Être parent d’un jeune enfant comporte son lot de défis. Et il arrive qu’on ne sache plus vers qui se tourner pour trouver des réponses à ces petits soucis du quotidien. La Presse explore une question qui touche le bien-être des enfants à l’aide d’un spécialiste. Aujourd’hui : comment enseigner aux enfants à réagir aux agressions physiques et verbales des pairs, à temps pour la rentrée.

Karine est la mère d’un garçon qui entre en première année du primaire à la rentrée. À la maternelle, son fils a commencé à reproduire des comportements dont il a été victime à l’école – « paroles blessantes, pousser, frapper », illustre-t-elle. Elle nous a écrit parce qu’elle voudrait savoir comment montrer à son enfant, qui est passif et timide, à réagir face à l’intimidation.

Selon Julie C. Boissonneault, doctorante en psychopédagogie à l’Université Laval dont les recherches portent essentiellement sur l’intimidation en milieu scolaire (également associée au Comité québécois pour les jeunes en difficulté de comportement, à la Chaire de recherche Bien-être à l’école et prévention de la violence ainsi qu’à l’Unité mixte de recherche Synergia), il existe plusieurs stratégies essentielles à apprendre aux enfants dès leur plus jeune âge.

PHOTO MARIANNE LEGENDRE, FOURNIE PAR JULIE C. BOISSONNEAULT

Julie C. Boissonneault, doctorante en psychopédagogie à l’Université Laval

Et à son avis, profiter de ces dernières semaines avant la rentrée pour se préparer permettra autant aux petits qu’à leurs parents de commencer l’année scolaire du bon pied.

« En maternelle, explique-t-elle, les enfants n’ont pas encore acquis une maturité cognitive et sociale ; on est beaucoup plus impulsif dans nos réponses. Par exemple, on va pousser, crier ou utiliser des stratégies qui ne sont pas très bonnes socialement. Mais c’est tôt pour appeler ça de l’intimidation. Par contre, si l’enfant nous dit que les agressions physiques et verbales arrivent souvent, sur une période qui dure, c’est un signe. En première année, on va déjà voir que certains enfants vont se camper dans un rôle de victime ou d’agresseur parce que c’est la façon qu’ils ont trouvée de répondre à une situation. »

L’une des stratégies les plus importantes à apprendre à l’enfant, selon elle, est de s’affirmer et de formuler son inconfort avec confiance.

On peut dire : « Je n’aime pas ça quand tu me bouscules. » Souvent, un message clair, avec un ton assuré, va faire diminuer les incidents d’agression à cet âge-là parce que les petits ne savent pas nécessairement quand ils dépassent la limite.

Julie C. Boissonneault, doctorante en psychopédagogie à l’Université Laval

L’enfant doit également éviter de contre-attaquer, puisque répondre avec les poings ou les bousculades le place dans un rôle d’agresseur qui risque de diminuer la réponse empathique de ses pairs et de ses enseignants, note-t-elle. « Ils pourraient dire : “Lui aussi, il pousse.” Il risque d’avoir moins de soutien et de se sentir plus isolé. »

Il faut aussi lui faire comprendre qu’il n’est pas obligé de subir ces actes en silence. « En tant que parent, on peut lui dire : “Tu as le droit de changer d’endroit, de dénoncer, d’aller chercher de l’aide auprès d’un ami ou d’un adulte.” »

Et enfin, l’aider à développer sa confiance personnelle – en identifiant ses forces et ce qui le rend unique – ainsi que ses compétences sociales lui permettra de se sentir plus à l’aise de s’exprimer avec confiance.

« Aller au parc va l’aider à apprendre à démarrer une conversation et jouer avec quelqu’un qu’il n’a jamais rencontré, à connaître ses limites, à s’ajuster… Ce sont toutes des compétences sociales qui vont faire en sorte que ce sera plus facile, quand il va rentrer en première année, de lire les autres, de s’associer à ceux qui lui ressemblent un peu plus et d’avoir de bonnes relations. »

Intervenir sans surprotéger

Le parent a lui aussi un rôle primordial à jouer, souligne Julie C. Boissonneault. Il doit rester calme et ouvert et laisser l’enfant lui décrire la situation, ses émotions, ses pensées, ce qu’il veut faire et ce qu’il a déjà essayé de faire dans cette situation.

« Si on lui demande ce qu’il veut faire, on lui donne le pouvoir, insiste-t-elle. Décidez avec votre enfant des actions à entreprendre et de l’adulte que vous allez informer. »

Un parent qui est surprotecteur fait tout à la place de l’enfant. Mais dans une situation d’intimidation, il faut que l’enfant apprenne à s’affirmer, justement. Sinon, il n’aura pas l’impression d’avoir pris [des mesures] pour arrêter ça et, quand ça va se reproduire, il ne saura pas quoi faire.

Julie C. Boissonneault, doctorante en psychopédagogie à l’Université Laval

Il faut également l’inclure, autant que possible, dans les rencontres avec les responsables scolaires. Le parent, de son côté, a la responsabilité de maintenir un contact étroit avec le milieu pour qu’il soit tenu au courant de l’amélioration ou non de la situation.

« Comme parent, à tout âge, il faut savoir ce qui se passe avec son enfant, mais sans devenir trop intrusif. Il faut être capable de parler ouvertement de ses relations avec ses amis, comme ça, on va avoir un petit indice de ce qui se passe. S’il ne veut pas en parler tout de suite, c’est correct ; il ne faut pas pousser, mais attendre qu’il soit prêt. Il va très souvent revenir par lui-même pour parler de ses difficultés une fois que la maman ou le papa va avoir déchiffré le problème. »

Consultez le fascicule de Julie C. Boissonneault et de Claire Beaumont sur l’intimidation à l’école primaire Consultez le guide pour les parents d’enfants d’âge primaire

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