Nous soulignons ces jours-ci le début du Mois des piétons. Le mois d’octobre n’a pas été choisi au hasard : il représente le mois où l’on remarque une augmentation des collisions et des morts chez les piétons. Et des morts, il y en a eu beaucoup, beaucoup trop dans les dernières années.

Alors que chaque décès de piéton est une mort de trop, les statistiques des 10 dernières années donnent le vertige : 645 personnes ont péri et plus de 26 000 autres ont été blessées, alors qu’elles marchaient, et ce, dans toutes les régions du Québec.

Souliers et vélos fantômes Québec l’a souligné lors d’une cérémonie commémorative le 12 septembre dernier, quand 645 paires de chaussures blanches ont été déposées à la mémoire de ces victimes de violence routière, autant de drames humains qui ne devraient laisser personne indifférent.

L’heure est au passage à l’action

Toutefois, il y a une lueur d’espoir. Au cours de la dernière année, nous avons vu une mobilisation sans précédent au Québec. Des groupes de la société civile et des citoyennes et citoyens se sont rassemblés pour dire « Ça suffit ! » et demander des actions concrètes pour améliorer la sécurité des piétonnes et des piétons.

Et les décideurs sont passés à l’action !

D’abord, à l’échelle municipale, on ne compte plus les municipalités qui ont annoncé des diminutions de vitesse et l’ajout de mesures d’apaisement de la circulation. Ensuite, à l’échelle nationale, la ministre des Transports et de la Mobilité durable a annoncé, en août dernier, le Plan d’action en sécurité routière 2023-2028, un plan ambitieux qui promet notamment de revoir la façon dont sont aménagées nos rues au bénéfice de la mobilité active.

C’est maintenant l’heure d’être cohérent et de les soutenir quand les changements surviendront, même lorsqu’ils se produiront devant notre domicile ou lorsqu’ils bouleverseront nos habitudes.

On ne fait pas d’omelette sans casser des œufs

Car, il faut se parler franchement : on ne fait pas d’omelette sans casser des œufs. Il y aura forcément des changements à nos habitudes de déplacement. Pour rétablir un équilibre entre tous les usagers de la route, il y en a qui « gagnent » et d’autres qui ont l’impression de « perdre », mais, au bout du compte, c’est toute la population qui en sortira gagnante.

Demandez aux populations des pays ayant pris les devants en matière de sécurité routière en misant sur des rues qui font une plus grande place à la mobilité active et collective. Personne ne souhaiterait revenir en arrière. Des vies ont été sauvées, la santé et la qualité de vie se sont améliorées et la circulation automobile y est même plus fluide qu’avant.

Après des décennies d’infrastructures conçues pour assurer principalement la fluidité des déplacements motorisés, il y a un énorme rattrapage à faire non seulement pour répondre aux besoins de sécurité et de confort des personnes qui se déplacent déjà à pied, mais aussi pour offrir des options de rechange de déplacements sécuritaires et efficaces à la population québécoise et contrer notre dépendance à l’auto solo.

Soyons cohérents

Bref, on commence à voir un consensus au Québec quant à cette nécessité d’agir. Mais ce consensus demeure fragile. S’indigner après la mort d’une personne et demander des actions, c’est bien. Mais nous ne réussirons à transformer nos milieux de vie et à améliorer le bilan routier que si nous sommes encore là pour appuyer les choix difficiles et parfois impopulaires que les décideurs auront inévitablement à faire lors de la mise en place de ces actions que l’on a pourtant demandées.

Alors, la prochaine fois que le conseil municipal de votre municipalité annoncera l’aménagement d’une mesure apaisant la circulation ou repartageant l’espace en faveur des déplacements actifs qui bouleverse vos habitudes, pensez à tous les enfants qui auront un cheminement sécurisé vers l’école ou à votre voisine âgée de 75 ans qui pourra alors marcher plus confortablement pour faire ses emplettes. Et affichez votre soutien à cette mesure.

Collectivement, nous avons le pouvoir d’éviter d’avoir à nous retrouver dans une cérémonie pour déposer 645 nouvelles paires de souliers blancs dans 10 ans…

Cosignataires : Séverine Le Page et Shanti Larochelle, porte-parole de Souliers et vélos fantômes Québec, et Jean-François Gagné, au nom du collectif Pas une mort de plus

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