Même s'il existe toujours un écart «important» entre les hommes et les femmes dans les fonctions clés des films «à gros budget» soutenus par Téléfilm Canada, les statistiques publiées lundi suggèrent que l'agence fédérale est sur la bonne voie d'atteindre son objectif de parité d'ici 2020.

Téléfilm avait annoncé ce plan l'an dernier, promettant de prioriser, à mérite égal, les projets de scénaristes féminines, de réalisatrices et de productrices. Depuis, 44% des productions financées par Téléfilm Canada ont une réalisatrice au générique, 46% une scénariste et 48% une productrice.

Ces statistiques encourageantes chutent toutefois lorsque les productions coûtent plus de 2,5 millions $: dans cette catégorie, seulement 29% des films étaient réalisés par une femme, 32% écrits par une scénariste et 44% produits par une femme. En revanche, 63% des documentaires ont été réalisés par des femmes, 75% ont été scénarisés et 44% ont été produits par des femmes.

Malgré les initiatives visant à promouvoir et à favoriser le talent féminin, la directrice de la promotion nationale et des communications à Téléfilm Canada affirme ne pas pouvoir expliquer pourquoi les femmes font toujours face à un plafond de verre en ce qui concerne les projets de films «à gros budget».

«C'est une question à un million de dollars, une question que posent les femmes qui dirigent depuis longtemps la télévision à gros budget, et c'est ce que nous demandons aujourd'hui à l'industrie», explique Francesca Accinelli, ajoutant que ce n'est pas dû à une pénurie de réalisatrices. «Nous avons découvert que nous ne recevions pas de projets (des femmes), alors nous les avons sollicités.»

Ainsi, Sophie Deraspe (Le Profil Amina) a écrit et vient de réaliser Antigone, adaptation personnelle et contemporaine du mythe grec de Sophocle.

«Nouveaux incitatifs»

«Ces résultats sont encourageants, un changement positif s'opère, toutefois les films à plus gros budget représentent le défi le plus important, puisque l'écart est significatif», a admis Jean-Claude Mahé, directeur général par intérim de Téléfilm Canada.

«Nous avons besoin de la collaboration de l'industrie afin d'augmenter le nombre de projets de femmes dans cette catégorie. C'est pourquoi (...) nous étudions présentement la possibilité de mettre en place de nouveaux incitatifs afin d'augmenter, dès cette année, le nombre de projets provenant des femmes et ayant des budgets supérieurs à 2,5 millions $.»

Selon les données publiées lundi par Téléfilm - dans le cadre de la réunion du comité de direction d'Eurimages, le Fonds culturel du Conseil de l'Europe, qui a lieu cette semaine à Montréal - l'ensemble des fonds distribués favorisait toujours les projets des hommes pendant le plus récent exercice financier, du 1er avril 2017 au 31 mars 2018.

Seulement un quart des fonds de Téléfilm ont été affectés à des projets de réalisatrice, tandis que 29% des fonds ont appuyé les projets d'une scénariste et 36% d'une productrice. Mme Accinelli indique que ces chiffres s'expliquent par la présence moins marquée de femmes dans des films à plus gros budgets - plus de 2,5 millions $. Bien que seulement 34 projets sur 124 (soit 27%) entrent dans cette catégorie, ils drainent près de 52 millions $ des 73 millions $ distribués par Téléfilm (71%).

Les films «à gros budget» réalisés par une femme n'accaparaient que 18% du financement de Téléfilm, alors que ceux scénarisés par une femme obtenaient 21% des fonds, et ceux produits par une femme 31% des sommes allouées par l'agence fédérale.

Les films qui coûtent moins de 2,5 millions $ constituent la plus grande catégorie de projets de Téléfilm, avec 57 titres. Or, là encore, Téléfilm se situe en «zone de parité» : 42% de ces titres ont été réalisés par une femme, 40% scénarisés par une auteure et 47% ont été produits par une femme.