L'adaptation de la pièce de théâtre King Dave pour le cinéma sera filmée en un unique plan-séquence de 80 à 90 minutes, ont indiqué à La Presse les concepteurs du projet.

Écrite et interprétée par Alexandre Goyette, la pièce est actuellement reprise au théâtre Prospero où elle est née en 2005. Au cinéma, le projet sera réalisé par Podz et produit par Nicole Robert (Go Films). Le scénario est complété et on attend son financement à la production.

«C'est un projet très excitant, puissant, mais aussi épeurant, lance Podz en évoquant sa singularité. Ce qui est très important pour moi est de conserver la qualité du scénario, des monologues et des dialogues. Il ne faut pas que les effets de style submergent l'histoire.»

King Dave est une pièce solo dans laquelle Goyette nous entraîne dans le monde de David Morin, jeune frondeur qui s'enfonce dans une spirale de violence. Dans ce monde de gangs de rue, de vols, de mots crus et d'agressions, Dave en viendra à commettre l'irréparable.

«J'ai grandi à Montréal-Nord et Rivière-des-Prairies et Dave est peut-être ce que je suis devenu dans une autre dimension, dit Alexandre Goyette. Dans ma jeunesse, j'ai vu ce que pouvait être le cercle de la violence qui exprime, souvent, la peur de plein de choses. Je me suis mis à écrire en pensant à cela. En tant qu'acteur, mon défi était de montrer aux spectateurs que Dave n'est pas un mauvais gars.»

Nicole Robert, qui est à la tête du projet cinématographique depuis plusieurs années, indique avoir été littéralement happée par le texte et les propos qu'elle qualifie d'hallucinants. «La façon dont Alexandre raconte l'histoire de Dave, un gars ordinaire qui se fait prendre dans le réseau des gangs de rue, est ce qui m'a le plus touchée, dit-elle. En général, je ne suis pas ''théâtre''. Mais ça, c'était hors de l'ordinaire. Cheech, que j'ai aussi produit au cinéma, et King Dave sont parmi les pièces marquantes que j'ai vues dans les dix dernières années.»

Dans la pièce, Goyette joue tous les personnages du récit. Mais au grand écran, cela était impossible. Comment alors conserver l'essence? En filmant Goyette (David) dans un seul plan-séquence où il se déplacera d'un décor à l'autre, en studio et à l'extérieur, croisant au passage des personnages qui lui donneront la réplique.

Ce sera, disent les concepteurs, la meilleure façon de ne pas casser le rythme original ressenti sur les planches.

D'ordinaire, un tournage au Québec dure entre 20 et 35 jours. Dans le cas présent, la façon de faire sera différente. Il y aura quelques mois de préparation, environ deux semaines de répétition et cinq jours de tournage. À raison d'un plan-séquence par jour.

Un défi

Ce n'est pas la première fois dans l'histoire du cinéma qu'un film propose un seul plan-séquence. Hitchcock l'avait presque réussi avec La corde et Sokourov avec L'arche russe, indique Podz. Au Québec, David La Haye avait coréalisé avec un microbudget le film J'espère que tu vas bien avec un seul plan-séquence dans les rues du Plateau Mont-Royal. Il prépare d'ailleurs une suite.

Dans le cas de King Dave, il y aura construction de décors, installation de plusieurs caméras sur le parcours du personnage, etc. «Ce sera sportif. On va tous fermer et embarrer nos cellulaires avant de commencer le tournage de la journée», lance Alexandre Goyette.