Ce n’est pas une, mais deux directrices artistiques qui vont succéder à Martin Faucher à la fin de l’édition du FTA, en juin prochain. En effet, le conseil d’administration de cet évènement international de danse et de théâtre a annoncé ce mercredi la nomination de la Québécoise Jessie Mill et de la Luxembourgeoise Martine Dennewald à sa direction artistique.

Les deux directrices ont une bonne connaissance du paysage mondial de la création en arts vivants. Elles fréquentent le circuit des festivals depuis une quinzaine d’années. Dès cet été, elles vont commencer à élaborer la programmation 2022 du FTA. Elles comptent se partager entre elles autant le volet local que celui issu de la scène internationale.

Jessie Mill connaît bien la maison puisqu’elle travaille au FTA depuis 2014 à titre de dramaturge et de conseillère artistique. Avant cela, elle a supervisé les projets internationaux du Centre des auteurs dramatiques (CEAD) de 2010 à 2014. Elle fait aussi partie du comité de rédaction de la revue Liberté.

Martine Dennewald, elle, a collaboré à divers évènements pluridisciplinaires en Europe, en plus de diriger le Festival Theaterformen, à Hanovre, en Allemagne, jusqu’à l’an dernier. Elle compte déménager à Montréal en mai prochain.

Parcours complémentaires

Les deux femmes se sont rencontrées « il y a six ou sept ans dans un festival ».

Au fil du temps, une amitié et des affinités particulières se sont créées. On a eu une envie de travailler ensemble, car nos parcours sont assez complémentaires. Quand j’ai appris le départ de Martin [Faucher], on a plongé.

Jessie Mill, codirectrice artistique du FTA

Outre leur approche inclusive et égalitaire, c’est leur leadership basé sur le dialogue qui a séduit le comité de sélection. « Une programmation, c’est aussi un dialogue, disent-elles. Avec les artistes et le public. On espère engager une grande conversation à toutes les échelles [avec nos équipes, les artistes et les communautés d’ici et à l’international]. »

Une approche différente

Le monde a beaucoup changé depuis 1985 lorsque Marie-Hélène Falcon et Jacques Vézina ont fondé le FTA.

« On prend très au sérieux l’héritage des fondateurs et la mission du FTA. Mais on va apporter une réflexion différente, avance Jessie Mill. Au milieu des années 1980, l’élan initial du FTA était de permettre aux Québécois de se frotter à la création internationale. Plus maintenant, avec les mouvements de mondialisation et les nouvelles technologies, on veut se laisser le temps d’innover, de faire de la recherche et d’explorer. On veut faire une programmation en dehors des grands réseaux des festivals et décoloniser les pratiques artistiques. »

Les codirectrices envisagent aussi l’aventure du FTA comme un moyen de créer des liens avec toutes les communautés ; des associations avec des artistes et des compagnies qui laisseront des traces à long terme, souhaitent-elles.

Faire un festival, c’est se positionner dans le monde. Je serais incapable de concevoir un festival international sans cet engagement. Par exemple, notre relation avec l’art des peuples autochtones, la création des artistes noirs, réfléchir aux enjeux du pouvoir et de la solidarité.

Martine Dennewald, codirectrice artistique du FTA

Elles s’inscrivent donc dans la continuité du mandat du FTA de « brasser la cage » et de bousculer l’ordre établi. « C’est sûr que le but de réunir deux personnes de deux continents, c’est pour infuser de la nouveauté. Or, cette nouveauté ne se trouvera pas seulement dans les propositions scéniques. Mais aussi dans l’organisation du festival. »

Planifier un an à l’avance un festival en temps de pandémie ne sera pas un exercice facile, reconnaissent-elles. « Mais nos paniers ne sont pas vides », dit Martine Dennewald. « Quand les portes des théâtres vont enfin rouvrir, je pense que le rôle du FTA sera encore plus essentiel, ajoute Jessie Mill. Il va y avoir une soif et un désir inédit de revoir des spectacles après cette longue période de privation. »