David Goudreault présentera la semaine prochaine au Théâtre Maisonneuve la première montréalaise de son nouveau spectacle Dans la marge du texte. Il reprend ainsi son rôle de passeur, avec le même mélange d’humour et de poésie dont il a déjà éprouvé la recette avec succès.

Pour son retour sur scène, le slammeur-poète-romancier-musicien a même sollicité les conseils de deux artistes aux profils on ne peut plus opposés : Mariana Mazza et Richard Séguin. Le spectre, convient-il, est très large. « Mais ce n’est pas un grand écart dénué de sens. »

Quiconque a vu Au bout de ta langue, le premier spectacle de David Goudreault, sait en effet qu’il manie aussi bien l’humour que la poésie. N’empêche qu’il a été fort soulagé lorsqu’il a entendu les grands éclats de rire de Mariana Mazza lorsqu’elle a assisté à sa première soirée de rodage, l’automne dernier.

« Quand Spectra m’a recommandé d’engager des gens pour avoir un œil sur la mise en scène, j’ai tout de suite pensé à elle, parce que je la trouve authentique. Je me suis dit si j’arrive à faire rire cette fille, ça veut dire que l’humour fonctionne. »

Il comptait aussi sur ses conseils pour l’aspect performance. Quant à son ami Richard Séguin, son regard l’a conforté dans son choix « viscéral » de poèmes.

« Je voulais son avis : ça marche-tu, as-tu vécu quelque chose ? Ça m’a encouragé. Maintenant c’est fini les rodages, je suis en mode “je veux sortir de l’enclos”. »

Habiter la scène

Dans Au bout de ta langue, David Goudreault racontait comment il est devenu écrivain. Dans la marge du texte relate cette fois son histoire de lecteur.

« Comment je suis devenu lecteur, et pourquoi je le demeure. Je raconte comment la lecture a été une planche de salut, aussi comment elle est au cœur de qui nous sommes comme nation. Ça va vraiment du personnel à l’universel. »

Entre les grands textes d’Anne Hébert, Hector de Saint-Denys Garneau, Arthur Rimbaud ou Agota Kristof, David Goudreault racontera des anecdotes, lira quelques lettres qu’il a écrites pour l’émission Bonsoir Bonsoir… et jouera même un peu de piano – il a suivi des cours expressément pour cela.

On le savait touche-à-tout, mais on se demande quelle sera la prochaine étape… la danse contemporaine ? Il rigole. « Non ! Je m’engage officiellement à ne faire ni danse contemporaine ni sculpture. » La musique, explique-t-il, sert surtout de souffle, de respiration dans un spectacle tout de même très dense, à l’image du précédent.

Être dense, pour moi, c’est un compliment ! La générosité, c’est une belle qualité à avoir comme artiste. Le spectacle est chargé, j’en donne. C’est aussi une question de respect du spectateur, une façon de reconnaître le choix que les gens font de venir me voir.

David Goudreault

Créé en 2017, Au bout de ta langue est né un peu par hasard. C’est en fait une adaptation pour la scène d’une conférence qu’il avait déjà donnée dans les écoles autour de 600 fois.

« Ç’a été vraiment une belle surprise… que j’ai jouée plus de 400 fois ensuite ! Là, c’est mon deuxième spectacle, mais mon premier vrai qui est écrit, joué, monté, voulu. »

Il y a maintenant une vraie scéno, un décor, des accessoires, des éclairages dignes de ce nom. Et il habite la scène « au maximum », maintenant qu’il connaît son terrain de jeu. « J’ai calculé, je fais 51 déplacements ! Bon, ce n’est pas Michel Courtemanche, mais quand même. »

Artiste populaire

Depuis quelques années, David Goudreault est devenu une véritable vedette, à cheval sur plusieurs disciplines dont le fil conducteur est toujours l’écriture. Il a été propulsé par la popularité de sa série de romans La bête, ses nombreuses collaborations avec d’autres artistes, de Luce Dufault à Louis-Jean Cormier, ses passages remarqués à la télé, et le succès de son précédent spectacle.

Cette popularité le réjouit, même si elle vient parfois avec des critiques. Et il l’assume complètement, parce qu’elle lui permet de « transmettre une passion qui n’est pas si populaire que ça », déclare-t-il.

PHOTO DOMINICK GRAVEL, LA PRESSE

David Goudreault

Si, par cette proximité, j’arrive à faire lire quelques livres de plus, à faire connaître quelques auteurs québécois, c’est déjà beaucoup. En plus, je suis artiste à temps plein. Je ne vais pas commencer à cracher dans la soupe.

David Goudreault

Ce qui le guide, ajoute-t-il, c’est vraiment « l’amour du livre et de la littérature ». « Et non pas des littéraires. » Pause, regard entendu. Mais encore ?

« Mon amour de la littérature est inversement proportionnel à celui que je porte à l’univers littéraire. » C’est vrai, ses relations sont difficiles avec le milieu, qui a été plutôt dur avec lui.

« On ne s’aime pas beaucoup et c’est correct. Je ne suis pas dans la clique, ça me va. Jusqu’à un certain point, ça me rassure. »

Grosse équipée

David Goudreault sait qu’il s’embarque pour une grosse équipée : il a une soixantaine de spectacles prévus jusqu’à la fin de 2024, et d’autres dates seront annoncées bientôt pour 2025. « Je ne sais pas si on ira jusqu’à 400. Peut-être. Mais plusieurs centaines de représentations, c’est sûr. »

Il se prépare donc à prendre la route… même s’il déteste la tournée.

Je sais la fatigue qu’il y a au bout de 200 000 km d’autoroute, et de sommeil relativement tout croche au motel Louise, pour ne nommer que celui-là ! C’est la rencontre au bout qui m’allume. Prendre la route est une souffrance, chaque rencontre sera un plaisir.

David Goudreault

Il souhaite à ce spectacle de rejoindre des gens de tous les horizons, mais jamais au détriment du contenu. « Être populaire n’est pas synonyme d’un manque de qualité », dit celui pour qui l’humour est surtout un procédé.

« Dans mes spectacles, il y a aussi des gens qui pleurent ! Je raconte des choses très dures, et très belles, et des niaiseries. Mais mon engagement, c’est que tu vas repartir avec quelque chose dans la tête. Ou dans le cœur. Ou idéalement les deux. »

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