Le Théâtre Denise-Pelletier revisite ce grand classique du théâtre nord-américain, dans une mise en scène d’Alexia Bürger, avec un jeune acteur noir, Fabrice Yvanoff Sénat, dans le rôle de Tom, l’alter ego de Tennessee Williams.

« Tennessee Williams dit qu’on se ment souvent soi-même pour vivre, voire survivre… Éventuellement, notre vie devient ce mensonge. Et le travail d’un auteur, c’est d’exposer ce mensonge-là… sans le juger. »

En quelques mots, Alexia Bürger résume ainsi le théâtre, la philosophie et la sensibilité de l’auteur d’Un tramway nommé Désir. Si on a l’habitude de la voir monter des créations au théâtre, on est heureux de la retrouver du côté des classiques avec cette nouvelle mise en scène.

Alexia Bürger nous confie avoir (re)découvert le texte de Tennessee Williams : « J’ai été fascinée par la forme ouverte, poétique, symbolique de la pièce. J’avais gardé en tête, quand je l’ai lue plus jeune, une pièce très naturaliste. Dans le monologue d’ouverture, le narrateur [Tom] annonce que la pièce porte sur la mémoire. On ne peut pas se contenter des codes naturalistes pour l’aborder. »

[Tennessee Williams] a aussi un amour et une compréhension de la psyché féminine que j’ai rarement vus dans l’œuvre d’un homme… Sauf chez Michel Tremblay ou Stefan Zweig.

Alexia Bürger

Produite régulièrement au Québec, souvent adaptée au cinéma, La ménagerie de verre est le premier succès de Tennessee Williams. Écrite en 1943, créée l’année suivante et largement autobiographique, la pièce se déroule dans un modeste logement d’un quartier ouvrier de St. Louis, durant la Grande Dépression.

Passé composé

PHOTO FRANÇOIS ROY, LA PRESSE

Alexia Bürger et Fabrice Yvanoff Sénat

Amanda (Marie-Hélène Thibault) vit seule avec ses deux enfants : Laura (Élisabeth Smith), qui souffre d’un handicap ; et Tom, qui cherche à fuir sa famille. Son mari travaille pour une compagnie de téléphone et l’a quittée, « trop amoureux des longues distances », ironise Amanda. La femme entretient ses illusions et ses rêves de jeunesse, en tentant de retenir ses enfants et les choses qui la rattachent à ses souvenirs, son passé idyllique. Elle vit dans le constant déni du présent.

« Ça parle des blessures du passé, du sentiment d’abandon. Je trouve que c’est un spectacle intéressant à présenter à des jeunes, parce que ça aborde la nécessité de quitter sa famille pour s’émanciper et vivre sa vie. Mais aussi de la douleur et du déchirement venant avec ce choix », dit Bürger, qui signe sa première mise en scène au Théâtre Denise-Pelletier (TDP).

Jouer Tom en 2024

Dans la production du TDP, Tom est défendu par Fabrice Yvanoff Sénat, un jeune acteur noir qui a étudié au Conservatoire de Montréal. Claude Poissant l’a suggéré à la metteure en scène. C’est un « colour blind cast », une convention théâtrale. « On n’explique pas pourquoi Amanda a un fils noir, dit le comédien. Mais Tom a déjà l’impression de ne pas appartenir à son milieu, à sa famille. »

Il ajoute que durant ses études en jeu, il trouvait ça difficile de se projeter dans les grands personnages classiques.

Bien que les sujets des classiques soient universels, pour une personne de couleur, ce n’est vraiment pas notre réalité, et on a de la difficulté à se reconnaître dans les héros du répertoire. Sauf peut-être Roméo et Juliette.

Fabrice Yvanoff Sénat

Si on lui avait dit qu’il allait jouer le personnage alter ego de Williams, il ne l’aurait pas cru : « Dans ma tête et avec mon vécu, Tom n’aurait jamais pu être moi ou une personne de la diversité. Mais en travaillant cette production, je vois qu’on peut dépoussiérer les classiques, les aborder autrement pour intéresser les diverses communautés. Ça ne veut pas dire de mettre des personnes de couleur dans un spectacle juste pour mettre des personnes de couleur », dit-il.

Selon l’acteur, les directions artistiques ont une responsabilité de saisir l’air du temps. « Si, en 2024, une compagnie lance une programmation sans aucun interprète de couleur, elle envoie un drôle de message. On a le droit de le faire, bien sûr, mais ça représente une vision uniquement blanche de la société dans laquelle tu vis. »

Du 12 mars au 9 avril, au Théâtre Denise-Pelletier

Consultez la page de la pièce

À surveiller

La mouette

PHOTO JODI HEARTZ ET ALEX BLOUIN, FOURNIE PAR LE THÉÂTRE PROSPERO

Madeleine Sarr sera Nina dans la production de La mouette mise en scène par Catherine Vidal.

