En sortant de l’université, en 1993, Nathalie Leroux était certaine d’une chose : elle voulait travailler auprès de jeunes avec un trouble du spectre de l’autisme puisque « personne ne semblait s’en préoccuper ».

Le 27 avril prochain, elle produira un concert pour eux... et tous les autres. Parce que les temps ont changé et qu’elle nous croit prêts à pratiquer l’inclusion, la vraie.

PHOTO FOURNIE PAR NATHALIE LEROUX

Nathalie Leroux et Xavier, qui a un trouble du spectre de l’autisme. « J’aime la musique parce que ça m’aide à me calmer. J’ai tissé un lien fort avec [Nathalie] et cela m’aide comme autiste d’apprendre avec une personne que je connais et avec qui je me sens bien. »

Dès qu’elle a obtenu son diplôme, Nathalie Leroux a cogné à la porte de l’école primaire Saint-Étienne, à Montréal. Elle était l’une des rares dotées de places en adaptation scolaire pour enfants avec un trouble du spectre de l’autisme (TSA). Nathalie y offre ses services de musicothérapeute depuis 31 ans, maintenant. Elle a fait sa marque en incluant tous les jeunes aux activités ; ses comédies musicales et ses contes sonores sont à la fois portés par des élèves avec un TSA et des étudiants du programme régulier.

Parce que tous peuvent bénéficier de la musique, mais aussi – et surtout – de la rencontre.

L’interaction se fait avec la musique dans un premier temps et ensuite avec la personne qui se trouve derrière la musique. Ça facilite la communication. On n’a pas besoin de mots, on se comprend. Quand on va voir un spectacle, il y a une chimie... On ne parle pas à notre voisin, mais on est ensemble !

Nathalie Leroux

La musique aide également la régulation des émotions. Le tempo peut encourager les élèves connaissant une frustration à se poser, par exemple. Plus important encore : elle motive. Nathalie me parle d’un enfant avec un TSA qui se jette au sol dès qu’il entend la cloche annonçant la récréation. Quand sa professeure lui montre le pictogramme indiquant qu’une période de musicothérapie suivra ladite récréation, sa réaction est tout autre. Il se lève et se rend avec empressement dans le prochain local. « Il est donc capable de le faire ! souligne l’intervenante. Ce qui lui manque, c’est la motivation. Et la musique devient son moteur. »

J’aimerais que vous puissiez entendre Nathalie Leroux parler de ses projets. Je ne trouve pas les ressources nécessaires dans mon vocabulaire pour vous décrire l’ampleur de sa passion. Je vais donc compter sur son CV pour y arriver... C’est Nathalie qui a élaboré l’initiative OSMose avec l’Orchestre symphonique de Montréal.

Grâce à elle, des artistes se sont déplacés directement en classe pour faire découvrir la musique classique à des élèves avec un TSA. « C’est difficile de sortir avec ces élèves, explique Nathalie. Ils ne cadraient pas dans les beaux projets déjà proposés par l’OSM, alors j’ai sensibilisé l’orchestre et formé l’administration de l’OSM. On a fait du vivre ensemble... Et pas juste sur papier ! »

PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

Nathalie Leroux

Pour la musicothérapeute, l’inclusion, « c’est plus que donner accès », c’est favoriser la mixité. Elle poursuit d’ailleurs aujourd’hui ses activités de musicothérapie tout en appuyant différents acteurs dans leurs interventions auprès de personnes avec un trouble du spectre de l’autisme. Après Musique pour tous, elle développe Place pour tous.

Pour le Mois de l’autisme, qui a lieu en avril, elle rêvait d’un évènement rassembleur. Puis, ça lui est venu : les jeux vidéo ! Les enfants les adorent, qu’ils soient neurotypiques ou neurodivergents.

Nathalie a fait des recherches et découvert L’Orchestre de Jeux Vidéo, qui se consacre, comme son nom l’indique assez clairement, à la musique tirée des jeux vidéo. Bingo ! Ne manquait plus que de l’argent pour rendre l’évènement gratuit. C’est l’organisme à but non lucratif Autismopolis qui est venu lui prêter main-forte.

Le 27 avril, les familles pourront donc assister gracieusement à un concert de l’Orchestre de Jeux Vidéo à l’église de l’Acadie, à Saint-Jean-sur-Richelieu.

Beaucoup d’efforts seront déployés pour assurer le confort des spectateurs avec un trouble du spectre de l’autisme. Un scénario social sera publié pour que les enfants connaissent préalablement les détails de l’évènement. Ils y verront des photos du lieu et l’ordre dans lequel les choses se passeront pour amoindrir l’imprévisibilité avec laquelle ils peinent souvent à composer.

Il y aura sur place un petit espace d’apaisement sensoriel, des projections et quelques coquilles auditives (bien que ce soit un concert « apportez vos coquilles » !). Des bénévoles sensibilisés à la différence seront aussi là pour aider les parents qui auront besoin d’un coup de main.

Nathalie Leroux espère également voir beaucoup de familles qui ne sont pas touchées directement par le TSA : « Pour clore le Mois de l’autisme, je veux que les gens réalisent qu’on est tous humains ! C’est juste que nos perceptions et nos manifestations sont différentes. Tu aimes ce que tu entends ? Lui aussi ! Vous pouvez partager un beau moment ensemble. »

La musicothérapeute constate qu’un tel évènement permet non seulement de combler un manque auprès d’une clientèle aux besoins particuliers, mais également de sensibiliser le public neurotypique à ces enjeux. Que ce soit les spectateurs, les administrateurs de la salle de concert ou les musiciens. Elle les a déjà prévenus, d’ailleurs : « Ça se pourrait que des gens se lèvent, que d’autres crient, que certains sortent et que des applaudissements surviennent à des moments inattendus... Mais ça ne veut pas dire que vous n’êtes pas intéressants ! »

Nathalie Leroux rêve que, par la bande, le concert ouvre certains horizons pour les services publics, le milieu des loisirs et les services professionnels...

Voyez comme ça se peut.

Mieux encore : voyez comme c’est le fun.

Pour plus de détails sur l’évènement gratuit du 27 avril :

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