(Paris) Les cinéphiles en rêvaient : Francis Ford Coppola revient en compétition au Festival de Cannes avec Megalopolis, 45 ans après sa deuxième Palme d’or pour Apocalypse Now (1979), selon la sélection officielle dévoilée jeudi.

« Nous sommes ravis qu’il nous fasse l’honneur de venir présenter ce film », a commenté devant la presse Thierry Frémaux, délégué général du festival.

Le géant du cinéma, 85 ans, avait décroché sa première Palme d’Or avec Conversation Secrète en 1974.  

Les épithètes manquent pour qualifier Megalopolis, film hors norme au budget de 100 millions de dollars. Les rumeurs les plus folles courent sur une distribution emmenée par Adam Driver, avec Jon Voight, Laurence Fishburne, Shia LaBeouf et Dustin Hoffman.

Le sujet du film reste pour l’heure vague, autour de la destruction d’une mégalopole qui ressemble à New York et une reconstruction qui se joue entre un architecte et le maire de la ville.

La presse américaine évoque un film testamentaire et le compare déjà à Citizen Kane d’Orson Welles (1941), considéré comme un des plus grands films de l’histoire du cinéma.  

Trump, Limonov, Marcello…

La cuvée 2024 est plus qu’attendue après la belle histoire de la Palme d’Or 2023, Anatomie d’une chute de Justine Triet, sacré en mars aux Oscars (meilleur scénario). « L’édition 2024 sera à la hauteur », a assuré la présidente du Festival Iris Knobloch, en conférence de presse.  

Thierry Frémaux n’a dévoilé que 19 films en compétition sur la vingtaine attendue d’ordinaire. Des longs métrages seront sans doute annoncés ultérieurement.

Francis Ford Coppola n’est pas le seul lauréat d’une Palme d’Or à retrouver la compétition. Jacques Audiard (Palme d’Or 2015) retrouve La Croisette avec Emilia Perez, croisement du polar et de la comédie musicale sur fond de narcotrafic au Mexique, avec les stars Selena Gomez et Zoe Saldaña.

PHOTO VIANNEY LE CAER, ARCHIVES INVISION, FOURNIE PAR ASSOCIATED PRESS

Zoe Saldaña

Du côté des poids lourds, David Cronenberg intègre aussi la compétition avec Les Linceuls, film de deuil porté par Diane Kruger et Vincent Cassel. Paul Schrader retrouve son acteur Richard Gere (comme pour American Gigolo) pour Oh Canada, sur un homme condamné par la maladie. The Apprentice, qui parle du jeune Donald Trump, fait saliver avec Ali Abbasi derrière la caméra (Border).

Le cinéaste russe en exil Kirill Serebrennikov, autre habitué de Cannes, présentera son Limonov tiré du livre du Français Emmanuel Carrère.

Tout juste auréolée d’un deuxième Oscar, Emma Stone concourra dans Kinds of Kindness de Yorgos Lanthimos.

Marcello Mio de Christophe Honoré, évoquera Marcello Mastroianni (disparu en 1996) à travers sa fille Chiara, dans un film aux côtés de sa mère Catherine Deneuve.

La Belle De Gaza

Parmi les absents notables de la compétition, il faut citer Emmanuelle, nouvelle adaptation par Audrey Diwan de ce classique de l’érotisme, avec Noémie Merlant. Mais peut-être le film sera-t-il repêché plus tard.

À propos des réalisatrices, il n’y en a que quatre en compétition, loin du record de l’an dernier, à 7.

« Il faut une demi-décennie pour juger d’une tendance, il y a tout de même quatre réalisatrices, ne l’oublions pas. La tendance est qu’il y a de plus en plus de réalisatrices dans le monde. Nous publierons bientôt une étude là-dessus, qu’il y a beaucoup plus de réalisatrices dans la sélection officielle qu’il n’y en a, en pourcentage, dans le reste du monde », a estimé Thierry Frémaux. .  

Pour les angles politiques, il faut jeter un œil aux séances spéciales, hors compétition, avec La Belle De Gaza, de la documentariste Yolande Zauberman, qui suit la trajectoire de transgenres palestiniens, et L’invasion du cinéaste ukrainien Sergei Loznitsa.

D’autres têtes d’affiche étaient déjà connues : Greta Gerwig, réalisatrice de Barbie, présidera le jury. Et George Lucas, 79 ans, père de la saga Star Wars, recevra une Palme d’or d’honneur lors de la cérémonie de clôture.

PHOTO MICHAEL TRAN, ARCHIVES AGENCE FRANCE-PRESSE

Greta Gerwig

Kevin Costner, de retour au western, a gagné son ticket, hors compétition, tout comme Furiosa, nouvel épisode de Mad Max de George Miller, montera les marches avec ses stars Anya Taylor-Joy et Chris Hemsworth.

L’ouverture, hors compétition également, reviendra à Quentin Dupieux, maître du décalage, avec Le deuxième acte, réunissant Léa Seydoux et Vincent Lindon.

Et Camille Cottin, révélée par la série Dix pour cent et vue depuis chez Ridley Scott, sera la maîtresse des cérémonies d’ouverture et de clôture.  

