Quand le jeune Fabrizio Covone, fraîchement diplômé en design, a dit à son père Aniello qu’il voulait ouvrir son propre restaurant, il a essuyé un refus catégorique. Jusqu’à ce qu’il précise le genre de resto qu’il avait en tête.

« Quand je lui ai dit que je voulais ouvrir une pizzeria napolitaine, comme celles où on allait manger dans nos voyages en famille en Italie, j’ai vu qu’il avait un petit sourire au visage, se rappelle le pizzaiolo aujourd’hui âgé de 42 ans. Il m’a dit : “Je t’envoie à Naples. Tu es prêt à y rester pendant deux ans ?” J’ai répondu oui, à 100 %. »

Après avoir convaincu les gens là-bas qu’il n’était pas là pour leur faire concurrence et que son but était de rapporter son savoir à Montréal, Fabrizio a été embauché comme apprenti dans une pizzeria de Naples. « Je travaillais de huit heures à douze heures par jour, j’ai fait ça six soirs par semaine pendant quasiment un an. J’ai tout appris, les ingrédients, le bois, le four. »

PHOTO ALAIN ROBERGE, LA PRESSE

Le four de trois tonnes et demie de la Bottega a été importé directement de Naples.

Trouver le bon four était évidemment crucial, parce qu’il n’y avait pas au Québec d’appareil pour cuire la véritable pizza napolitaine. « J’allais manger dans différentes pizzerias là-bas et j’inspectais leurs installations, nous explique Fabrizio en s’affairant justement à mettre des bûches dans le four de la Bottega. J’ai réalisé que 90 % des pizzerias napolitaines embauchaient des menuisiers et des maçons, mais qu’ils partaient tous de la même base, développée par deux frères qui faisaient aussi des fours complets. » Quelques années plus tard, la Bottega recevait son fameux four au port de Montréal, celui-là même qui trône en évidence à l’arrière de la salle à manger du restaurant de la Petite Italie.

Évidemment, le four ne fonctionne pas tout seul. Fabrizio a dû trouver le bon fournisseur de bois, quelqu’un qui accepterait de lui livrer de l’érable coupé en toutes petites bûches. « J’ai besoin de petites bûches, parce que je dois monter la température du four à coup de 20 °F, nous dit Fabrizio. Si je mets une grosse bûche, je vais ajouter 100 °F, et je ne veux pas ça. » Il en va de même pour le degré d’humidité du bois, qui doit être particulièrement sec. C’est le pizzaiolo qui se charge de faire sécher son bois : « Comme on n’a pas de thermomètre, on y va avec nos sens », nous dit-il. Quant à la température du four, ça prend environ trois heures pour qu’il soit suffisamment chaud – quand le plafond du fourneau est complètement blanc, ça y est.

Le résultat de la cuisson est sublime : 90 secondes au feu pour une croûte moelleuse et goûteuse, avec des garnitures discrètes, mais pleines de saveur, dans la plus pure tradition napolitaine.

Justement, en 2006, ce genre de croûte n’avait pas encore trouvé son chemin jusque dans le cœur des Québécois, encore habitués aux pâtes bien croquantes. « Les six premiers mois, ç’a été très difficile. Il y avait de l’intérêt, mais aussi beaucoup d’interrogations de la part de la clientèle, nous explique Massimo Covone. Les commentaires étaient souvent pour dire qu’il n’y avait pas assez de garniture et que la croûte n’était pas assez croustillante. Mon défi était donc de dire que l’on croyait en notre philosophie, et qu’on n’allait pas changer. Il fallait faire comprendre aux gens ce qu’était une belle pizza napolitaine. »

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Le calzone est cuit à une température moins élevée que la pizza, pendant quelques minutes de plus pour une cuisson uniforme.

« On est en effet les ambassadeurs de la pizza napolitaine au Québec, renchérit de son côté son frère Fabrizio. Je pense donc que l’on a planté les racines de la tendance, ce qui a simplifié la vie des autres restaurants, parce qu’on avait défriché avant eux. »

Le plus important, ce sont les ingrédients. Imagine : il y a la pâte, la sauce et la mozzarella. Si c’est pas à la hauteur, tu rates ton coup. Avec si peu d’ingrédients, pas moyen de te cacher.

Massimo Covone

Pour les pizzaiolos en herbe !

Une section entière du livre de Giovanna Covone est consacrée aux pizzas, sous la plume de Fabrizio. Tous les aspects sont abordés avec plusieurs photos à l’appui, de la fabrication et la manipulation de la pâte à la façon de préparer les différents ingrédients clés en passant par le mode de cuisson détaillé au four. En prime, Fabrizio présente six de ses recettes les plus populaires.

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