La trilogie Des femmes devait être créée le 28 juin dernier au Festival grec de Barcelone, en Espagne. Mais la Ville de Barcelone s'est opposée à la venue de Bertrand Cantat. Les représentations ont finalement été annulées à la suite d'un décret municipal. Le chanteur avait de son côté renoncé à se produire au Festival d'Avignon (en juillet) «par respect pour la douleur de Jean-Louis Trintignant». Le père de Marie Trintignant avait annulé sa participation au festival en apprenant que Cantat allait y être.

La première mondiale a donc plutôt eu lieu à Cenon, fin juin, dans la région bordelaise (d'où vient Bertrand Cantat), avant d'être présentée à Athènes le 9 juillet, dans une mise en scène que notre collaborateur Renaud Loranger avait qualifiée de «virtuose et monumentale». Les trois pièces ont ensuite été présentées dans plusieurs villes de France, de Belgique et de Suisse. Avec ou sans Cantat.

Alors qu'en a pensé la critique? De façon générale, les commentaires ont été plus positifs lorsque Bertrand Cantat était présent sur scène. Le quotidien français Libération a écrit: «L'ex-Noir Désir illumine Des femmes, création bancale de Wajdi Mouawad.» Le critique René Solis y explique que «à chaque intervention de Cantat, la représentation prend un sens et une force qui, le reste du temps et pour l'heure, lui font défaut». Et encore: La mise en scène de Wajdi Mouawad «n'évite pas l'écueil de l'emphase kitsch». Sans Cantat, le quotidien Le Monde a écrit: «Des six heures de tragédie tant attendues à Avignon ne surnage que la voix d'un absent: Bertrand Cantat.»

Pareil pour Télérama. «Sans Bertrand Cantat, l'interminable trilogie de Wajdi Mouawad tourne à vide», a titré le magazine culturel au mois de juillet dernier. Fait intéressant, la critique déplore le fait que Wajdi Mouawad n'ait en rien modifié sa mise en scène en l'absence du choeur à une seule voix que devait interpréter le chanteur, qui sera remplacé au Québec par le chanteur chilien Igor Quezada. «Bertrand Cantat absent, le vilain dispositif de concert rock prévu pour lui ne signifie plus grand-chose et paraît évidemment d'une vaine laideur.»

Mais le magazine Le Point a salué le travail du metteur en scène. Au mois de décembre, la journaliste Marion Cocquet écrivait: «Le pari est réussi. Les paroles de Sophocle prennent ici une urgence nouvelle. Les saturations de la batterie et de la basse, les cris, se brisent soudain en une plainte, mais sans pourtant d'effet cosmétique, dans une intelligence profonde du texte original. Du théâtre antique pur, mais qui sonne comme le meilleur de Noir Désir.»