Dans la petite ville de Troubtchëvsk, dans le sud-ouest de la Russie, Egor, camionneur tranquille, et Anna, tricoteuse douée, sont voisins. Et ils sont aussi amants. Lorsque leur histoire de cœur est découverte, ils doivent faire des choix. Alors qu’Anna quitte mari et fille, Egor est tiraillé à l’idée d’abandonner sa famille.

À Troubtchëvsk, dans les rues des Komsomols (Jeunesses communistes), règne le calme serein des campagnes endormies. Au chant du coq, le soleil se lève lentement au-dessus d’un hameau de maisons surannées. Seuls les véhicules témoignent d’une certaine modernité. Tel le gros camion d’Egor, où sont inscrites les lettres MAN sur la calandre.

Or, cet homme est adultère. Cet homme, qui embrasse sa femme venant lui porter son goûter avant de grimper derrière le volant de son mastodonte, s’en va rejoindre Anna qui l’attend, au bord de la route, à la sortie de la ville. Sa voisine va vendre ses tricots à Moscou où elle se rend soi-disant en autobus.

Tamara, femme d’Egar, et Iouri, mari d’Anna, ne se savent pas cocus. Jusqu’au jour, bien sûr, où tout bascule.

La vie s’écoule ainsi à Troubtchëvsk. Elle est lente, prévisible, répétitive, mais encore douce et même émaillée de quelques espoirs d’un futur meilleur. La colère, qui marquera la découverte du couple adultérin, succédera vite au désir fantasmé que les choses puissent s’arranger. Comme si on ne voulait pas bousculer la quiétude ambiante.

C’est pourtant une histoire de déchirements. Mais elle est tissée d’une douceur, d’une mélancolie, d’une langueur qui nous prend et nous berce. Les paroles sont mesurées. Chaque scène, chaque cadrage est soigné. Au cœur de l’histoire, Anna est lumineuse et bercée d’une belle assurance, alors que les autres personnages sont plus tristes, plus silencieux.

Lorsqu’Anna et Egor louent une maison au personnage d’Evdokia, le film bascule pratiquement dans le documentaire. Authentique babouchka sortie tout droit de l’ère soviétique, Evdokia se trouve en porte-à-faux avec tous les autres personnages. Mais elle est habitée d’une authenticité magique.

Parlant de l’ère soviétique, le film est truffé de références à cette période. Il y a Iouri, dans son champ, tenant une faux bien haut. Il y a une fête au village avec une table remplie de pommes de terre. Il y a ces anciens militaires bardés de décorations qui ont combattu les Allemands. Loin dans l’air, on entend les premières mesures de la célèbre chanson Casatchok. Et bien sûr, tout se passe dans cette rue des Komsomols.

Tant dans sa mise en scène que dans l’évolution de ses personnages, ce film magnifique n’est pas sans nous rappeler Honeyland de Tamara Kotevska.

Par ailleurs, comme le film homonyme d’André Brassard (compétition officielle, 1974), Il était une fois dans l’Est a été présenté à Cannes, dans la section Un certain regard, en 2019. Avec raison ! Cette œuvre est inoubliable.

En salle, en version originale russe avec sous-titres français.

Il était une fois dans l’Est

DRAME

Il était une fois dans l’Est

Larissa Sadilova

Avec Egor Barivov, Kristina Schneider, Iouri Kisseliov

1 h 20

8/10

Consultez l’horaire du film