Rire des riches. L'idée n'est pas nouvelle, ni au cinéma ni chez Robert Morin, mais le cinéaste le fait avec un tel entrain, une telle liberté qu'on peut difficilement y résister.

La démarche d'Un paradis pour tous nous ramène à l'esprit débordant d'originalité de son chef-d'oeuvre de 1994 Yes sir! madame..., mais en plus léger. 

D'abord, Robert Morin a trouvé en Stéphane Crête un allié naturel, capable de lui donner à l'écran l'équivalent de l'esprit débridé du scénario.

Personnage à l'enfance difficile, comme il se doit, Jean-Guy Buster Simard défroque du ministère du Revenu où il pinçait des bandits à cravate afin de devenir un électron libre du fisc. Au contact d'une foule de personnages louches, il tourne des vidéos pour guider le public vers des techniques lui permettant d'épargner de l'impôt, comme les riches.

Mais le rebelle, aussi à cravate, s'apercevra en cours de route des difficultés inhérentes aux stratégies d'évitement fiscal et, après un coup d'argent facile, il perdra pratiquement jusqu'à ses bobettes.

Stéphane Crête incarne presque tous les personnages du film, à part une apparition en photo et sur la bande-son de Robert Morin lui-même. 

La performance du comédien vaut à elle seule le prix du billet après impôt. Stéphane Crête excelle autant en fonctionnaire blême qu'en bum coloré ou en banquier suisse.

Dans cette galerie de personnages loufoques, ce court long métrage multiplie les clins d'oeil: des plus fortunés parmi les Québécois en passant par des personnages rappelant Dolly Parton, Rabbi Jacob, Fu Manchu et pseudo Michel Côté dans Cruising bar.

Vive le mauvais goût!

L'humour va du noir au gras, du grivois au jaune, en passant par le bête et méchant. Bref, toutes les basses oeuvres sont exposées par les deux complices. Le mauvais goût en prend pour son rhume.

Robert Morin s'amuse à créer un long plan-séquence en début de film, de fausses scènes de poursuite, tout en se riant au passage du débat sur le black face, de certaines pratiques sexuelles dégradantes et des banquiers de tout acabit.

Un petit Morin, diront certains. Le lauréat du prix Albert-Tessier 2013 démontre, toutefois, que l'absence de moyens semble décupler son esprit d'invention et sa liberté créatrice.

Robert Morin a beau nous menacer de ralentir la cadence, on le croira quand il n'y aura manifestement plus de mine dans le crayon. Ce qui est loin d'être le cas, selon nous.

* * * 1/2

COMÉDIE. Un paradis pour tous. De Robert Morin. Avec Stéphane Crête. 1h16.

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IMAGE FOURNIE PAR LA COOP VIDÉO DE MONTRÉAL

Un paradis pour tous