Les puristes du baseball vivent dans un autre siècle. Pas le XXe. Le XIXe. Celui au cours duquel les pionniers ont inventé la plupart des règlements. Ces règles ont résisté aux modes, argumentent-ils. Alors, pourquoi réparer ce qui n’est pas cassé ?

Parce que depuis 1898, la morphologie des joueurs a évolué. Les bâtons, les gants et les souliers aussi. Les parties sont télédiffusées. La capacité d’attention des spectateurs a diminué. Sans compter qu’aujourd’hui, les matchs de baseball et les tournois d’euchre ne sont plus les seuls loisirs au village.

Vous l’aurez compris, je ne suis pas dans le camp des puristes. Plutôt dans celui des évolutionnistes. C’est d’ailleurs avec le plus grand enthousiasme que j’accueille la toute nouvelle règle du baseball majeur : celle du frappeur désigné universel.

C’est quoi, ça ?

La meilleure chose qui soit arrivée au baseball depuis l’invention du hot-dog géant.

Pour les néophytes, il existe deux ligues majeures de baseball. La Nationale et l’Américaine. Jusqu’à maintenant, toutes leurs règles étaient les mêmes – sauf une.

Dans la Nationale, les lanceurs doivent frapper. Dans l’Américaine, non. Cette obligation a été abolie en 1973. Qui frappe à leur place ? Un spécialiste. Le frappeur désigné. Cette stratégie est employée dans 99,9 % des parties, et le spectacle n’en souffre pas. Bien au contraire. Les Yankees de New York, les Red Sox de Boston et les Blue Jays de Toronto sont parmi les clubs les plus excitants des ligues majeures, et ils évoluent tous dans l’Américaine.

Qu’arrive-t-il lorsqu’une équipe de la Nationale en affronte une de l’Américaine ? Ça dépend de la ville où le match est disputé. Si c’est en territoire de la Nationale, les lanceurs frappent. Si c’est dans un stade de l’Américaine, non. C’était, disons-le franchement, un peu compliqué pour rien.

Maintenant, tout est uniformisé.

Le frappeur désigné est permis partout. En tout temps.

Alléluia !

Lorsque je m’allonge sur le divan pour regarder un match de baseball, un dimanche ensoleillé d’été, je veux voir des actions spectaculaires. Un double. Un triple. Un circuit. Un vol de marbre. Un triple jeu. Un attrapé par-dessus la clôture. Je veux ressentir le stress d’un compte complet. Je veux tenter de prédire qui, du lanceur étoile ou du frappeur de puissance, gagnera son duel.

Ce que je ne veux pas voir ? Un gars qui s’élance aussi mal que moi au golf, qui est incapable de déposer l’amorti ou qui regarde passer trois prises de suite, le bâton sur l’épaule. Parmi les lanceurs, ce n’est plus l’exception. C’est malheureusement devenu la règle.

J’exagère ? Nenni. Voici quelques statistiques qui feront exploser votre cerveau.

· En 2021, près de 200 lanceurs ont maintenu une moyenne au bâton inférieure à ,100.

· Les pires ? Ceux des Marlins de Miami (,062), des Pirates de Pittsburgh (,072), des Giants de San Francisco (,089), des Brewers de Milwaukee (,095) et des Cardinals de St. Louis (,095).

· Ceux des Marlins étaient vraiment pourris. Ils se sont fait retirer sur des prises une fois sur deux. Même chose pour les artilleurs des Diamondbacks de l’Arizona.

· L’as des Marlins Sandy Alcantara s’est fait retirer sur des prises 45 fois… en 58 présences.

· Les lanceurs n’ont volé que quatre buts dans toute la saison. À lui seul, l’ancien voltigeur des Expos Otis Nixon en avait volé cinq – en un seul match !

· Un seul lanceur, Shohei Ohtani, a marqué ou produit 10 points. Et c’est parce qu’il était aussi frappeur désigné.

· Brett Anderson a été blanchi en 28 présences.

· Zach Elfin, des Phillies de Philadelphie, a fait pire : 0 en 29.

· Erick Fedde, des Nationals de Washington, encore pire : 0 en 36.

· Alex Wood, pire que pire : 0 en 38.

· Le grand champion ? Max Scherzer, élu dans la première équipe d’étoiles, a terminé la saison avec AUCUN coup sûr en 59 présences.

Une petite dernière ? Chaque année, les ligues majeures récompensent les meilleurs frappeurs de chaque position en leur remettant un Bâton d’argent. Savez-vous combien de circuits a réussis le gagnant de l’année dernière, Max Fried ?

Aucun !

Les puristes soutiennent que la disparition du lanceur-frappeur enlèvera un élément de stratégie du jeu : le double changement. C’est vrai. Et vous savez quoi ? C’est zéro grave, comme le prouvent les clubs de la Ligue américaine depuis 49 ans.

Les lanceurs sont rendus des spécialistes. Comme les botteurs, au football, à qui on ne demande pas d’attraper des passes. Comme les gardiens, au hockey, qui ne tentent pas de marquer en tirs de barrage. Que ce soit reconnu dans le livre des règlements n’est qu’une étape normale dans l’évolution du jeu.

Le monde change.

Le baseball aussi.

Et c’est tant mieux.

Mes prédictions

PHOTO LYNNE SLADKY, ARCHIVES ASSOCIATED PRESS

Bryce Harper, des Phillies de Philadelphie

Ligue nationale – Est

1. Mets de New York
2. Braves d’Atlanta
3. Phillies de Philadelphie
4. Marlins de Miami
5. Nationals de Washington

Ligue nationale – Centrale

1. Cardinals de St. Louis
2. Brewers de Milwaukee
3. Cubs de Chicago
4. Reds de Cincinnati
5. Pirates de Pittsburgh

Ligue nationale – Ouest

1. Dodgers de Los Angeles
2. Giants de San Francisco
3. Padres de San Diego
4. Rockies du Colorado
5. Diamondbacks de l’Arizona

Ligue américaine – Est

1. Blue Jays de Toronto
2. Yankees de New York
3. Red Sox de Boston
4. Rays de Tampa Bay
5. Orioles de Baltimore (bonne chance…)

Ligue américaine – Centrale

1. White Sox de Chicago
2. Twins du Minnesota
3. Tigers de Detroit
4. Royals de Kansas City
5. Guardians de Cleveland

Ligue américaine – Ouest

1. Astros de Houston
2. Mariners de Seattle
3. Angels de Los Angeles
4. Rangers du Texas
5. Athletics d’Oakland

En savoir plus
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    Le nombre de circuits frappés en 2021 par Shohei Ohtani, des Angels de Los Angeles. Un joueur unique : il est à la fois frappeur désigné ET lanceur partant.