Ce n’est pas une première bordée de neige qui aurait empêché Benoît McGinnis d’enfiler ses bas filets, sa mini-mini-jupe et ses talons (très) hauts. Mardi matin, le comédien s’est transformé en « reine du coup de minuit » pour l’annonce du nouveau projet de théâtre musical signé René Richard Cyr, la version française de Hedwig and the Angry Inch, d’après l’œuvre du New-Yorkais John Cameron Mitchell.

Le metteur en scène de Belles-Sœurs et de L’homme de la Mancha adapte donc à nouveau une pièce de théâtre musical. Or, il affirme que la production d’Hedwig et le pouce en furie est l’aboutissement du rêve de McGinnis, qui en sera la vedette au printemps 2020.

Cet acteur polyvalent, aussi doué pour jouer Néron dans un classique de Racine au théâtre que le directeur de l’école secondaire du Vieux-Havre dans 30 vies au petit écran, a vu la reprise à Broadway avec Neil Patrick Harris, dans le rôle-titre, pour lequel Harris a reçu un prix Tony. Depuis cinq ans, il rêvait de jouer ce personnage extravagant, moitié fille, moitié garçon, « très résilient, à la fois très fort et très vulnérable », dit-il.

Non genré avant la lettre

Au milieu des années 90, Mitchell a inventé ce personnage non genré avant l’arrivée du terme. Sa pièce raconte l’histoire d’un interprète glam-punk-rock, ni transgenre ni drag queen, qui a fui Berlin-Est à l’époque où le mur séparait la ville en deux. Par amour pour un homme, il s’est aussi fait opérer pour changer de sexe. Allant de déception en déception amoureuse, Hedwig se réinvente en égérie punk rock qui fait des tournées avec son groupe de musiciens, les Pouces en furie – en référence à son organe génital atrophié, fruit de son opération ratée…

En concert, Hedwig explose et exorcise ses tumultes et errances existentiels qui l’ont mené de l’Allemagne de l’Est au Midwest américain. Malgré les embûches, une chose l’animera toujours : le rock et le glamour de la scène et des concerts.

D’ailleurs, mardi matin à L’Astral, McGinnis a exécuté deux numéros du spectacle. Si l’acteur a la livraison d’une Mado Lamotte et ressemble, avec sa longue et blonde chevelure, à la Marjo des années 90, il précise que son défi est tout autre. « Je ne personnifie pas une chanteuse, et je ne joue une drag queen, dit-il. La forme de l’œuvre, très rock, est aussi différente du théâtre de Tremblay, de La duchesse ou de Hosanna. »

Avec Hedwig, je touche à tout ce que j’adore faire comme interprète. Je joue, je chante et je me transforme. Il y a aussi un côté stand-up. C’est un show de bar, de cabaret. J’ai hâte de créer pour vrai ce personnage auquel je me sens attaché.

Benoît McGinnis

De la scène au cinéma

La version originale de John Cameron Mitchell a été créée avec la complicité du compositeur Stephen Trask (paroles et musique). En 1998, avec sa deuxième production au Jane Street Theatre dans le West Village, Hedwig and the Angry Inch a remporté le prix Obie et l’Outer Critics Circle Award pour la meilleure comédie musicale off-Broadway. En 2001, John Cameron Mitchell a porté son œuvre au grand écran, assurant les rôles de réalisateur et d’acteur principal. Le film a notamment été primé aux festivals de Sundance et de Berlin, en plus de recevoir une sélection aux Golden Globes. En 2014, Hedwig connaît la consécration et tient plus de 500 représentations à Broadway.

Aux côtés de McGinnis, on retrouve la comédienne Élisabeth Gauthier Pelletier (qui joue le mari-choriste d’Hedwig dans la production) ainsi que trois musiciens sur scène sous la direction musicale d’André Papanicolaou.

Le spectacle sera présenté du 14 au 23 mai 2020 à L’Astral, puis en tournée à travers le Québec en 2021. C’est une production de la Maison Fauve, la boîte fondée par Catherine Simard, anciennement directrice de Spectra qui avait produit Sainte-Carmen de la Main et Demain matin, Montréal m’attend.

À L’Astral, du 14 au 23 mai 2020
Billets en vente jeudi à midi.