Chaque fois que Lisa LeBlanc monte sur scène, il se passe quelque chose. En choisissant de clore ses deux années de tournée Chiac Disco avec un spectacle symphonique vendredi à la salle Wilfrid-Pelletier, elle a créé un évènement unique et à son image : joyeux, spontané et musicalement au poil, avec juste une petite touche d’irrévérence, et surtout débordant de vie.

Reine du disco, du western, du banjo ou du bingo : l’autrice-compositrice-interprète acadienne a été tout ça, vendredi, et même plus. Vêtue d’une longue robe à paillettes, elle est arrivée sur la scène en faisant la révérence, accueillie dans la joie par un public pas mal différent de celui qu’on voit dans cette salle généralement composée surtout de têtes blanches – ce n’est pas un reproche, c’est un constat.

L’ambiance était déjà électrique pour Lisa LeBlanc, qui a choisi de commencer la soirée avec une de ses chansons les plus émouvantes, Kraft Dinner. Seule à la guitare, elle a chanté d’une voix douce cette chanson d’amour pas ordinaire, son côté mélancolique magnifié par l’Orchestre symphonique de Laval, comme si elle avait voulu donner un côté plus cérémoniel à la soirée.

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Lisa LeBlanc et l’Orchestre symphonique de Laval

Mais le ton a vite changé avec Dans l’jus, alors que son groupe « traditionnel » – Maxime Gosselin à la batterie, Benoit Morier à la basse, Sunny Duval à la guitare, Camille Gélinas aux claviers – est venu la rejoindre. Une chanson qui se prêtait bien aux arrangements, puisque sa version originale est déjà orchestrale. Mais on a apprécié l’ajout des cuivres à la fin, et c’est ce qui a fait la beauté et l’intelligence des arrangements d’Antoine Gratton, toutes ces petites touches inattendues et ces surprises, parfois amusantes, qui ajoutaient du piquant.

A suivi l’irrésistible Pourquoi faire aujourd’hui, où l’orchestre dirigé par Jean-Michel Malouf a semblé plus dans l’ombre par rapport aux instruments électriques. Ils l’ont d’ailleurs enterré par moments pendant la soirée, malgré un arrimage la plupart du temps réussi. Dommage aussi que l’orchestre ait été un peu caché : toute la soirée, on a malheureusement mal vu les musiciens.

Après ce premier bloc disco-funk, applaudi longuement, la chanteuse s’est enfin adressée au public. « Vous allez me faire brailler à la troisième toune ! », a-t-elle lancé, manifestement heureuse.

On joue avec un orchestre, ça se passe pour vrai… Je ne comprends rien, mais je le prends ! Quand même, la salle Wilfrid-Pelletier, ce n’est pas de la petite crotte de nez !

Lisa LeBlanc

C’est comme ça qu’on l’aime, Lisa LeBlanc, à la fois candide et ratoureuse. Tout comme on a aimé cette version cinématographique jouée au petit trot de J’pas un cowboy, tellement remaniée qu’on se serait cru dans un saloon. L’ambiance western a été complétée avec deux pièces tirées de son album en anglais Highways, Heartaches and Time Well Wasted.

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Lisa LeBlanc

Lisa LeBlanc est ensuite revenue à son chiac disco, qui est « une rencontre entre le côté red neck et le glamour », a-t-elle expliqué. « C’est comme ça que je me sens ce soir ! », a-t-elle lancé avant d’entamer l’excellente et exaltante Gossip I. Bien sûr, il y a eu aussi des moments plus calmes, comme la très belle Me semble que c’est facile, mais c’était avant que la musicienne ne s’essaie au « banjo symphonique » le temps de deux chansons trépidantes – un essai, disons-le, pas mal concluant !

La dernière ligne droite du spectacle s’est déroulée tambour battant, lancée avec Gossip II, où on a pu apprécier les aptitudes funk de l’orchestre. Lisa LeBlanc nous a ensuite entraînés dans sa bubble joyeuse pour nous y faire danser… Pendant la présentation des musiciens, la chanteuse est allée se transformer en Belinda, son personnage de reine du bingo créé pendant la pandémie pour se désennuyer, puis a chanté son grand succès (!) It’s not a game, it’s a lifestyle, qui s’est terminé avec un lourd solo de guitare de Sunny Duval.

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La musicienne acadienne Lisa LeBlanc a clos sa tournée à la salle Wilfrid-Pelletier, à Montréal.

On savait déjà, rendu là, qu’on avait vécu une soirée pas mal champ gauche qui ne ressemblait à aucun autre spectacle symphonique à ce jour. Mais quand, pour terminer, Lisa LeBlanc a entonné Aujourd’hui, ma vie c’est d’la marde avec la même douce retenue que dans la première chanson et avec toute la foule qui chantait avec elle son refrain dont on ne se lassera jamais, on a su qu’on avait assisté à la finale de spectacle la plus drôle et décalée de toute l’histoire mondiale des finales de spectacle.

« C’était le genre de soirée once in a lifetime », avait lancé Lisa LeBlanc juste avant. Pas juste pour elle.