Les 19 films en lice pour la Palme d’Or

Du retour de Francis Ford Coppola, 45 ans après sa deuxième Palme d’or, à l’entrée en compétition du Français Gilles Lellouche en passant par un film sur Trump : voici les 19 films en lice pour la Palme d’Or au 77e Festival de Cannes :

The Apprentice d’Ali Abbasi

Après Border et Les nuits de Mashhad, le réalisateur danois d’origine iranienne se penche sur les jeunes années de Donald Trump, bâtissant un empire immobilier dans les années 70-80.

Motel Destino de Karim Aïnouz

À l’affiche avec Le jeu de la reine, en compétition l’an dernier à Cannes, le Brésilien est parti dans le Nordeste pour tourner une « comédie sexuelle » centrée sur le désir.

Bird d’Andrea Arnold

Double actualité pour la cinéaste britannique. Réputée pour dynamiter les films sociaux, elle recevra le Carrosse d’or, sacrant chaque année à Cannes un réalisateur/réalisatrice faisant preuve d’audace et d’innovation. Et Andrea Arnold présentera son nouvel opus porté par le duo Barry Keoghan et Franz Rogowski.

Emilia Perez de Jacques Audiard

Palme d’or en 2015, le Français revient avec un film au croisement du polar et de la comédie musicale sur fond de narcotrafic au Mexique, avec une distribution cinq étoiles portée par Selena Gomez et Zoe Saldaña.

Anora de Sean Baker

Figure du cinéma indépendant, le réalisateur américain de The Florida Project suit le parcours d’une travailleuse du sexe entre New York et Las Vegas.

Megalopolis de Francis Ford Coppola

Les épithètes manquent pour ce film, peut-être le plus attendu de la compétition, au budget de 100 millions de dollars, autour de la destruction et reconstruction d’une mégalopole. Avec Adam Driver.

Les linceuls de David Cronenberg

Le roi du gore viscéral imagine un système permettant aux vivants de se connecter à leurs disparus dans un film sur la perte des êtres chers, avec Vincent Cassel et Diane Kruger.

The substance de Coralie Fargeat

La Française qui avait réalisé le bien nommé Revenge en 2018 orchestre le retour au premier plan de Demi Moore pour un film gore assumé, avec beaucoup de sang sur l’écran, nous promet-on.

Grand tour de Miguel Gomes

Le Portugais, réalisateur de Tabou en 2012, imagine un fonctionnaire britannique installé en Birmanie en 1917, délaissant sa fiancée pour partir faire un « grand tour » de l’Asie.

Marcello Mio de Christophe Honoré

Marcello Mastroianni (disparu en 1996) évoqué à travers sa fille Chiara, aux côtés de sa mère Catherine Deneuve et de ses proches, Benjamin Biolay et Melvil Poupaud.

Caught by the tides de Jia Zhang-Ke

Le maître chinois livre une épopée filmique inédite qui traverse tous ses films et 25 ans d’histoire d’un pays en pleine mutation, avec sa muse et épouse à la ville, Zhao Tao.

All we imagine as light de Payal Kapadia

La réalisatrice filme les désirs de deux femmes en Inde, dont une infirmière de Bombay empêtrée dans un mariage arrangé.

Kind of Kindness de Yórgos Lanthimos

Le réalisateur grec retrouve son actrice fétiche Emma Stone, auréolée d’un deuxième Oscar pour Pauvres créatures. Elle incarne une femme revenant pas tout à fait la même d’une disparition en mer.

L’amour ouf de Gilles Lellouche

Après le succès du Grand bain, présenté hors compétition, l’acteur français conte l’épopée amoureuse d’un couple insubmersible qui se rencontre au lycée, incarné par François Civil et Adèle Exarchopoulos.

Diamant Brut d’Agathe Riedinger

Premier film de la Française, sur les rêves et utopies d’une adolescente sous le soleil poussiéreux de Fréjus, perdue dans les méandres des réseaux sociaux.

Oh Canada de Paul Schrader

Uma Thurman et Richard Gere au cœur d’un film adapté d’un livre de Russell Banks. Un célèbre documentariste canadien, condamné par la maladie, accorde une ultime interview à l’un de ses anciens élèves, pour dire enfin toute la vérité sur ce qu’a été sa vie. Une confession filmée sous les yeux de sa dernière épouse…

Limonov, la ballade d’Eddie de Kirill Serebrennikov

Après La femme de Tchaïkovski, le cinéaste russe en exil s’intéresse à l’écrivain et dissident politique russe Edouard Limonov, incarné par Ben Whishaw dans une adaptation du roman d’Emmanuel Carrère.

Parthenope de Paolo Sorrentino

Le réalisateur de La Grande Belleza filme les amours impossibles d’une jeune femme, avec, comme décor, Naples, « ville qui ensorcelle, enchante, hurle, rit et peut nous faire mal » selon le synopsis.

The girl with the Needle de Magnus Von Horn

Un film d’époque sur l’histoire de Dagmar Overbye qui a assassiné des dizaines de nourrissons à Copenhague dans les années 1910 et a été condamnée à la prison à vie. Par le réalisateur suédois de Sweat (2020).