Porté par une mise en scène ingénieuse et de bons interprètes, le Théâtre La Marjolaine propose un petit spectacle fort divertissant. Dans la tradition des créations de théâtre musical de l’établissement historique des Cantons-de-l’Est.

Une comédie musicale autour de la loi de la gravité. Une « ode au génie » d’Isaac Newton et à l’intuition scientifique... Voilà le pari risqué – et réussi – de Newton et les corps célestes, la nouvelle comédie musicale présentée à Eastman cet été. Si on est très loin des moyens faramineux de Hair, il faut reconnaître le travail et l’ingéniosité des artisans de cette création du Théâtre La Marjolaine. La troupe signe une production à la fois ludique et érudite, historique et contemporaine.

La scène se déroule à Londres en 1684. Alors que les citoyens crient famine, Isaac Newton (Frédéric Desager, assez comique) prédit une fin du monde imminente avec la collision d’une comète avec la Terre. Or, Edmond Halley (excellent Jean-François Poulin) croit que la catastrophe sera évitée. Il avance que l’attraction des corps célestes serait liée à la loi de la gravité terrestre, sans pouvoir le prouver mathématiquement.

Le jeune Halley sollicitera l’aide de son ex-professeur à Cambridge pour décrypter les calculs. Or, le président de la Royal Science Academy, le fumiste Robert Hooke (Jean Maheux, toujours aussi solide), tentera de s’approprier les recherches de Newton, en essayant de le faire arrêter... pour sorcellerie.

PHOTO CHARLY DOWLING, FOURNIE PAR LA MARJOLAINE

Scène de Newton et les corps célestes

Une histoire alambiquée

Le spectacle musical, mis en scène avec brio par Sylvain Scott, possède de belles qualités. Il illustre que la création en théâtre musical au Québec a le vent en poupe, et ce, même si le livret écrit par Stéphane Brulotte s’éparpille un peu, avec plusieurs intrigues secondaires qui nous éloignent de la prémisse (la relation œdipienne de Newton avec sa mère... était-ce vraiment nécessaire ?). La musique d’Yves Morin multiple les références au rock britannique (The Clash, Pink Floyd, etc.). Le compositeur signe des refrains fort jolis, certains assez touchants. Même si son œuvre aurait profité d’un meilleur écrin acoustique que la vieille grange transformée en théâtre par la comédienne Marjolaine Hébert.

Le succès de cette production tient beaucoup à l’énergie et à la polyvalence de sa distribution.

Outre les acteurs cités plus haut, on retrouve Dominique St-Laurent, Marie-Eve Pelletier (splendide Mary Halley !, l’épouse « tigresse » qui insuffle un côté féministe à ce vieux monde dominé par les hommes) et Hélène Durocher, qui joue plusieurs rôles avec aplomb.

PHOTO MARCO CAMPANOZZI, ARCHIVES LA PRESSE

Le comédien, animateur et producteur Marc-André Coallier sur le terrain de son théâtre

Devoir de mémoire

Fondé en 1960, La Marjolaine est le plus vieux théâtre d’été toujours en activité au Québec. Il a connu des hauts et des bas, mais il a été relancé avec fougue et détermination en 2004 par Marc-André Coallier, son propriétaire actuel. En programmant Newton, Coallier perpétue donc la tradition de théâtre musical du lieu, lancée par Claude Léveillée et Louis-Georges Carrier (Doux temps des amours), puis poursuivie par Sylvain Lelièvre et Michel Tremblay (Les héros de mon enfance), entre autres spectacles mémorables.

Ne serait-ce que pour saluer la transmission de l’histoire de ce théâtre unique au Québec, débordant d’âme et de cachet, le voyage à Eastman vaut le détour.

Consultez le site du théâtre
Newton et les corps célestes

Newton et les corps célestes

Mise en scène : Sylvain Scott. Texte et paroles de Stéphane Brulotte. Musique d’Yves Morin.

Du mercredi au samedi, jusqu’au 19 août.

Théâtre La Marjolaine, à Eastman, Durée : près de deux heures avec un entracte

7/10