La metteure en scène Catherine Vidal s’attaque à un grand classique du théâtre, La mouette d’Anton Tchekhov, adapté pour l’occasion par Guillaume Corbeil. Pour ce brillant (voire infernal) drame de mœurs aux accents de conflit intergénérationnel, elle dirige une distribution tout étoilée dans laquelle brillent Madeleine Sarr, Renaud Lacelle-Bourdon, Igor Ovadis et Mattis Savard-Verhoeven. Cette production est l’aboutissement de deux ans de travail et de recherche effectués au Centre national des arts, où la pièce sera de passage en avril. Un conseil : faites vite, car les billets s’envolent. Au Théâtre Prospero, du 12 au 30 mars.

Consultez la page du spectacle

Stéphanie Morin, La Presse

Cispersonnages en quête d’auteurice

PHOTO THIBAULT CARRON, FOURNIE PAR ESPACE LIBRE

Cispersonnages en quête d’auteurice raconte l’histoire d’une troupe de théâtre en pleine création collective.

La compagnie Joe Jack et John, qui compte parmi ses collaborateurs des artistes professionnels ayant un handicap cognitif, propose un nouveau spectacle qui interroge les principes d’équité, d’identité et d’appropriation. Une troupe de théâtre planche sur sa prochaine création collective, mais les membres sont coincés entre leurs désirs dramatiques et les principes d’appropriation de plus en plus présents au théâtre. Avec humour et tendresse, les protagonistes vont s’opposer, avec comme toile de fond une inclusion qui prend une importance primordiale pour ces acteurs trop habitués à la marge… À Espace libre du 12 au 23 mars.

Consultez la page du spectacle

Stéphanie Morin, La Presse

Amour, acide et noix

PHOTO JULIE ARTACHO, FOURNIE PAR L’AGORA DE LA DANSE

Amour, acide et noix, l’œuvre qui a fait connaître Daniel Léveillé, est de retour à l’Agora de la danse.

Rarement a-t-on la chance de replonger dans le répertoire de chorégraphes établis ; c’est l’occasion en or qu’offre l’Agora de la danse en présentant Amour, acide et noix, la création qui a fait connaître Daniel Léveillé il y a 23 ans et qui a depuis parcouru le monde. D’ailleurs, c’est à l’Agora de la danse même, en 2001, que l’œuvre a d’abord été présentée. Sur scène, quatre corps avec la peau comme seule armure disent la solitude, mais aussi la tendresse comme geste rempart ultime. La pièce est de retour à Montréal avec une nouvelle distribution, pour trois soirs seulement.

Du 13 au 15 mars, à l’Agora de la danse

Consultez la page du spectacle

Iris Gagnon-Paradis, La Presse

Papillon

PHOTO HOI DO PHAN, FOURNIE PAR L’USINE C

Papillon d’Helen Simard, avec notamment Mecdy Mystic Rootz sur scène

La chorégraphe et chercheuse Helen Simard et son acolyte, le compositeur et créateur sonore Roger White, explorent au sein de leur compagnie We All Fall Down le dialogue entre mouvement et son. Danse de rue et contemporaine battent le fer dans leur œuvre Papillon, se défiant, s’apprivoisant, se contaminant dans un jam mélangeant musiques jazz, hip-hop et drum’n’bass. Inspirée par la théorie du chaos (l’effet papillon), la pièce est portée par trois interprètes et musiciens, dont Mecdy Mystic Rootz, lauréat de la catégorie Interprète aux Prix de la danse de Montréal 2023.

Du 12 au 15 mars, à l’Usine C

Consultez la page du spectacle

Iris Gagnon-Paradis, La Presse

Jamais, toujours, parfois

PHOTO ANGELO BARSETTI, FOURNIE PAR LE RIDEAU VERT

Lauren Hartley est l’une des têtes d’affiche de Jamais, toujours, parfois.

Dans ce texte de la dramaturge australienne Kendall Fever, Anna est une jeune femme débordante de créativité qui décide de devenir écrivaine. Seulement, elle doit composer avec une maladie mentale qui la tenaille depuis longtemps. En cessant de prendre une médication qui l’assomme, elle force son entourage à s’interroger sur les décisions prises à l’égard d’Anna. Un texte mis en scène par Brigitte Poupart, qui dirige ici Lauren Hartley, Annick Bergeron, Simon Landry-Désy et Marie-Laurence Moreau. Du 13 mars au 13 avril au Rideau vert.

Consultez la page du spectacle

Stéphanie Morin, La Presse