisser passer.

Les Mighty Ducks n’avaient pas d’autres choix de première ronde, mais un choix supplémentaire de deuxième ronde obtenu dans l’échange de Teemu Selanne aux Sharks de San Jose deux ans plus tôt. Bryan Murray a accepté la proposition de Chainey et cédé ce choix, au 36e rang, et le second, au 54e rang, aux Stars de Dallas pour obtenir le 28e choix, en fin de première ronde, et repêcher un certain Corey Perry.

Celui-ci venait de connaitre une saison de 78 points en 67 matchs avec les Knights de London, mais on lui reprochait sa lenteur sur patins. Voilà donc pourquoi il était toujours disponible aussi tard dans la première ronde.

Mais Perry a failli ne jamais disputer un seul match à Anaheim. Quelques mois plus tard, à l’automne, Murray a conclu un échange avec les Oilers d’Edmonton. Il cédait son choix de première ronde en 2004 et Perry pour obtenir le centre Mike Comrie, 23 ans, en grève après une saison de 51 points en 60 matchs.

Chainey a failli s’évanouir en apprenant la nouvelle. Mais Bryan Murray a été sauvé malgré lui. Le propriétaire des Mighty Ducks a fait avorter la transaction parce qu’il a refusé de payer le boni de signature d’un million à Comrie, une exigence des Oilers…

Comrie a finalement été échangé aux Coyotes de l’Arizona pour le jeune défenseur Jeff Woywitka et un choix de première ronde (Rob Schremp). Comrie n’a jamais eu la carrière espérée. À 30 ans, il n’était déjà plus dans la LNH.

Les Ducks allaient atteindre le carré d’as en 2006 et remporter la Coupe Stanley l’année suivante. Ils ont atteint la finale de l’Association de l’Ouest trois autres fois dans la décennie suivante.

Getzlaf et Perry se situent dans le top cinq de cette cuvée, l’une des meilleures de l’histoire de la LNH, au chapitre des points, avec 1013 pour Getzlaf, deuxième derrière Eric Staal, et 851 pour Perry, cinquième après Patrice Bergeron et Joe Pavelski.

Un souvenir impérissable

Dans sa banque de souvenirs, Alain Chainey possède un chandail signé de Getzlaf alors que celui-ci représentait le Canada en compagnie de l’élite de la Ligue nationale. Et il y a aussi ce moment, imprimé à jamais dans son esprit. « On venait de gagner le Coupe Stanley. Je m’étais placé dans un coin du vestiaire avec les soigneurs pour ne pas me faire asperger de champagne, se rappelle Chainey. Getzlaf m’avait aperçu au loin et il était venu me voir le sourire fendu jusqu’aux oreilles : “Je me souviens une fois tu m’avais attendu après un match à Prince-Albert (dans les rangs juniors). Je n’avais pas bien joué trois jours auparavant à Calgary et tu m’avais payé la traite pas mal ! Je me souviens encore de celle-là !”. On avait une bonne relation lui et moi. »

La relève à Anaheim

Alain Chainey a non seulement déniché deux perles pour les Mighty Ducks en 2003, il a préparé sa relève en attirant à Anaheim l’un, sinon le meilleur de sa profession désormais, Martin Madden fils.

« Je le connaissais de longue date, confie Chainey. À l’époque il était recruteur pour les Hurricanes de la Caroline. Partout où j’allais dans les arénas, on se croisait toujours. C’est amusant parce que les recruteurs habituellement se placent aux extrémités de la glace pour regarder un match. Moi, je ne m’y sens pas confortable. J’étais toujours placé près de la ligne rouge pour mieux voir le travail des défenseurs des deux équipes. Martin était comme moi. On se chicanait presque pour avoir la meilleure place le long de la ligne rouge ! À Chicoutimi, dans le vieil aréna, c’était très difficile d’avoir le bon “spot” à la ligne rouge. J’essayais toujours d’arriver avant lui ! »

Quand Chainey a décidé de réduire ses activités, en 2008, il a proposé à son patron Bob Murray le nom de Madden. « Il ne connaissait pas vraiment Martin. La plupart de ses contacts se trouvaient dans l’organisation des Blackhawks de Chicago. Finalement, après avoir parlé à un peu tout le monde, Bob m’a rappelé et il a décidé d’embaucher Martin. »

Ces dernières années, Madden fils a repêché un certain Trevor Zegras, entre autres. Getzlaf peut se retirer tranquille, sa relève est assurée…

De mal en pis pour les Golden Knights

Malgré tous leurs efforts pour obtenir du succès à court terme, ça sent le roussi pour les Golden Knights de Vegas. Leur défaite nette de 5-1 contre les Canucks de Vancouver, mercredi, à domicile de surcroit, fait mal dans leur quête d’une participation aux séries éliminatoires. Vegas se retrouve à un seul point des Stars de Dallas, dernier club qualifié, mais il leur reste seulement dix matchs à disputer tandis que Dallas en a encore treize à jouer.

Leur nouvelle acquisition, Jack Eichel, ne fait pas mal depuis son retour au jeu avec 18 points, dont 10 buts, en 24 matchs, mais Vegas a une fiche de 11-12-1 depuis son arrivée. L’ailier de 25 ans Alex Tuch, 25 ans, l’un des joueurs obtenus par les Sabres dans la transaction, a 31 points en 39 rencontres, le jeune Peyton Krebs, 21 ans, a 18 points en 37 matchs et Buffalo détient aussi des choix de première ronde en 2022 et de deuxième ronde en 2023. Si la saison se terminait aujourd’hui, les Sabres repêcheraient au 16e rang avec le choix de Vegas. Buffalo a une fiche de 10-4-3 depuis le début de mars.

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