En octobre, nous vous présentons des entreprises d’ici qui innovent en proposant des produits inédits et ingénieux. Aujourd’hui : les craquelins d’économie circulaire Rebon.

L’idée

Français d’origine, Patrick Mougin a travaillé pour des multinationales en agroalimentaire, notamment à Dubai, avant d’atterrir au Québec, il y a 12 ans. « On a quatre enfants, ma femme et moi, et on cherchait un nouvel endroit où s’établir. On a fait un échange de maisons avec une famille québécoise de Rawdon pendant un an. On a tellement aimé qu’on a acheté la maison voisine et on n’est jamais repartis ! »

Décidé à détenir sa propre entreprise, il a fondé, il y a huit ans, la microbrasserie Malstrom, à Notre-Dame-des-Prairies. Qui dit fabrication de bière dit drêche, sous-produit du brassage composé de résidu de malt. « La drêche est utilisée dans l’alimentation animale, mais ce n’est pas la meilleure utilisation qu’on peut en faire. Elle contient des fibres, des protéines, des sels minéraux, des tas de choses intéressantes pour l’alimentation humaine. Ça fait aussi de la superficie qu’on n’est pas obligé de cultiver de nouveau », remarque-t-il.

Mais comment réutiliser et revaloriser ce résidu ? L’idée est venue de Jean-David Camus, associé français de M. Mougin, qui est arrivé un jour de France avec des craquelins fabriqués à base de drêche. « Le goût n’était pas plus fameux que ça, mais l’idée a germé à partir de là ! », se souvient-il.

Le défi

PHOTO FOURNIE PAR REBON

La drêche fraîche se compare à un gruau très humide.

La première étape était de trouver comment transformer ce résidu du brassage en produit attrayant. L’entrepreneur a d’abord fait réaliser des études de faisabilité par Cintech, un institut de recherche et développement en agroalimentaire à Saint-Hyacinthe, puis a loué un local dans La boîte à Startup, à Berthierville, afin de pouvoir tester ses recettes avec des équipements adaptés à ses besoins. La drêche fraîche, que M. Mougin compare à un « gruau très humide et chaud », est loin d’être un produit facile à manipuler et à transformer. Certaines entreprises vont la faire sécher, puis la broyer en farine, un processus énergivore qui va un peu à l’encontre des principes de revalorisation, croit l’entrepreneur. Il faut donc, idéalement, utiliser la drêche dès sa sortie des cuves. Mais il faut faire vite, sinon une fermentation spontanée a lieu, ce qu’il faut absolument éviter, faute de quoi le produit se dégrade. « Le défi logistique, il est là. »

L’innovation

La solution trouvée par M. Mougin est somme toute simple, mais demande, comme on l’a dit, une logistique impeccable. La drêche est collectée directement de sa brasserie et apportée immédiatement à l’usine qu’il a ouverte en 2020, à Saint-Ambroise-de-Kildare. La matière première est broyée, puis refroidie, ce qui laisse quelques jours de répit. Lorsqu’il est temps d’entrer en production, la drêche sera pétrie avec les autres ingrédients entrant dans la composition des craquelins, puis la pâte ainsi obtenue sera laminée avec une machine utilisée manuellement, déposée sur une plaque, découpée et enfin mise au four. Des « activités manuelles pénibles » qui seront bientôt remplacées par une autre innovation, une machine entièrement automatisée que le propriétaire a conçue sur mesure, selon ses besoins, avec un fabricant québécois.

On ne peut pas imaginer faire une production de masse, démocratiser la revalorisation d’un résidu avec autant d’opérations manuelles.

Patrick Mougin, de Rebon

Des cinq tonnes de drêche utilisées depuis le lancement de la marque Rebon, en juin 2021, l’entreprise espère passer à une centaine de tonnes revalorisées par année avec ce nouvel équipement.

Le résultat

  • La pâte constituée de drêche broyée, de farine, d’huile de canola et d’épices, prête à être transformée en craquelins.

    PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

    La pâte constituée de drêche broyée, de farine, d’huile de canola et d’épices, prête à être transformée en craquelins.

  • La pâte est prête à être passée au laminoir.

    PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

    La pâte est prête à être passée au laminoir.

  • Il faut laminer la pâte pour bien l’aplatir en une mince couche.

    PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

    Il faut laminer la pâte pour bien l’aplatir en une mince couche.

  • Les craquelins sont découpés à la main, mais une nouvelle machine automatisée se chargera bientôt de cette tâche.

    PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

    Les craquelins sont découpés à la main, mais une nouvelle machine automatisée se chargera bientôt de cette tâche.

  • Les craquelins, prêts à être enfournés

    PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

    Les craquelins, prêts à être enfournés

  • Et hop ! Au four pour une douzaine de minutes.

    PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

    Et hop ! Au four pour une douzaine de minutes.

  • Les craquelins sont prêts à être emballés.

    PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

    Les craquelins sont prêts à être emballés.

  • Le produit final

    PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

    Le produit final

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Avec ses craquelins Rebon (« parce que c’est bon à nouveau »), Patrick Mougin ne voulait pas seulement revaloriser un sous-produit alimentaire, il voulait aussi proposer un produit sain et gourmand, préparé avec un nombre limité d’ingrédients. La drêche de céréales comme l’orge, le riz, l’avoine ou le sarrasin demeure l’ingrédient phare des craquelins, auquel s’ajoutent de la farine, de l’huile de canola et, selon la variété, des épices, de l’ail, des graines de sésame ou de pavot. En tout, Rebon commercialise six variétés sans colorants ni additifs, avec des ingrédients 100 % d’origine végétale. En plus d’être distribué dans des supermarchés, des épiceries fines et des plateformes en ligne comme Lufa et Maturin, Rebon a aussi comme clients des CPE, qui achètent son produit en vrac, et espère séduire le milieu hospitalier et les résidences pour personnes âgées. Le prochain défi : se démarquer dans un marché où la concurrence est forte, ce que Rebon espère faire grâce à son produit identifié comme d’économie circulaire, à un prix raisonnable, soit 4,99 $ pour 150 g.

Notre avis

PHOTO HUGO-SÉBASTIEN AUBERT, LA PRESSE

Les craquelins Sésame noir et blanc

Cuits au four, les craquelins carrés Rebon sont très minces et craquants, sans être gras au toucher. Comme ils sont santé (peu de gras, de sel, bon apport en fibres…), on ne se sent pas coupable d’en manger plusieurs. Car oui, ils sont très bons au goût, particulièrement accompagnés de trempettes, de houmous ou de fromage. On a beaucoup aimé les variétés chipotle et pavot, l’inspiration bagel, le sésame noir et blanc. Un beau produit nutritif, pour toute la famille.

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