On peut difficilement chasser les films de Jordan Peele de notre esprit tant ce premier long métrage de Remi Weekes se nourrit du même terreau. À la différence de Get Out et de Us, les codes traditionnels du film d’horreur sont cependant mis de l’avant aussi, particulièrement ceux liés aux histoires de maisons hantées.

Lancé plus tôt cette année au festival de Sundance (dans la section Midnight), His House, dont les droits d’exploitation mondiaux ont dès lors été acquis par Netflix, s’inscrit assurément dans le courant de ces longs métrages dont la nature frissonnante puise à même une réalité sociale dramatique.

La partie plus réaliste du récit, déjà très riche, est d’ailleurs la plus intéressante parce qu’elle peut emprunter plusieurs pistes. His House relate en effet le parcours de Bol (Sope Dirisu) et de sa femme Rial (Wunmi Mosaku). Ces derniers ont dû quitter, au péril de leur vie, leur village du Soudan du Sud pour trouver refuge en Grande-Bretagne. Leur fillette d’une dizaine d’années n’a d’ailleurs pas survécu au voyage.

Une fois arrivés au pays de Boris Johnson, Bol et Rial doivent évidemment se soumettre à un interrogatoire au bout duquel on leur accorde le statut de réfugiés temporaires. En attente d’une réponse à propos d’un statut de citoyenneté plus enviable, le couple doit se loger dans un appartement vétuste et insalubre fourni par l’État, situé dans un complexe on ne sait trop où. Il doit survivre aussi avec la maigre pension accordée, avec interdiction d’obtenir un emploi ou tout autre revenu supplémentaire. Des contrôles hebdomadaires obligatoires figurent aussi au programme, histoire de vérifier si Bol et Rial peuvent devenir de « bons » immigrants et s’intégrer à la société britannique. Là réside d’ailleurs l’une des contradictions d’un système qui tient à isoler les réfugiés, tout en les sommant de bien s’intégrer…

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Sope Dirisu et Matt Smith dans His House, un film de Remi Weekes.

Un appartement hanté…

Remi Weekes, qui a écrit le scénario de son film à partir d’une histoire imaginée par Felicity Evans et Toby Venables, deux nouveaux venus, évoque bien la situation de soumission absolue dans laquelle se retrouvent des gens venus d’ailleurs pour se refaire une nouvelle vie. Et dont la moindre plainte pourrait leur valoir une mauvaise note au dossier. « Mon appartement n’est même pas grand comme le vôtre ! », leur dit d’ailleurs l’un des travailleurs sociaux, quand Bol et Rial réclament un déménagement.

His House étant un film misant sur les codes du genre, le couple se retrouve ainsi coincé dans un appartement apparemment hanté. Weekes s’amuse à faire sursauter le spectateur avec des visions cauchemardesques inopinées, dont plusieurs évoquent les drames qu’a vécus le couple dans son pays d’origine et pendant la traversée. Est-ce assez pour satisfaire les amateurs purs et durs du genre ? Peut-être pas. Mais ces visions restent quand même ici au service d’une histoire ancrée dans une vraie réalité contemporaine. Avec un dernier acte plutôt surprenant.

AFFICHE FOURNIE PAR NETFLIX

His House

Soulignons, à cet égard, les excellentes performances de Sope Dirisu (The Huntsman : Winter’s War) et de Wunmi Mosaku (Fantastic Beasts and Where to Find Them). Les deux comédiens apportent toute leur humanité dans une histoire évoquant un monde assurément déficitaire à ce chapitre.

His House (Sa maison en version française) est offert sur Netflix.

★★★½

His House. Thriller de Remi Weekes. Avec Sope Dirisu, Wunmi Mosaku, Matt Smith. 1 h 33.