La Presse vous propose chaque semaine un témoignage qui vise à illustrer ce qui se passe réellement derrière la porte de la chambre à coucher, dans l’intimité, loin, bien loin des statistiques et des normes. Aujourd’hui : Véronique*, 56 ans

C’était « l’homme de [sa] vie ». Ils ont passé 20 ans ensemble, et puis monsieur est parti. Depuis, et tout doucement, Véronique se relève. Voici comment.

La souriante quinquagénaire nous a donné rendez-vous dans un bistro de Saint-Hyacinthe, où elle est de passage, en ce petit lundi pluvieux du mois de juillet. « Je suis une vieille de 56 ans », nous a-t-elle écrit, plus tôt cet été. Précision : « vieille pour les réseaux sociaux ». Finalement, finira-t-on par comprendre, elle a tout faux.

Mais avant d’y venir, commençons par le commencement. Notre discrète interlocutrice, un peu gênée de se confier ici à une pure inconnue, plonge dans le vif du sujet sans trop se faire prier. Sa première fois ? « À 17 ans, comme tout le monde, dit-elle en souriant. Et j’ai aimé ça ! Oui, ç’a été bien. Il avait été délicat, ça n’a pas été douloureux. Et puis on avait fait ça plusieurs fois de suite, dans la même journée ! » Leur amourette dure un temps, puis Véronique rencontre un nouvel amoureux au cégep, une histoire qui dure un an. « Ça allait bien aussi. Mais j’ai su plus tard qu’il m’avait trompée et j’ai été atterrée, dit-elle. J’en ris aujourd’hui, mais j’ai eu une grosse peine d’amour. »

Les années se suivent et Véronique enchaîne les amants, quoiqu’un peu malgré elle. Elle vit ce faisant plusieurs « petites peines ». C’est qu’elle a l’âme romantique, notre interlocutrice.

Je n’étais pas capable de dissocier l’amour et la baise. Moi, quand je baisais, je voulais que ce soit mes chums.

Véronique

« Mais bien des gars, c’était pour une baise ou deux et puis ciao bye », raconte-t-elle, aujourd’hui visiblement plus détachée.

Mi-vingtaine, elle rencontre enfin « l’homme de [sa] vie ». Leur histoire dure plus de 20 ans. Elle se souvient encore de leur première nuit (« il n’a pas bandé ! »), et de la deuxième, surtout : « J’ai eu cinq orgasmes ! » La connexion est au rendez-vous, devine-t-on. Et on devine juste : « Oh oui ! », confirme Véronique, d’un air entendu.

Oui, leur couple a « bien évolué », croit-elle. « C’est sûr, à 25 ans, on avait les hormones dans le tapis. On faisait l’amour tout le temps. [...] C’est sûr qu’après plus de 20 ans, ce n’était pas l’effervescence, même sans enfant. Mais quand on faisait l’amour, j’avais tout le temps un orgasme », précise-t-elle.

Et puis, sans crier gare, monsieur l’a quittée. Et de toute évidence, la blessure est encore à vif. « Ça a fait mal. Même encore aujourd’hui, c’est difficile. Il ne m’aimait plus. Mais il avait spotté quelqu’un, j’en suis sûre... » Véronique a 48 ans quand, du jour au lendemain, elle se retrouve seule. « Eh, mon Dieu, c’est un choc, un choc post-traumatique ! » Il faut savoir qu’elle n’a pour ainsi dire jamais vécu seule. Tout un « deuil », dit-elle. « Oh là là, le choc... »

Heureusement, elle est bien entourée. « J’ai des amis extraordinaires qui m’ont sauvé la vie. Des amis gars, des amies filles, de longtemps, du secondaire ! Ils ont été là pour m’aider. »

Sans trop attendre, elle se met aussi à sortir. Elle se revoit encore le premier soir dans un bar. « Je me sentais boboche en ta ! », pouffe-t-elle. Or, surprise : « Je me suis fait cruiser ! C’est flatteur, quand même ! [...] Des beaux gars m’accostent, je ne suis pas si pire ! »

Elle s’inscrit à l’époque sur Réseau Contact, et y rencontre rapidement son « premier jeune amant », comme elle dit. Re-fou rire. « Il avait 23 ans, je croyais qu’il déconnait ! Voyons donc, as-tu vu quel âge j’ai ! » Mais non, le type est sérieux et Véronique ose : elle l’invite chez elle.

« Ça a fait du bien à mon orgueil, je pense, analyse-t-elle. C’était un bon amant malgré son jeune âge. Et ça a duré un été. Mais c’était très clair que c’était juste ça. J’avais l’âge de sa mère, tu sais ! »

Ce qu’elle ne sait pas, c’est qu’il est le premier d’une série. Rapidement, elle rencontre un deuxième « jeune amant » de 25 ans, cette fois. « Il est beau ! Ça ne se peut pas avoir un beau gars comme ça dans mon lit. Quelle chance ! » Mais non, elle ne tombe pas amoureuse : « Mon cœur est fermé », dit-elle. Trop blessée ? « Oui », acquiesce Véronique.

N’empêche qu’elle sort ensuite une petite année avec un troisième homme, rencontré cette fois dans un bar. Un type de son âge, « très bon, très cochon », dit-elle en souriant. À preuve : avec lui, elle vit son premier « trip à trois », et ils fréquentent même à quelques reprises des « maisons d’échangistes ».

J’avais le goût d’explorer à ce moment-là. […] On dirait que j’étais dans un mode : let’s go, j’explore ! J’en profite !

Véronique

Elle a 50 ans. Mais sa séparation est encore trop fraîche. « Je n’étais pas en amour, précise-t-elle. Mon cœur a de la misère. Ça m’a anéantie, ma séparation... », répète-t-elle.

Véronique ne s’éternise pas et poursuit son récit. Elle rencontre ensuite un quatrième (est-ce bien quatre ? on perd un peu le fil...) flirt, une histoire qui s’étire sur une autre petite année. Au lit ? « Super aussi, on connectait vraiment. » Si vous vous posez la question, non, elle n’a finalement eu aucune expérience sexuelle négative. « Pas encore ! »

Depuis ? Pas davantage. Elle a fréquenté un ami une petite année, et revoit un des premiers amants sporadiquement. « Trouver le bon, c’est difficile, confirme-t-elle. Et mon cœur a de la misère à s’ouvrir. » N’empêche qu’elle ne voit que du bon dans les applications. « Une chance qu’on a ça ! Surtout pendant la pandémie... »

D’ailleurs, elle le sait : doucement, ces aventures lui ont permis de panser ses plaies. « Toutes ces rencontres m’ont permis de me trouver belle et intelligente. Ça m’a permis de passer au travers de ma rupture et de relever la tête ». Morale ? « Malgré une séparation douloureuse et dévastatrice, on peut se refaire. Et même avoir du fun sexuellement ! », dit-elle en souriant.

* Prénom fictif, pour protéger son anonymat

Écrivez-nous pour nous raconter votre histoire