Fabriquer une batterie d’auto électrique requiert plus de 60 kg de minéraux difficiles à extraire. En amont, à tout le moins, la voiture verte n’est pas sans impact environnemental.

Mais des percées récentes dans le recyclage réduisent son empreinte écologique, comme on le voit chez le recycleur de batteries américain Redwood Materials.

L’extraction minière de la matière première et son raffinage nécessitent d’énormes quantités d’énergie. Donc, l’empreinte carbone d’un véhicule électrique à sa sortie de l’usine dépasse celle d’un véhicule traditionnel comparable. Ces émissions initiales sont compensées au fil du temps par l’efficacité supérieure du moteur électrique. Résultat : une réduction de 70 % des émissions totales sur la durée de vie moyenne du véhicule.

Moins d’émissions après 41 000 km

Aux États-Unis, le seuil où un véhicule électrique devient plus propre (en émissions de CO2) qu’un véhicule traditionnel est à environ 41 000 km, selon BloombergNEF. Mais ce calcul présume que sa batterie a été fabriquée avec du lithium, du nickel et du cobalt nouvellement extraits, comme si tous ces métaux précieux finissaient au dépotoir quand le véhicule électrique est envoyé à la casse. Mais ce n’est pas le cas. La nouvelle industrie du recyclage récupère les batteries.

PHOTO GABRIELLA ANGOTTI-JONES, THE NEW YORK TIMES

Un employé s’apprête à déboulonner la batterie lithium-ion d’un véhicule électrique dans une usine du recycleur LKQ à Adelanto, en Californie.

Le recyclage de l’auto électrique, né tout récemment, est déjà rentable et récupère plus de 95 % des principaux métaux. Selon une étude de l’Université Stanford (encore évaluée par un comité de lecture), le procédé de recyclage de Redwood Materials produit jusqu’à 80 % de moins de CO2 que la chaîne d’approvisionnement traditionnelle. Cela ramènerait à moins de 15 000 km le seuil de « zéro émission nette » d’un véhicule électrique par rapport à son équivalent mû par un moteur à combustion interne. Au-delà de 15 000 km, chaque kilomètre parcouru est un gain.

Carboneutre plus vite au Québec

L’évaluation complète de l’avantage électrique dépend du type d’énergie utilisée pour fabriquer la batterie et recharger le véhicule. Une électricité plus propre – comme l’hydroélectricité du Québec – augmente cet avantage, mais même là où l’électricité provient du charbon, le véhicule électrique finit par l’emporter.

L’essor des énergies renouvelables rendra l’auto électrique encore moins polluante. Selon l’Agence internationale de l’énergie, la production d’énergie solaire mondiale est en hausse record depuis 22 années consécutives et semble s’accélérer.

En 2030, l’année où les deux tiers de l’électricité américaine devraient provenir de sources sans carbone, un véhicule électrique construit à partir de matériaux recyclés pourrait atteindre le seuil de zéro émission nette relatif en quelques mois.

Selon l’étude de Stanford, le recyclage des batteries consomme 79 % moins d’énergie et émet 55 % moins de CO2 que le raffinage traditionnel. En plus, le recyclage se fait localement, tandis que les métaux de première extraction font le tour du monde. Boucler la boucle réduirait le CO2 de 80 %.

PHOTO NINA RIGGIO, THE NEW YORK TIMES

Un employé de Redwood Materials en train de démonter la batterie d’un véhicule électrique Ford. Pour capter pleinement le potentiel de recyclage des composants et métaux, il faudra simplifier le design des batteries.

Selon l’ingénieur chimiste Will Tarpeh, qui enseigne à Stanford et a cosigné l’étude, l’avantage du recyclage commence à peine à se faire sentir : les véhicules électriques sont récents et seul un petit nombre a été envoyé à la casse.

Pourtant, on prévoit que le nombre de batteries lithium-ion recyclées en 2024 devrait être le double de toutes celles qui ont été fabriquées en 2014. Pour établir le bilan environnemental des véhicules électriques, il faut désormais mesurer l’empreinte nette des matériaux utilisés, car le recyclage aura un impact grandissant.

L’essor du recyclage amène défis et possibilités. Il sera crucial de simplifier la conception des batteries, estime M. Tarpeh.

Les procédés actuels s’adaptent au design actuel des batteries. « On fait du rattrapage par rapport aux batteries déjà fabriquées, explique M. Tarpeh. Peu de concepteurs tiennent compte de la recyclabilité quand ils élaborent la chimie des batteries, mais d’après moi, ça commence à changer. »