Dans Emovere, nouvelle création du Quat'Sous mise en scène par Éric Jean, il est question des blessures de l'enfance. Des racines et des traces de nos géniteurs sur nos personnalités. De la filiation paternelle et maternelle, en résumé. Avec cette éternelle interrogation: Quel héritage laisse-t-on à ses enfants?

Une demi-douzaine d'interprètes errent dans une maison avec leur histoire et leurs souvenirs. Le passage du temps est inscrit sur les murs en démolition et dans la poussière qui se dépose au sol. Un acteur viendra nous raconter sa visite à Pompéi, ville ensevelie sous les cendres après l'éruption du Vésuve, il y a 2000 ans. À l'opposé du décor en ruine, le temps s'y est arrêté. Le choc entre les récits intimes et la tragédie historique est au centre d'Emovere. Cette fois-ci, Éric Jean construit littéralement dans les cendres de Pompéi.

Les acteurs livrent leurs témoignages tirés d'improvisations en parlant au micro et en se présentant par leur vrai nom. Entre ces interventions, ils incarnent des membres de leur famille ou des proches. La scène devient un lieu de passage où l'on tisse et où l'on rompt les liens.

Tout ça dans un constant va-et-vient. Il y a des moments très beaux, poétiques, et beaucoup de musique (Janis Joplin, Serge Reggiani, entre autres). Il y en a d'autres plus comiques, comme les numéros joués par l'excellente Marie-Hélène Thibault. Cette comédienne est directement branchée sur ses émotions: elle nous fait pouffer de rire, puis elle nous arrache les larmes dans son monologue sur la peur. Vivement un premier rôle dans un grand théâtre pour elle!

Hélas! la pièce n'évite pas le pathos. Les propos lourds et redondants s'y accumulent. Il aurait été intéressant d'approfondir une piste, de creuser un sillon dramatique. Par moments, ça ressemble à une psychanalyse sublimée par la Muse du poète.

Au final, il se dégage quand même une sincérité et une vérité dans cette proposition. Sans être parfait (les moments dansés sont plutôt malhabiles et inutiles), ce spectacle rend justice à son titre : il est vivant et assez émouvant.

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Emovere, au Quat'Sous, jusqu'au 20 mai.