Daniel Danis a toujours écrit autant pour les adultes (Le chant du dire-dire, Le langue-à-langue des chiens de roche) que pour les enfants (Bled, Kiwi). Mais c'est lorsqu'il s'adresse aux jeunes que le dramaturge estime qu'il est le plus «politique».

«Je peux davantage me laisser aller, créer des images poétiques fortes. On dirait que lorsque j'essaie de parler de politique pour les adultes, je tombe plus facilement dans le fleur bleue, explique l'auteur, dont la pièce Rosépine est présentée depuis hier à la Maison Théâtre. Pour les enfants, on peut raconter des choses assez crues.»

Dans cette oeuvre mise en scène par la troupe de théâtre de marionnettes Les Amis de Chiffon, une fillette de 6 ans essaie de «consoler la Terre» après le passage du tsunami sur son pays. Rosépine, qui n'a peur de rien, suivra un parcours initiatique «céleste et terrestre» qui lui fera rencontrer toutes sortes de personnages. Pour finalement trouver d'où viennent les «vrais» pleurs qui ont attiré son attention, et quoi faire pour s'occuper de la tortue-terre qui a besoin d'elle.

«C'est une manière de dire aux enfants qu'ils ont le pouvoir, par des gestes simples, de consoler cette terre métamorphosée. Eux aussi, ils peuvent améliorer le vivre-ensemble.»

Rosépine, mis en scène par Marthe Adam, est un spectacle à l'ambiance légèrement japonisante - musique, décors, accessoires. Daniel Danis utilise souvent «d'autres lieux, d'autres espaces» pour parler de l'enfance. «Ça me permet d'aborder d'autres thématiques.»

Respiration

Le spectacle est né d'une rencontre, lors d'un colloque sur le théâtre de marionnettes, avec la bande des Amis de Chiffon. «Je les connaissais déjà parce que j'ai longtemps habité au Saguenay. Lorsque nous nous sommes revus, nous avons eu envie de créer un spectacle pour enfants ensemble.»

C'est ainsi que Daniel Danis a écrit Rosépine pour le théâtre de marionnettes. «J'ai toujours eu un intérêt pour l'objet inanimé qui s'anime», dit-il. Il vient d'ailleurs d'écrire une autre pièce pour marionnettes, La morsure de l'ange, destinée aux adultes et mise en scène par le Théâtre incliné, qui sera présentée au Festival de Castelliers en mars.

«Pour les deux pièces, j'ai écrit un canevas qui propose des pistes, et dans lequel les créateurs peuvent puiser. Il faut voir le texte plus comme un scénario que comme un texte de théâtre plein, en fait. Pour La morsure de l'ange, par exemple, ils ont gardé seulement un dixième de mon texte...»

L'écriture pour marionnettes demande une respiration différente, précise l'auteur, qui doit respecter le «temps» de l'objet. «Ce n'est pas le même temps que celui de l'acteur, qui décide de son texte. Ici, les auteurs sont davantage au service d'un univers. C'est mieux de ne pas être pointilleux sur les mots... Je m'assure par contre que la construction dramatique soit respectée, quitte à parfois réécrire de petits bouts.»

Un travail qui demande plusieurs allers-retours entre l'équipe de production et lui. «Marthe aussi avait ses idées, une vision. En tout, on a fait sept versions.» Tout ça, bien sûr, pour obtenir une histoire et un texte poétique qui donnent à voir autant qu'à entendre aux jeunes spectateurs. «C'est simple: s'il y a trop de texte, il brise la marionnette. Il passe par-dessus. Alors, dans ces cas-là, c'est mieux de choisir un autre véhicule.»

À la Maison Théâtre jusqu'au 15 février. Pour enfants de 5 à 9 ans.