L’intrépide Katak, au cœur du film d’animation Katak, le brave béluga, doit beaucoup à trois femmes de la région de Québec qui lui ont donné vie, chacune à leur façon. Compte rendu d’une rencontre virtuelle avec le trio féminin.

Nancy Florence Savard, fondatrice et présidente de 10e Ave Productions, a toujours cru que son entreprise établie dans la région de Québec pourrait rayonner dans le monde. Sa vision s’est concrétisée lorsque son quatrième film d’animation, Félix et le trésor de Morgäa, lancé en 2021, a été distribué dans plus de 170 pays et territoires. Katak, le brave béluga, qui fait son entrée au cinéma juste à temps pour la relâche scolaire, présente un potentiel tout aussi grand.

« Le film est ancré dans une situation géographique locale, mais il a une résonance universelle tant par l’histoire de Katak, qui est différent et subit de la discrimination à cause d’une situation physique sur laquelle il n’a pas le contrôle, que par son côté environnemental, puisqu’il a en trame de fond l’extinction et la préservation de la faune aquatique, indique la productrice. On montre à l’écran notre bout de province, et même un bout de notre Canada. La beauté, c’est que cela peut résonner dans bien des pays, dans bien des situations écologiques. »

ILLUSTRATION FOURNIE PAR 10E AVE PRODUCTIONS

Certains lieux sont aisément reconnaissables, comme Tadoussac.

La scénariste jeunesse Andrée Lambert, qui a collaboré à des séries télé bien connues comme Cornemuse, Toc Toc Toc et Salmigondis, lui avait soumis l’idée une première fois en 2006, mais il était trop tôt. Les astres se sont alignés en 2015 et Mme Lambert s’est plongée dans l’écriture de son premier scénario de film.

« Au départ, je voulais parler d’un enfant qui serait différent des autres, mais qui finirait par s’accepter et changer le regard des autres sur lui, explique la scénariste. Je ne savais pas si j’allais faire ça avec des humains ou des animaux. Puis un jour, sur mon voilier sur le fleuve, je suis arrivée à l’embouchure du fjord, en face de Tadoussac. Il y avait des bélugas autour de moi, c’était extraordinaire. J’ai alors décidé que mon histoire se passerait sur le fleuve, que mes personnages seraient des bélugas et que mon petit héros s’appellerait Katak, parce que c’est le nom de mon voilier. C’est un mot innu qui veut dire “loin au loin”. Le premier propriétaire du voilier, qui est de Natashquan, l’a appelé comme ça et on a gardé le nom. Je trouvais qu’il convenait bien à un petit béluga gris, qui allait partir de Tadoussac pour se rendre jusqu’à la grande banquise. »

De nombreux défis

Plusieurs premières caractérisent ce film d’animation, dont 99 % de l’action se passe sous l’eau. Il s’agit ainsi d’une première expérience en tant que réalisatrice pour Christine Dallaire-Dupont, qui a commencé sa carrière en animation il y a 18 ans, chez 10e Ave Productions. « On a tendance à être des coachs d’équipe, révèle Nancy Florence Savard, qui a vu à ce que la jeune femme soit bien préparée. On essaie de faire en sorte que nos athlètes passent d’un niveau à l’autre pour pouvoir atteindre leurs rêves. Quand le projet Katak est arrivé, Christine était prête à prendre les rênes du film avec Nicola Lemay, qui a réalisé Félix et le trésor de Morgäa. »

ILLUSTRATION FOURNIE PAR 10E AVE PRODUCTIONS

Le jeune béluga Katak se fait de nombreux amis lors de son périple, dont un épaulard, la sympathique Jack-Lynn, qui est (heureusement) végétarienne.

« Ce projet me parlait tellement que cela s’est fait naturellement, précise Mme Dallaire-Dupont. Tous ont suivi la vision que j’avais pour mettre en images le film. J’ai grandi à Baie-Sainte-Catherine. Tous les étés, j’ai marché sur les berges. Les bélugas, on les voyait venir au bord du quai. »

Donner vie à des bélugas a soulevé de nombreux défis, autant visuels que sonores.

On s’est rendu compte rapidement qu’il fallait réinventer tous nos réflexes de caméras, parce qu’on ne voulait pas dénaturer le béluga. On voulait qu’il reste un animal horizontal. Il a aussi fallu se gratter la tête pour le rendre attachant. Un béluga la bouche ouverte, c’est épeurant. La cadence du film, par ailleurs, est assez lente, parce qu’on a des animaux marins. On a voulu respecter cela.

Christine Dallaire-Dupont, coréalisatrice de Katak, le brave béluga

Nancy Florence Savard et le directeur artistique Philippe Arseneau Bussières, qui a imaginé les personnages et le décor, sont allés deux fois sur les lieux pour s’imprégner de la beauté des paysages. La seconde fois, pendant la pandémie, les deux réalisateurs ont fait partie de l’expédition.

Christine Dallaire-Dupont a réalisé son premier film d’animation en étant enceinte de son premier bébé, souligne la productrice, qui est une pionnière dans l’industrie de l’animation au Québec. « Beaucoup de son amour se ressent dans ce film, qui lui ressemble énormément, avec la notion de la natalité et de tout ce qu’il faut faire pour qu’un enfant puisse voir le jour, précise-t-elle. Christine a porté le film dans cet esprit-là. On sent tout l’amour qu’il y a à l’écran, grâce à son implication. »

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