On remarque tout de suite les yeux rieurs de Nour Belkhiria. Son sourire et sa bonne humeur sont contagieux, même à travers un écran. La comédienne passant quelques mois en Tunisie, chez ses parents, notre entrevue s’est déroulée en visioconférence. « J’ai fui l’hiver », lance-t-elle en riant.

Nour Belkhiria incarne depuis septembre Inès Saïd, stagiaire au sein du cabinet d’avocats Lapointe-MacDonald dans Indéfendable, la série quotidienne de TVA. Coïncidence ? La comédienne est, dans la vie, une jeune avocate fraîchement diplômée ! Après ses études de droit à l’Université de Montréal, elle a passé son barreau en 2019 et conclu son stage en 2021. « Quand j’ai vu l’audition pour Indéfendable, je me suis dit que c’était un signe du destin. Ce rôle était vraiment fait pour moi ! C’est incroyable ! », s’exclame celle qui a été révélée dans le film Antigone de Sophie Deraspe.

Née à Tunis, Nour Belkhiria, 27 ans, a deux jeunes sœurs (19 et 24 ans) et des parents médecins. Elle est arrivée à Montréal en 2014, à 18 ans, pour y faire ses études.

PHOTO EMMA JAÏDANE

Nour Belkhiria

Je voulais être comédienne, mais mes parents ne voulaient pas que je fasse des études en art dramatique. Ils jugeaient que c’était trop risqué comme métier, alors j’ai fait mon droit.

Nour Belkhiria

Elle a commencé à faire du théâtre au lycée français de Tunis, puis a intégré la troupe de théâtre de la faculté de droit de l’Université de Montréal. C’est une collègue de la troupe qui lui a indiqué le casting pour Antigone. « On recherchait des gens d’origine maghrébine. Je me suis dit : “C’est ma chance!” » Non seulement elle obtient le rôle, mais en plus elle remporte le prix de la meilleure actrice dans un second rôle, aux prix Écrans canadiens en 2020. Sa carrière d’actrice est lancée. Elle signe alors avec l’agence Duchesne, puis obtient en 2021 le rôle dans le film Une révision aux côtés de Patrice Robitaille.

Nour Belkhiria est très heureuse de sa vie à Montréal, où elle habite depuis maintenant huit ans. « C’est une ville qui nous permet d’être nous-mêmes, je me sens libre, indépendante, c’est une ville très attachante. »

Elle se sent privilégiée de côtoyer de grands comédiens d’ici, même si elle avoue ne pas toujours les connaître parce qu’elle n’a pas grandi au Québec. « Le premier film québécois que j’ai vu, c’est Mommy de Xavier Dolan et j’ai tellement aimé le trio d’acteurs formé d’Antoine Olivier Pilon, d’Anne Dorval et de Suzanne Clément. Ce film m’a bouleversée. J’admire Suzanne Clément », dit-elle. On lui rappelle, sur le ton de la plaisanterie, qu’elle est dans STAT, la série concurrente (à Radio-Canada). « Je sais, mais je l’adore ! »

Elle aime beaucoup aussi Sophie Desmarais avec qui elle a joué dans Les jours heureux, un film de Chloé Robichaud, qui sortira au cinéma l’automne prochain. Elle y incarne une violoncelliste, maman d’un jeune garçon et compagne de Sophie Desmarais, une cheffe d’orchestre, qui entretient une relation complexe avec son père et agent (Sylvain Marcel).

Celui qui lui a donné envie de faire ce métier ne vient toutefois ni du Québec ni de Tunisie. « C’est [l’Ontarien] Jim Carrey ! Je voulais avoir son talent pour les imitations, j’ai une grande admiration pour cet acteur ! »

Nour Belkhiria travaillait depuis quelques mois dans une entreprise comme avocate quand elle a passé l’audition pour Indéfendable. Elle a dû quitter son poste et se lancer à temps plein dans la quotidienne.

PHOTO FOURNIE PAR TVA

Nour Belkhiria dans la série Indéfendable avec la comédienne Tatiana Zinga Botao

Je devais faire un choix, car le tournage dure près de huit mois. J’aime le droit, je suis très fière d’avoir terminé mes études, c’est un bel accomplissement et ça reste un métier extraordinaire, mais je réalise un autre rêve, celui de devenir comédienne.

Nour Belkhiria

Elle fait un parallèle entre les deux métiers : « Les plaidoiries, c’est une performance quand on est avocat, on doit convaincre le juge ou le jury. Quand on est une actrice, on porte une histoire et un rôle. On doit aussi convaincre, par notre prestation, de notre crédibilité », analyse-t-elle.

Est-ce qu’on lui demande des conseils juridiques sur le plateau ? « Parfois oui ! On dirait qu’on me teste ! C’est pratique d’avoir une avocate ! » D’ailleurs, elle va continuer de payer ses cotisations pour rester membre du Barreau. Pour le moment, elle se consacre pleinement à sa carrière d’actrice. Fin mars, elle commence le tournage de la deuxième saison d’Indéfendable. « Je sens l’engouement pour la série, on m’écrit sur les réseaux sociaux, et je suis contente de voir que les gens apprécient ce que je fais, souligne la jeune comédienne. Je vois vraiment le grand impact de la télévision. On se retrouve dans l’intimité des téléspectateurs tous les soirs [une moyenne de 1 563 000]. Et tous mes amis avocats la regardent ! »