Engagées dans la transformation complète de leur gamme et menacées par de jeunes pousses, les marques Audi, BMW, Cadillac et Volvo jouent gros ces jours-ci. Elles osent un pari dont il n’est pas dit que toutes le relèveront avec succès.

L’IAA Mobility de Munich ne ressemble guère à l’idée que l’on se fait d’un salon automobile traditionnel. Loin de là. Ici, l’automobile ne se trouve pas au cœur de cette manifestation. Celle-ci consacre autant d’espace aux vélos, trottinettes et autres moyens de déplacement doux pour l’environnement. Mais la région métropolitaine de Munich, c’est aussi le fief de BMW et d’Audi (Ingolstadt). Deux constructeurs qui révèlent, pour la première fois, d’importantes avancées, lesquelles auront un impact important sur leur avenir et ceux des groupes auxquels ils appartiennent.

Il y a des mois, voire des années, que BMW attendait ce moment pour (ré)introduire la « Neue Klasse » ; une appellation jadis utilisée dans les années 1960 et 1970 et qui fait en quelque sorte référence au canevas dans lequel BMW taille plusieurs familles de modèles.

En révélant la Vision Neue Klasse, BMW donne un avant-goût précis du moule dans lequel toutes les BMW seront faites dès 2025. Celui-ci fusionnera propulseur électrique, numérisation et économie circulaire. Comme simplifier au maximum les matériaux en faisant en sorte que la lumière forgera à l’avenir l’identité d’un modèle et non la complexité de sa carrosserie.

Cette dernière, par ailleurs, n’a rien de révolutionnaire, mais BMW défend son choix de ne pas brusquer sa clientèle avec un design trop « futuriste ». À défaut de montrer à l’extérieur la révolution qu’elle porte à l’intérieur, cette « Neue Klasse » ne manque pas d’ambition. Son architecture électrifiée promet d’offrir une autonomie accrue grâce notamment à la mise au point d’une batterie dont le dessin des cellules (ovoïdes) augmente de 20 % la densité énergétique et améliore l’autonomie (+30 %). Un gain qui s’ajoute à d’autres, tout aussi impressionnants, dans le domaine de la rapidité de la recharge (+30 %) et de l’efficacité logicielle. Beaucoup de chiffres à confirmer.

PHOTO ÉRIC LEFRANÇOIS, COLLABORATION SPÉCIALE

Audi a terminé les tests de validation du futur Q6 e-Tron dans les îles Féroé en compagnie de représentants de la presse en juillet dernier.

Chez Audi, le contenu prend là aussi l’ascendant sur le contenant. Même enrubanné comme il l’était, il y a quelques semaines dans les îles Féroé où nous l’avons essayé, le Q6 e-Tron, c’est clair, se fond complètement dans le langage formel de la marque aux anneaux. Le frisson de l’innovation se trouve ailleurs. Dans la signature lumineuse par exemple qui, cette fois, va bien au-delà des guirlandes et fantaisies du même genre auxquelles les constructeurs nous ont habitués jusqu’ici. Dans le cas du Q6 e-Tron, les feux arrière sont dotés de six panneaux DELO capables de générer une nouvelle image toutes les 10 millisecondes. Et parmi ces images, on retrouve notamment des pictogrammes inspirés de la signalisation routière. Ceux-ci permettent de communiquer avec les autres usagers de la route dans le but de les prévenir d’une situation potentiellement dangereuse (panne, accident ou portière qui s’ouvre, etc.).

Mais l’importance que revêt le Q6 e-Tron se trouve ailleurs que dans sa signature lumineuse. Cet utilitaire, dont la commercialisation doit débuter à l’automne en Europe, sera en effet le premier véhicule à étrenner une toute nouvelle architecture électrique de 800 volts (nom de code PPE). Celle-ci intégrera plusieurs nouvelles fonctionnalités, dont une capacité de recharge de 270 kW et une autonomie présumée de plus de 700 km (norme WLTP). Celle-ci profitera ensuite à l’ensemble des marques du groupe Volkswagen (VW), dont Porsche, qui l’utilisera notamment pour son futur Macan électrique. Pour Audi, il s’agit d’un test important. Bonnes ou mauvaises, la performance et la fiabilité de cette plateforme pourraient avoir un impact important sur les objectifs que s’est fixés Audi d’ici 2030. Et plus encore sur le projet Artemis (la plateforme PPE la préfigure) dont la date de sortie est constamment reportée par le groupe VW.

PHOTO FOURNIE PAR CADILLAC

Une semaine avant son lancement officiel et public à New York, Cadillac a révélé, à Detroit, les principaux attributs de l’Escalade IQ à un petit groupe de journalistes.

La taille n’influence pas les gros prix

À 6946 kilomètres de Munich, la direction de Cadillac a aussi une importante carte à jouer en électrifiant son modèle-phare, l’Escalade. Plus ramassé, plus aérodynamique et surtout plus écologique, cet Escalade IQ aura très certainement une diffusion très limitée (130 000 $ US, imaginez maintenant en dollars canadiens), mais l’important est ailleurs. Cadillac court après son glorieux passé depuis un certain temps déjà et l’Escalade IQ, plus que tout autre modèle de sa gamme actuelle, pourrait lui permettre de valoriser son héritage. Et démontrer aussi que la marque ne se trouve aucunement déstabilisée par l’électrification. Bien que l’Escalade IQ ait plusieurs points en commun avec le Hummer EV (architecture, fonctionnalités, motorisations, etc.), Cadillac entend toutefois prouver que les véhicules électriques de demain ne seront ni interchangeables, ni muets, ni sans odeur, ni saveur. D’ailleurs, Cadillac prépare déjà une suite avec une version allongée (ESV IQ) et une autre, de performances, pour enrichir sa filiale V.

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C’est au Centre des sciences de Montréal que Volvo a présenté, il y a quelques jours, le EX30 en avant-première canadienne.

L’Escalade IQ se veut, pour les moins nantis du moins, une carte de visite et une démonstration de force technologique. Il en va tout autrement de l’EX30 de Volvo présenté il y a une dizaine de jours au Centre des sciences de Montréal. Ce nouveau ticket d’entrée de la marque sino-suédoise invitera les consommateurs à manifester leur intérêt (en effectuant un dépôt de réservation) cet automne. Les premières livraisons débuteront au cours du deuxième trimestre 2024.

Ce modèle en devenir qui prendra naissance en Chine repose sur une architecture électrique inédite. Alimenté par une batterie de 69 kWh, que l’EX30 prétend parcourir 443 kilomètres sur une pleine charge dans sa configuration à deux roues motrices (propulsion). Innovant, fonctionnel et « funny fun fun » comme dirait le comédien Marc Labrèche, ce véhicule électrique urbain exige un débours plus élevé que certains l’imaginaient. Invité par la direction de Volvo à deviner le prix de départ avant son annonce, l’ensemble de journalistes présents à l’avant-première a parié dans une fourchette de prix comprise entre 37 000 $ et 49 000 $. Mauvaise réponse. Le prix de départ est fixé à 53 700 $.