La superstar de la réno canadienne Debbie Travis s'attaque à son plus gros projet à vie: restaurer une villa italienne du Xe siècle. Avec un scrupuleux respect des règles patrimoniales. Et un peu de vin...

Debbie Travis a toujours eu le sens du timing. Elle s'est lancée dans les émissions de déco-réalité tout juste avant que ça devienne commun, dans les années 90. Partout dans le monde, les réseaux consacrés à la rénovation se multipliaient et avaient besoin de contenus. Debbie leur en a fourni. Ses émissions ont été achetées dans 80 pays, faisant d'elle une femme d'affaires à succès, avec une marque qui ne demandait qu'à être développée.

Ce qui fut fait: Canadian Tire vend plus de 600 objets signés Debbie Travis, du service à vaisselle au panier à linge sale et des luminaires aux tapis.

Elle est à la tête de deux maisons de production qui donnent dans la télé style de vie. Elle est notamment productrice de l'émission de cuisine du Montréalais Chuck Hughes Chuck's Day Off. Elle signe aussi une chronique hebdomadaire dans le Toronto Star et, comme il lui restait beaucoup de temps libre, elle s'est acheté une villa italienne en pierre, entourée de vignes qui produisent un vin imbuvable. «Pire que du vinaigre», dit la propriétaire.

En plus des vignes, elle possède 800 oliviers. Il faut deux heures pour cueillir les olives de chaque arbre. Et chacun des arbres donnera un litre d'huile biologique. Les précieuses bouteilles signées Debbie Travis sont mises en vente en ligne et s'envolent dare-dare. Debbie a des fans prêtes à la suivre jusque dans son huile d'olive. «Mais de grâce, ne la cuisez pas!», prévient-elle au bout du fil, d'un ton sans équivoque: Debbie Travis est sérieuse lorsqu'il est question d'huile d'olive.

Coup de foudre italien

Toute cette histoire a commencé lors d'un tournage italien, il y a quelques années, pour une de ses émissions de déco. Un coup de foudre pour le pays, puis quelques années à louer des maisons pour trouver la bonne région italienne où s'installer. Il y a eu la Sicile. Les Pouilles. «Je ne voulais pas m'installer en Toscane car c'est là que se trouvent tous les expatriés britanniques», tranche Debbie Travis, Britannique elle-même.

Pour la petite histoire, ce n'est qu'à la fin de sa vingtaine que Debbie Travis s'est installée à Montréal, suivant son nouvel époux. Aujourd'hui, c'est lui qui la suit dans son aventure italienne, avec leurs deux fils qui arrivent en renfort au moment de la récolte des olives.

Finalement, la Toscane a gagné.

«J'ai compris pourquoi tout le monde s'installe ici, dit-elle. C'est magnifique. La vue que nous avons de la maison est à couper le souffle.»

Debbie Travis a jeté son dévolu sur une ancienne tour entourée de bâtiments agricoles, située à un peu plus d'une heure de route de Rome. «Si vous aviez vu l'état des lieux lorsque nous avons acheté, vous m'auriez traitée de malade», dit-elle.

Son plus gros projet à vie?

«Sans aucun doute, répond-elle. C'est un énorme défi. Nous avons même dû faire une route et amener l'électricité à la maison.»

Depuis, elle gère les rénos lors de nombreux allers-retours en Italie. Tout est fait par des artisans locaux. «Ce sont des gens incroyablement passionnés. Lorsque je leur dis que je n'aime pas quelque chose, ils pleurent!»

Chaque détail est étudié. Les fenêtres par exemple, qui doivent être faites une à une, par un menuisier qui reproduira le modèle original. Et pas question de percer un mur si ça n'avait pas été pensé à l'origine.

Les rénovations ont été documentées par Debbie elle-même, sur son blogue et en images, avec son téléphone. Aucune émission n'était prévue au départ, mais l'aventure pourrait bien se transformer en un projet télévisuel, finalement. Peut-être même pour une chaîne québécoise.

Retraites féminines

En plus de gérer les gros travaux, la propriétaire travaille sur la décoration des chambres, de style Côté Sud, ce magazine français qu'elle adore. «C'est rustique chic», précise-t-elle. Les lits et toute la literie sont faits par des artisans italiens.

Et des lits, il y en aura plus d'un. Car depuis 2009, Debbie Travis accueille des femmes en Italie pour des «retraites», une semaine où les participantes discutent, visitent la région, font du vélo, et boivent beaucoup de vin, précise l'organisatrice. Surtout du Nobile de Montepulciano produit tout près, question d'encourager les voisins.

Pour l'instant, les vacancières sont logées dans une villa louée, mais dès l'année prochaine, Debbie Travis accueillera ses groupes dans sa maison, qui sera équipée comme le plus chic des hôtels, question style et confort, avec un studio de yoga et une piscine à débordement.

Pourquoi accueillir de pures étrangères dans sa maison, pendant ses courtes vacances?

«Je crois fermement que j'ai trouvé le plus bel endroit du monde, répond Debbie Travis. Pourquoi ne pas le partager?»

«Toutes les femmes rêvent de faire un «Eat, Pray, Love», mais on ne peut pas toutes se permettre de partir comme ça, explique Debbie Travis. Pendant une semaine, on discute: de la prochaine étape de la vie quand on est dans la quarantaine, dans la cinquantaine, qu'on est jeune et qu'on a besoin de nouveaux défis.»

Le reste du temps, la villa pourra recevoir des groupes d'affaires ou familiaux. «Ça n'est pas un hôtel, bien que ce soit classé comme un hôtel, explique Debbie Travis, qui peine à classer son projet dans une seule catégorie. Ce n'est pas un spa non plus. Ni une villa...»

Suivra certainement une collection de produits de maison très haut de gamme, issue de ses rencontres italiennes et de son champ de lavande bio. Des savons, des couvertures faites dans la région, peut-être même les lits.

Un vignoble homonyme un jour qui fera de grands vins? Gageons que oui...

Photo fournie par Debbie Travis

Debbie Travis dans sa nouvelle villa italienne. Elle gère les travaux lors de nombreux allers-retours en Italie.