Ceux qui ont gardé le souvenir ému d’une Joannie Rochette héroïque, sur la glace du Pacific Coliseum aux Jeux olympiques de Vancouver, seront peut-être surpris d’apprendre qu’elle est maintenant médecin résidante en anesthésie. Ceux qui la connaissent un peu savent toutefois que la jeune femme est de celles qui peuvent relever tous les défis.

« Le patinage artistique et la médecine sont deux domaines exigeants, c’est vrai, mais j’ai toujours été très compétitive, rappelle-t-elle. Je suis une fille unique et j’ai été habituée à être poussée. À l’école, quand je revenais avec un 95 %, ma mère me demandait où j’avais perdu le 5 % !

« J’ai toujours aimé étudier et quand j’étais jeune, je pensais déjà à des études en médecine. Mais ma carrière sportive prenait beaucoup de place, avec souvent des voyages de plusieurs semaines pendant l’année scolaire. Et les programmes sport-études limitaient les choix de domaines d’études. Même si j’avais les notes suffisantes au cégep, j’ai donc dû mettre une croix sur la médecine, une chose que je trouvais vraiment injuste. »

Le sport a donc pris toute la place pendant plusieurs années. Six fois championne canadienne, médaillée d’argent aux Mondiaux de 2009, Rochette a conclu sa carrière de façon spectaculaire en obtenant la médaille de bronze aux Jeux de 2010 à Vancouver, deux jours seulement après la mort soudaine de sa mère Thérèse.

« Les athlètes ne sont pas toujours bien préparés à la retraite, c’est souvent une période de doute, de questionnements, souligne Rochette. Et même si j’adore le patinage artistique, je ne me voyais pas devenir coach. Ce n’est vraiment pas dans ma personnalité. Par contre, j’avais encore le goût du défi, du dépassement, j’étais encore jeune et je pensais à une carrière pour tout le reste de ma vie. »

PHOTO BERNARD BRAULT, ARCHIVES LA PRESSE

Joannie Rochette aux Jeux olympiques de Vancouver en 2010

Armée des qualités qui ont fait d’elle une championne, habituée à la rigueur des entraînements, disciplinée de nature, Rochette a trouvé une profession qui correspond à son tempérament, à l’écart des caméras et des projecteurs cette fois.

Admise à l’Université McGill en 2015, elle a reçu son diplôme en 2020, quelques jours seulement avant de s’impliquer en première ligne, dans un CHSLD, pendant la crise de la COVID-19 ce printemps-là. Elle a ensuite entrepris dans un hôpital montréalais sa résidence de cinq ans en anesthésie.

« C’est tout autre chose par rapport au sport, explique-t-elle. C’est très cérébral et il faut vraiment toujours être parfaitement concentrée. Ça exige aussi une grande rigueur, beaucoup de précision, ce que j’aime beaucoup. »

Fière de son parcours, Joannie Rochette espère inspirer d’autres jeunes athlètes à réaliser leurs rêves professionnels. « Le sport développe notre résilience, la capacité de se relever quand on a des journées plus difficiles, explique-t-elle. C’est parfois compliqué de concilier les études à tout ça, mais je crois que c’est important de le faire, de persévérer quand c’est plus difficile. Il faut y aller une journée à la fois, quitte à faire du rattrapage si c’est nécessaire. »

La médecin estime d’ailleurs que les programmes scolaires pourraient être mieux adaptés à la réalité des étudiants-athlètes de façon à faciliter certaines transitions en fin de carrière sportive.

Et tant mieux si, au bout du compte, encore plus d’athlètes deviennent médecins !