(Aurora, Ontario) On met le pied sur l’accélérateur dans la caravane libérale. Justin Trudeau multiplie les évènements dans la région de Toronto, samedi, dans l’espoir que les électeurs feront le « choix clair d’avancer ». Et s’il a refusé de spéculer sur son avenir politique, il a signalé qu’il n’a « même pas presque fini » les chantiers qu’il a entrepris.

Autre jour, autre sondage. Celui de la maison de sondage Léger publié samedi est venu s’ajouter à tous les coups de sonde qui laissent présager une course serrée jusqu’au fil d’arrivée. Les conservateurs y devancent les libéraux d’un petit point de pourcentage, à 33 % comparativement à 32 %. Mais comme il le fait depuis plusieurs jours, le premier ministre sortant n’a pas voulu se perdre en conjectures sur l’issue du scrutin.

Il a tout de même formulé le souhait que « suite à cette élection, le choix va avoir été tellement clair de la part des Canadiens d’avancer, d’en finir avec la pandémie » quand on lui a demandé combien de temps survivrait un hypothétique second gouvernement minoritaire libéral. Soit, mais s’agit-il de sa dernière campagne électorale en tant que dirigeant ?

Au départ, Justin Trudeau a répondu à cette question d’une journaliste en plaidant qu’il était concentré sur celle-ci jusqu’à la toute fin. Cependant, en répétant sa réponse en français, il a laissé entendre qu’il voulait rester aux commandes. « Je n’ai même pas presque fini toutes les grandes choses que j’ai l’intention de continuer à accomplir avec les Canadiens », a-t-il lancé.

On a encore beaucoup à accomplir ensemble, et moi, je suis extrêmement enthousiaste pas seulement pour les jours à venir, mais les années à venir ensemble.

Justin Trudeau, premier ministre sortant

O’Toole protège « ses antivaccins »

Par ailleurs, pendant cette conférence de presse aux allures de bilan, il s’est montré satisfait de la façon dont il a couru le marathon électoral. « On a mené une campagne positive », a-t-il dit. « Je n’ai pas attaqué Erin O’Toole personnellement », a-t-il offert au micro qui avait été installé dans la cour de sa candidate qui espère ravir un siège aux conservateurs dans Aurora—Oak Ridges—Richmond Hill.

La manchette du Globe and Mail a cependant fourni une nouvelle ligne d’attaque contre son rival, dont 85 % des candidats n’ont pas voulu dire s’ils étaient vaccinés. L’un d’entre eux a écrit à la journaliste qui a mené la démarche que les autorités nationales du Parti conservateur avaient sommé les candidats de ne pas répondre à cette question, ce qui est inacceptable, a tonné Justin Trudeau.

« Pourquoi [Erin O’Toole] leur demande-t-il de cacher leur statut vaccinal ? », a-t-il lancé à voix haute. « Il fait ça pour protéger les antivaccins de son caucus, s’est-il lui-même répondu. Il défend les libertés et les choix des antivaccins qui nous mettent tous à risque ».

À l’inverse, « moi, je suis là pour défendre les libertés de ceux qui ont fait la bonne chose et qui veulent retourner à l’école, au restaurant, voyager, prendre des vacances et me tenir debout pour ceux qui ont fait le choix de protéger leurs voisins », a poursuivi le chef libéral, accusant son adversaire d’avoir un « mauvais leadership ».

Le Bloc « ne ferait pas une différence » avec O’Toole

Le chef libéral a adapté à la sauce québécoise son appel au vote stratégique de la veille. En supposant qu’un vote pour le Bloc québécois contribue à l’élection d’un gouvernement conservateur, le rapport de force du Québec diminuerait à Ottawa, a-t-il argué, puisant dans ses souvenirs de l’époque où Gilles Duceppe tenait les rênes du parti pour étayer son argument.

« On [le Parti libéral] a été là pendant des années pour renverser des coupures de M. Harper que le Bloc n’a rien pu faire pour empêcher […] Gilles Duceppe et le Bloc défendaient la culture […] sans pouvoir pour une seconde convaincre M. Harper de ne pas couper », a argué Justin Trudeau.

Ce n’est pas le Bloc qui peut faire une différence si un gouvernement conservateur se fait élire.

Justin Trudeau, premier ministre sortant

Il répondait à une question sur la portion du débat en anglais où l’animatrice a établi un lien entre le racisme et la loi 21 sur la laïcité et le projet de loi 96 sur la langue française. Ce bref passage de la joute oratoire a redonné des ailes aux troupes bloquistes, dont le capitaine, Yves-François Blanchet, avait tenté auparavant d’imposer le thème de l’identité.

L’effet s’est fait ressentir dans les intentions de vote au Québec. Le coup de sonde réalisé par la firme Léger pour le compte du Journal de Montréal chiffrait à 32 % les intentions de vote pour le Bloc québécois contre 33 % pour le Parti libéral. Il y a quelques jours, dans une enquête menée par la même firme, les bloquistes étaient à 29 %.